W. Hague: C'était un grand plaisir pour moi d'accueillir aujourd'hui ici à Londres mon cher ami et homologue, M. Vénizélos C'est un grand moment pour la Grèce qui est en train de se préparer pour la présidence de l'UE. Le Royaume Uni salue la Présidence hellénique. Nous avons discuté des priorités au cours de cette période, notamment de la croissance économique dans toute l'Europe, de la priorité de la politique maritime qui, bien évidemment, sera promue par la Grèce et l'Italie.
Nous avons abordé les questions de l'immigration ainsi que celles de la zone euro. Nous avons donc eu une discussion constructive sur des questions européennes. Bien évidemment, l'occasion nous a été offerte d'honorer le bon niveau des relations bilatérales entre le Royaume-Uni et la Grèce. Nous avons une bonne relation dans le domaine de l'économie, nos échanges commerciaux s'élevant à trois milliards de dollars, y compris, bien entendu, le tourisme.
Nous avons abordé des questions internationales ainsi que l'accord signé avec l'Iran le week-end dernier. J'ai briefé mon homologue sur cette question ainsi que sur les pas qui s’en suivront. Cet accord a pu être conclu grâce, entre autres, à l'unité dont l'Europe a fait preuve pour ce qui est de l'imposition des sanctions. Cela requiert des sacrifices de la part d'un grand nombre de pays, y compris de la Grèce, mais ces sacrifices apportent maintenant des fruits car elles ont considérablement aidé à l'atteinte de cet accord avec l'Iran sur son arsenal nucléaire.
Nous avons également parlé de la situation en Syrie et de notre soutien commun à la Conférence de Genève pour la paix qui est prévue pour le 22 janvier. Je pense que nous avons eu une discussion constructive et nous voulons au cours de la Présidence hellénique, aider toute l'UE. Et je voudrais souhaiter à mes collèges grecs tout le succès dans l'accomplissement de leur mission durant les six mois à venir.
E. Vénizélos : William, je voudrais te remercier pour cette invitation ainsi que pour l'occasion que tu m’as offerte d'avoir cette discussion bilatérale avec toi sur, tout d'abord, les priorités de l'imminente Présidence hellénique, puisque tu sais très bien que la liste de nos priorités est bien claire.
La première priorité, non seulement pour la Grèce mais pour tout pays européen et pour toute société, est la croissance, la création d'emplois, la protection de la dimension sociale, les nouvelles règles de la gouvernance économique, l'union bancaire, la surveillance des frontières, la question de l'immigration illégale. Notre priorité horizontale est - une priorité également très importante, non seulement pour la Grèce pour des raisons historiques et géographiques, mais aussi pour l'Europe dans son ensemble - la politique maritime globale.
Pour ce qui est des questions internationales, nous partageons les mêmes inquiétudes et nous avons les mêmes priorités pour la Syrie et l'Iran. Il est absolument important de promouvoir une solution politique à travers le processus de la Conférence de Genève. Pour ce qui est de la crise humanitaire en Syrie, la solution politique est la seule solution. Le nouvel accord sur le programme nucléaire iranien est très important et utile pour la crise en Syrie aussi.
La question chypriote a été au cœur de notre discussion. Nous voulons une solution durable, juste et acceptable, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, une solution acceptable par les deux communautés par la voie d'un référendum. Cela revêt une importance vitale en vue de marquer une nouvelle époque pour Chypre. Nous soutenons les initiatives du Président Anastassiadis et nous sommes toujours prêts à soutenir tout effort international consenti dans ce sens.
Enfin, un dernier élément mais pas de moindre importance, est notre volonté commune de coopérer, non seulement au cours de la Présidence hellénique, afin que la nouvelle vision européenne devienne réalité. Il est absolument important de présenter et d'offrir à nos citoyens européens une nouvelle vision, un nouveau projet pour l'intégration européenne. Cela revêt une importance vitale, notamment pour les pays en crise, après une période de quatre ans marquée par des politiques d'austérité.
Car aujourd'hui, la Grèce constitue un membre crédible de l'UE, prêt à faire preuve d'importants accomplissements, d'accomplissements budgétaires, structurels, comme l'excédent primaire. L'excédent primaire grec est le meilleur de l'UE et de la zone euro, et les accomplissements budgétaires sont très importants pour notre objectif qui est le retour de la croissance. Cela revêt une importance vitale pour nous.
Je te remercie encore une fois William pour ta volonté de coopérer avec la Présidence hellénique ainsi qu'avec nous, au niveau bilatéral, et maintenant j'attends ta visite à Athènes.
