100 ans de résilience dans le temps. La continuité dans la politique étrangère (1922-2022)
Au cours des 100 années qui se sont écoulées depuis la mise en circulation du journal « To Vima », alors intitulé « Eleftheron Vima », la Grèce et le monde ont changé, tandis que les changements, positifs ou négatifs, dans les relations de la Grèce avec ses pays voisins, notamment avec la Turquie, ont été constants.
L'année 1922 marque une étape dramatique dans les relations de la Grèce avec la Turquie, en raison de la catastrophe d'Asie Mineure. Depuis lors et pendant un siècle, le pendule des relations gréco-turques a oscillé sur un spectre défini par des rapprochements, des crises et des ruptures. Après la tragédie de l'Asie mineure, la Grèce sera confrontée à une nouvelle réalité, définie par le traité de Lausanne en 1923.
La Grèce sera à la recherche d’une nouvelle voie diplomatique, la principale préoccupation étant désormais la sauvegarde de l'intégrité territoriale et la protection de l'indépendance nationale. La période de l'entre-deux-guerres a été marquée par la consolidation des politiques de Venizelos et de Kemal, qui ont travaillé ensemble pour établir un esprit de compréhension et renforcer les liens bilatéraux. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, les deux pays vont se retrouver dans des camps différents et à des points de départ différents, en raison de la position qu'ils ont choisie de prendre pendant la guerre. La Grèce, au prix de grands sacrifices, se bat contre l'Axe, tandis que la Turquie maintient une position ambivalente, apparemment neutre. Après la Seconde Guerre mondiale, la Grèce et la Turquie, par leur intégration progressive dans la coalition des puissances occidentales et leur adhésion à l'OTAN (1952), semblent avoir repris le fil de la coopération.
Cette évolution sera éclipsée par les développements liés à la question chypriote, de 1955 jusqu'à l'invasion turque de Chypre en juillet 1974. Parallèlement, dès le début des années 1970, la Turquie a formulé une série de revendications à l'encontre de la souveraineté territoriale et des droits souverains de la Grèce, marquant l'élargissement de la confrontation gréco-turque, au-delà de la question chypriote, dans la mer Égée et en Méditerranée orientale. Depuis près d'un demi-siècle, nous sommes confrontés au révisionnisme turc sans cesse croissant, sous la menace de guerre qui plane au dessus de nos têtes comme l'épée de Damoclès, et à la tentative de la partie turque d'imposer un nouveau « modèle » de relations bilatérales et régionales, incompatible avec toute notion de bon voisinage et de respect des principes fondamentaux du droit international.
Aujourd'hui, le gouvernement grec, libéré des stéréotypes et des fardeaux, a choisi de ne pas se laisser entraîner dans une confrontation stérile et dans des conditions favorisant la polarisation créées par le récit turc sans précédent. Dans le même temps, cependant, il indique clairement qu'il n'a pas l'intention de renoncer à ses intérêts nationaux tels qu'ils sont définis par le droit international et le droit international de la mer. En outre, la Grèce a exprimé sa volonté de mener un dialogue constructif avec la Turquie, sur la base des principes et des règles fondamentaux mentionnés ci-dessus, concernant la délimitation du plateau continental et de la ZEE en mer Égée et en Méditerranée orientale.
Le bref aperçu du siècle de la politique étrangère grecque après 1922 serait incomplet s'il se limitait au domaine des relations gréco-turques. Ces 100 ans de résilience n'ont certainement pas été 100 ans de solitude. Le principal tissu conceptuel de la politique étrangère grecque est l’attachement aux fondements diplomatiques offerts à notre pays par la communauté internationale et l'Occident.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, la Grèce était l'un des 51 membres fondateurs de l'ONU. Pendant cette période, nous avons participé activement à ses activités, tout en étant attachés aux idéaux et aux valeurs de la Charte de l'ONU : le règlement pacifique des différends, le respect des règles du droit international et du droit de la mer, le respect des droits de l'homme. Grâce à la clairvoyance de Konstantinos Karamanlis, l'adhésion de notre pays à ce qui était alors la Communauté européenne en 1981 a revêtu une importance particulière pour le renforcement de son rôle diplomatique et pour l'amélioration de ses capacités de défense et de dissuasion.
Aujourd'hui, la Grèce est un État membre ayant une participation substantielle aux développements et aux décisions au sein de l'UE. Ces dernières années, une nouvelle dynamique a été donnée à notre politique étrangère, modifiant le modèle selon lequel cette dernière est exercée. À travers un ensemble de 300 accords bilatéraux que nous avons signés de 2019 à aujourd'hui. Notamment, l'accord de partenariat stratégique avec la France, l'accord de coopération en matière de défense mutuelle avec les États-Unis et la déclaration conjointe de partenariat stratégique avec les Émirats arabes unis. En outre, nous avons signé les accords de délimitation des ZEE avec l'Italie et l'Égypte.
Nous sommes également convenus avec l'Albanie de saisir la Cour internationale de justice de La Haye de la question de la délimitation de la ZEE. La Grèce, en trois ans, a grandi sur la base du droit international et du droit de la mer. En outre, nous avons réussi à forger des liens stratégiques solides d'amitié et de coopération non seulement avec nos partenaires et alliés traditionnels, mais aussi avec des pays tels qu'Israël, l'Arabie saoudite et d'autres.
Nous avons soutenu avec fermeté la nécessité d'intégrer nos « voisins » de la péninsule des Balkans dans la famille européenne et nous avons entamé un rapprochement avec les États du continent africain.
Si 1922 peut être considérée comme une étape importante dans les relations gréco-turques, 2022 est une année charnière pour les relations internationales, dans le contexte asphyxiant des développements découlant de l'invasion russe en Ukraine. Cette nouvelle réalité ouvre un nouveau chapitre dans la politique étrangère de notre pays. En faisant preuve de résilience et de capacité d'adaptation aux évolutions, la Grèce peut assurer sa place parmi les acteurs internationaux qui apporteront des solutions et des réponses dans un environnement international de plus en plus complexe.
Des solutions et des réponses que, je l'espère, le journal « To Vima », l'un des journaux les plus historiques de notre pays, continuera à enregistrer avec fiabilité dans ses nouveaux 100 ans.
December 31, 2022