Conférence de presse conjointe de M. N. Kotzias et de son homologue du Royaume-Uni, P. Hammond à l'issue de leur rencontre (Athènes, 14 janvier 2016)

Conférence de presse conjointe de M. N. Kotzias et de son homologue du Royaume-Uni, P. Hammond à l'issue de leur rencontre (Athènes, 14 janvier 2016)NIKOS ΚΟΤΖΙΑS : Bonjour. C'est avec un grand plaisir que nous avons accueilli le ministre britannique des Affaires étrangères. Nous sommes convenus de la nécessité d'une vision pour l'Europe, une vision qui ne peut être limitée à certains instruments de diplomatie. C'est pourquoi les réflexions du Royaume-Uni concernant ses relations avec l'Union européenne, au-delà de l'évaluation de telle ou telle proposition, comportent un élément positif, à savoir elles remettent au cœur du débat la façon dont nous envisageons l'avenir de l'Europe, le rôle utile que l'Europe pourrait jouer au profit de ses citoyens ainsi que son rôle dans le monde du 21e siècle.

Nous avons entendu avec la plus grande attention les réflexions du Royaume-Uni, des réflexions dont nous a fait part le Premier ministre britannique, M.  Cameron, dans ses lettres, sur l'avenir des relations de ce pays avec l'Union européenne. Je voudrais souligner encore une fois que pour nous la présence du Royaume-Uni au sein de l'Union européenne est très importante et donne un poids particulier à l'Union européenne dans son ensemble

Nous avons de la compréhension à l'égard des demandes britanniques. Nous croyons en la cohésion de l'Union européenne et pensons qu'il y aura un accord mutuellement avantageux tant pour le Royaume-Uni que pour l'Union européenne.

Les temps sont difficiles. Je voudrais de nouveau faire part de notre indignation face aux actes terroristes qui ont visé les villes de Djakarta et de Bagdad, mais aussi face à ceux qui ont récemment touché notre voisinage, Istanbul et autres régions de la Turquie.

Notre région est de toute façon instable et c'est pourquoi nous apprécions beaucoup les efforts consentis par toutes les parties en vue de mettre fin à la guerre en Syrie.

Nous saluons la Conférence internationale convoquée par le gouvernement britannique dont l'objectif est de trouver des donateurs pour la reconstruction de la Syrie et je pense qu'il s'agit d'une action courageuse de la part de Londres.

Nous soutenons le Processus de Vienne et l'application des accords de Minsk.
Nous vivons à une époque difficile. Cela est beaucoup plus ressenti en Grèce car nous faisons partie de la Méditerranée orientale. Il y a la crise, la guerre, le chaos dans la vie des gens et de grands flux de migrants économiques et de réfugiés.

Nous sommes convenus de l'approfondissement de notre coopération et de la mise en place d'un groupe de travail, afin de valoriser les expériences et les capacités dont dispose le Royaume-Uni en matière de lutte contre les problèmes liés à l'immigration économique, à l'application des accords internationaux et à la réadmission. Nous sommes convaincus que leur expérience nous sera très utile.

Nous avons également discuté avec mon collègue des questions relatives aux Balkans occidentaux à l'égard desquelles il y a une grande convergence d'intérêts.

Bien évidemment, nous avons également discuté de la question chypriote puisque nos deux pays sont des puissances garantes sur la base des accords internationaux. Nos deux pays veulent une solution équitable, sur la base des résolutions de l'ONU, qui réponde aux besoins de la population chypriote ainsi qu'aux besoins particuliers de ses communautés.

Nous, comme vous le savez, et moi personnellement, pensons que le système des garanties est obsolète. Il a été violé de plusieurs manières. En effet, du point de vue du droit international, ce système est illégal à bien des égards. Nous espérons, tout comme les autres, qu'une solution sera trouvée à la question chypriote qui contribuera aussi à la stabilisation de la région.

Pour nous, c'était un grand plaisir d'accueillir le ministre des Affaires étrangères du Royaume-Uni. J'ai proposé au ministre de revenir en Grèce pour une visite plus longue. J'ai également accepté son invitation d'effectuer une visite et d'établir une coopération et je pense que cela sera le point de départ pour l'approfondissement de nos relations, ce qui sera dans l'intérêt du Royaume-Uni, de la Grèce, de la région et de toute l'Europe.

Philip, je te remercie encore une fois pour cette visite constructive et utile qui contribuera au renforcement ultérieur des liens d'amitié entre nos deux pays qui sont historiquement unis à travers la première renaissance de l'Etat néohellénique.
Je vous remercie.