W. Hague: Je te remercie. Avez-vous des questions?
JOURNALISTE : Une question sur Chypre, puisque vous l'avez signalé. Tout d'abord, êtes-vous préoccupé par l'état d'avancement qui s'annonce lent au niveau des négociations entre les deux dirigeants à Chypre? Dans quelle mesure pensez-vous que l'UE pourrait jouer un rôle?
W. Hague: Je ne pense pas qu'une discussion quelle qu'elle soit sur les progrès lents ou rapides pourrait aider. Nous espérons qu'une solution sera atteinte et le Royaume Uni encourage ce processus. Nous avons discuté de cette question aujourd'hui. Tout comme nous l'avons fait avec le Premier ministre turc à Istanbul, la semaine dernière. Nous encourageons bien entendu l'avancement des négociations et l'atteinte d'un accord, mais cela n'est pas au Royaume-Uni de le décider. Ce sera un pas énorme en avant, pour ce qui est des relations européennes et internationales, si une solution est atteinte, mais cela dépend du peuple de Chypre et des dirigeants concernés. C'est pourquoi nous leur souhaitons tout le succès dans les efforts visant à parvenir à une solution.
E. Vénizélos : Pour ce qui est de Chypre, permettez-moi d'ajouter quelque chose. A Chypre, nous avons besoin d'une solution durable, conforme aux résolutions des Nations Unies. Mais conforme aussi audit acquis communautaire. Chypre est un membre de l'Union européenne. Il est absolument important de protéger le caractère européen de la République de Chypre.
JOURNALISTE : Une question sur l'immigration. Est-ce que vous envisagez des problèmes similaires?
W. Hague: Oui cela est vrai. En fait, les sociétés sont confrontées à des questions liées à l’immigration. Nous avons parlé des défis que les pays méditerranéens doivent relever et notamment de la nécessité de lutter contre ce problème là où il se pose, à savoir dans les pays d'origine et de transit.
Il est très important de coopérer avec les pays de l'Afrique du nord et d'améliorer la sécurité, par exemple en Libye, ainsi que la sécurité des frontières. Nous coopérons étroitement avec le gouvernement de la Libye et son Premier ministre qui était ici dimanche dernier, et nous espérons que cela aidera dans ce sens. Et j'ai décliné les propositions soumises hier par le Premier ministre, afin d'assurer la viabilité future de la libre circulation des travailleurs et les gens ne doivent pas se déplacer pour avoir des bénéfices sociaux mais pour trouver du travail et cela est clairement décliné dans notre proposition. Par conséquent nous avons eu une discussion utile sur cette question. Avez-vous d'autres questions?
Journaliste : En référence à l’Iran et aux initiatives précises dont vous avez discuté avec M. Vénizélos, pourriez-vous nous donner quelques détails au sujet des pas en avant que nous avons vus aujourd’hui, avec également les inspecteurs de l’ONU qui ont été invités à participer. De tout cela, qu’est ce qui se réalisera à l’avenir ?
W. Hague : Au cours de la prochaine période, l’ancienne commission conjointe entre les pays du groupe E3 + 3 et l’Iran, surveillera l’application de l’accord que nous passé ce week-end. Et cet accord prévoit un plus grand accès, un accès plus régulier à d’autres questions des inspecteurs de l’AIEA et ces dispositions devront être appliquées rapidement dans un délai de six mois à compter du début de l’accord, qui, espérons-nous, sera avant la fin du mois de janvier.
Et à partir de ce moment-là, l’Union européenne sera invitée à suspendre certaines sanctions, qui se trouvent dans cet accord. Les Etats-Unis devront en faire de même et nous espérons que les Iraniens seront prêts à appliquer leur partie de l’accord. Tout cela doit être fait dans le courant des prochaines semaines et il est très important de garder le rythme derrière cet accord. Je dois vous laisser. Je vous remercie beaucoup.