PHILIP HAMMOND : Merci. C'est un grand plaisir pour moi Nikos de me trouver à Athènes. Je te remercie pour l'accueil que vous nous avez réservé, à moi et à ma délégation.

Je voudrais commencer mon intervention là où tu t'es arrêté. Nous avons abordé la relation historique entre la Grèce contemporaine et le Royaume-Uni et le rôle de ce dernier dans l'histoire grecque contemporaine, un rôle qui était, je l’espère, positif.

Nous avons décidé d'avoir une coopération plus étroite à l'avenir entre nos pays et que nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir afin que cet engagement devienne réalité.

Car, comme M. Kotzias l'a indiqué, nous traversons une période difficile. Il y a à peine quelques heures un attentat terroriste s'est produit à Djakarta. Et en ce moment des informations nous parviennent concernant une attaque terroriste en Turquie du Sud-est.

Je tiens à exprimer mes condoléances à tous ceux qui ont été touchés par ces attaques terroristes ainsi qu'à toutes les victimes des attaques terroristes survenues ces dernières semaines.

Nous sommes aux côtés de tous les gouvernements, des pays et de leurs peuples qui sont touchés par le terrorisme. Ce n'est qu'en restant unis et en coopérant que nous allons vaincre le terrorisme.

Ce matin nous avons tout d'abord discuté des questions qui préoccupent le Royaume-Uni concernant la réforme de l'Union européenne. J'ai décliné la position britannique et les réformes que nous voulons introduire.

Nous pensons et sommes convaincus que ces réformes seront au profit de tous les Européens car nous voulons une Europe adaptée au 21e  siècle, une Union européenne qui puisse répondre aux priorités de ses peuples, de ses citoyens et je pense que ces priorités sont la croissance économique et la création d'emplois. L'Union européenne doit renforcer activement l'économie européenne et ne pas limiter les ambitions de ses peuples. Nous sommes confrontés à la concurrence de l'économie mondiale.

Personne ne nous doit rien, à nous Européens. Personne ne nous doit notre survie. Nous devons nous-mêmes lutter pour notre survie. Afin d'y parvenir de manière efficace, l'Union européenne doit nous aider.

C'est pourquoi je pense que nous réussirons à parvenir à une solution positive dans le cadre de laquelle des réformes seront mises en place afin que l'Union européenne devienne plus efficace et que les Britanniques puissent voter favorablement lors du référendum et que la Grande-Bretagne reste au sein d'une Union européenne réformée.

Je pense que l'Europe peut profiter du Royaume-Uni et ce dernier peut profiter de l'Europe, si son fonctionnement est correctement réformé.

Nous avons discuté de la situation à Chypre, où le Royaume-Uni et la Grèce ont un intérêt crucial à ce que ce problème perdurant soit résolu. J’ai effectué des déplacements à Chypre à plusieurs reprises ces derniers mois, j’ai rencontré les membres des deux communautés et je suis optimiste. Nous en sommes éventuellement au stade du progrès en vue de la résolution de ce différend.

S’agissant des garanties, auxquelles s’est référé Nikos, nous essayons de trouver des solutions innovantes. Nous sommes disposés à prendre en compte toute proposition approuvée par les deux communautés à Chypre.

Le Royaume-Uni ne tire aucun intérêt particulier de cette discussion. Elle s’intéresse à trouver une solution durable et efficace pour les deux communautés de Chypre.

Venons-en maintenant à une question d’actualité: l’immigration. Nous nous sommes penchés sur cette question de manière substantielle. Nous ne sommes pas, en tant que Royaume-Uni, membre de l’Accord de Schengen et, dans ce sens, cette crise, cette vague de réfugiés en Europe ne nous affecte pas tant. Toutefois, nous voulons jouer un rôle pour faire face au problème auquel l’UE est confrontée.

Plus précisément, nous pensons que ce problème ne sera pas résolu au moyen de désaccords à Bruxelles sur la question de savoir qui prend quelle partie des réfugiés qui affluent. Nous pensons que le problème sera résolution en luttant contre le flux de l’immigration clandestine, en la limitant dans les pays d’origine et en améliorant les procédures dans les pays de transit.

Nous sommes disposés à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour renforcer les frontières communes de l’UE. Nous avons un bateau des autorités portuaires à l’heure actuelle dans la mer Egée avec un équipage britannique, nous coopérons avec le gouvernement grec pour garantir l’efficacité de cette présence. Nous avons offert 5 millions de livres à titre d’aide humanitaire à la Grèce pour lutter contre le problème des migrants dans les îles grecques.

Nous finançons également, un programme de rapatriement bénévole. Et ce matin, nous nous sommes mis d’accord sur le fait que notre coopération sera renforcée pour faire face aux crises et offrir une assistance en terme de logistique pour le retour des migrants, domaine dans lequel la Grande-Bretagne a une grande et longue expérience.

Je suis heureux de pouvoir déclarer que ces dernières années, la Grande-Bretagne a réussi à faire retourner dans leur pays d’origine un plus grand nombre d’immigrés clandestins que l’ensemble de l’Union européenne.

Nous avons donc des connaissances, une expérience et nous sommes convenus de coopérer pour utiliser cette expérience de la meilleure façon possible.

Nous voulons donc être partie de la solution aux problèmes de l’UE. Nous voulons être un acteur important de l’UE. Et si un accord est atteint sur le train des réformes, si nous parvenons à convaincre le peuple britannique que son intérêt se trouve au sein de l’avenir européen, je pense que cela sera positif pour la Grande-Bretagne, pour la Grèce, pour l’Europe et la communauté internationale.

Je vous remercie.

JOURNALISTE : Je suis Nikos Meletis, de la télévision publique ERT. Monsieur Hammond, vous avez dit que vous n’étiez pas particulièrement intéressé par la question des garanties et que vous accepteriez une solution convenue par les deux parties. Ma question est la suivante : si les deux parties ne se mettent pas d’accord, la Grande-Bretagne est-elle prête à se départir du système des garanties ? Et si elle s’en départit, lorsque deux des forces garantes – la Grèce et la Grande-Bretagne – ne s’intéressent pas à maintenir le système des garanties, est-ce que cela peut être maintenu unilatéralement par la Turquie  seulement?

PHILIP HAMMOND : Le système en vigueur à l’heure actuelle est celui des garanties trilatérales Grèce, Turquie et Grande-Bretagne. Et ce que j’ai dit est que la Grande-Bretagne n’a pas le même intérêt à maintenir le système. Même aucun intérêt au maintien de tout système, à l’avenir.

La seule chose qui nous intéresse est de soutenir une solution. Et si les deux communautés à Chypre conviennent d’un modèle pour la sécurité de Chypre à l’avenir et si ce modèle ne prévoit aucun rôle pour la Grande-Bretagne, alors nous nous ferons un plaisir de ne jouer aucun rôle. Si ce modèle requiert de la Grande-Bretagne qu’elle joue un rôle particulier, alors nous jouerons avec plaisir le rôle que nous demandent de jouer les deux communautés.

Nous sommes donc totalement à la disposition d’une solution durable à Chypre et je pense que mes collègues de Grèce et de Turquie sont d’accord. Nous souhaitons parvenir à une solution durable à Chypre et nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour que cela puisse avoir lieu.

JOURNALISTE : Je suis Sofia Aravopoulou, de l’Agence de presse athénienne (APE). Monsieur Hammond, après Athènes, vous vous rendrez à Ankara. J’aimerais vous demander si vous avez l’intention de discuter de la question des réfugiés puisque, comme vous le savez, les réfugiés transitent par les côtes turques vers Athènes. Par ailleurs, allez-vous visiter le sud de la Turquie ? Comment la question syrienne avance-t-elle ?

PHILIP HAMMOND : Ma visite en Turquie est consacrée à toute une série de questions. L’une de celles-ci concerne la crise des réfugiés. Je me rends toutefois en Turquie en qualité de ministre d’un pays membre de l’Union européenne qui s’intéresse à ce que l’accord conclu avec l’UE et la Turquie sur la limitation du nombre de migrants soit pleinement appliqué et de manière efficace. Je me réjouis de cette discussion aujourd’hui.

Par ailleurs, je discuterai de la situation à Chypre avec mon collègue turc et le président Erdogan. Et par ailleurs, le plus important sera la discussion sur la Syrie, où la Grande-Bretagne et la Turquie sont membres d’un groupe international de soutien de la Syrie. Nous souhaitons une transition du régime Assad qui permettra la fin de la guerre civile et à la communauté internationale d’axer son attention sur la lutte contre l’Etat islamique d’une manière qui, jusqu’à aujourd’hui, n’était pas possible, en raison de la guerre civile syrienne.

Nous pensons que Daesh, l’Etat islamique est une réelle menace pour la communauté internationale et plus vite cette organisation sera dissoute et stoppée, plus vite cessera la guerre en Syrie et plus toute l’attention de la communauté internationale – y compris la Russie -, du régime de la Syrie et de l’opposition syrienne sera axée sur la lutte contre l’Etat islamique, mieux cela sera pour nous tous.

January 14, 2016