Déclarations du vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères E. Vénizélos aux correspondants grecs
E. Vénizélos : La rencontre et le déjeuner de travail que nous avons eus avec mon collègue britannique, William Hague, a été une occasion exceptionnelle de présenter les priorités de la présidence hellénique du Conseil de l’Union européenne. Les priorités sont connues et le gouvernement britannique a déclaré sa bonne volonté de coopérer avec nous et d’offrir toute aide nécessaire. Bien entendu, lorsque nous parlons de croissance, de création d’emplois, de la protection de la dimension sociale de l’UE, nous exprimons notamment la conception du continent, mais la conception britannique est nécessairement très proche car c’est une priorité pour toute société européenne. L’approfondissement de la gouvernance économique dans la zone euro et en Union européenne revêt également une importance considérable pour l’union bancaire, mais lorsque nous parlons d’union bancaire, nous parlons également de la protection des dépôts, du mécanisme paneuropéen de protection des dépôts, pour ne pas avoir des inégalités dramatiques entre les Etats membres dans le secteur bancaire. La troisième priorité est l’immigration, l’immigration légale et la lutte contre l’immigration clandestine, la protection des frontières européennes, toujours dans le respect des conventions internationales et des droits de l’homme. Et notre priorité horizontale est la politique maritime, la politique maritime globale, de la croissance, la pêche, l’environnement jusqu’aux zones maritimes. Tout cela, je crois, nous a permis d’avoir un bon contact avec M. Hague.
Nous avons par ailleurs discuté du dossier chypriote. Le Royaume-Uni est une puissance garante, le dossier chypriote est un problème international qui doit être résolu de manière équitable, durable, conformément aux décisions du Conseil de sécurité de l’ONU et à l’acquis communautaire. Car la République chypriote est un Etat membre de l’Union européenne et parce que la solution doit être acceptée par le biais d’un référendum par les deux communautés de l’île. Sans référendum et sans approbation du peuple, rien ne peut se faire. Nous soutenons toutes les initiatives du Président Anastassiadis, mais le point de départ et d’arrivée des initiatives est l’acceptation du peuple chypriote au moyen du référendum.
S’agissant des grands dossiers internationaux, de la crise syrienne, de l’Ian, nous sommes d’accord en règle générale avec le gouvernement britannique. Le dernier accord à Genève sur l’Ian est très important et facilite le processus de Genève pour la Syrie. Nous avons par ailleurs abordé la question de l’Egypte, la situation en Libye et la situation en Méditerranée.
Bien entendu, une autre question qui nous a préoccupés a été l’évolution du programme d’adaptation de l’économie grecque, les accomplissements, budgétaires et structurels, car grâce aux sacrifices du peuple grec, la Grèce peut maintenant exercer la présidence de manière crédible. Mais l’essentiel est que l’on puisse, en tant qu’Europe, en tant que Grèce, proposer à notre peuple, aux peuples d’Europe, un nouveau récit sur l’avenir de l’Europe, qui ne peut être synonyme d’austérité, de crise, mais de stabilité, de démocratie, d’Etat de droit, d’Etat social et de prospérité.
Journaliste : S’agissant de l’Iran, quand est-il prévu que l’UE lève les sanctions ?
E. Vénizélos : Après le premier pas qui a été fait, il y aura une levée progressive et un relâchement des sanctions. Nous participons au courant central de la communauté internationale ; nous acceptons et appliquons toutes les décisions de l’UE, mais les conséquences des sanctions nous concernent également et pas seulement l’Iran, elles concernent également les pays européens. Il est donc très important que tout cela avance de manière crédible, afin que les autres pays de la région puissent se sentir en sécurité et que nous fassions des pas vers la résolution d’une grande question internationale qui tourmente la communauté internationale depuis des années.
Journaliste : Est-ce que l’éventualité d’investissements britanniques directs en Grèce a été abordée, compte tenu du fait que l’économie grecque s’améliore ?
E. Vénizélos : Il y a d’ores et déjà d’importants investissements britanniques en Grèce. Le domaine le plus caractéristique est l’énergie. Dans le domaine très crucial de la prospection d’hydrocarbures et de l’exploitation future des hydrocarbures, nous avons une présence britannique très marquée en Grèce. Par ailleurs, nous avons une coopération très étroite, par le biais du TAP, car la société BP, d’intérêts britanniques, est l’un des principaux partenaires du TAP. Donc, la présence britannique est très importante de ce point de vue. Et compte tenu du fait que dans le secteur financier la Grande-Bretagne joue toujours un rôle déterminant, il est important que le gouvernement britannique sache, de première main, quelle est la situation de l’économie grecque et quelles sont les décisions stratégiques de notre gouvernement. Car en Grèce, il y a un gouvernement qui lutte pour faire sortir le pays de la crise, un gouvernement stable certes, mais qui a besoin du soutien de la part de ses partenaires.
Journaliste : Avez-vous parlé à M. Hague de ce que l’on a entendu hier de la bouche de M. Cameron au sujet des allocations pour les immigrés européens et notamment la libre circulation ?
E. Vénizélos : Nous avons eu l’occasion d’engager une discussion détaillée sur la base suivante. Les libertés communautaires fondamentales, dont la liberté de la circulation, sont une chose, la protection des frontières européennes contre les immigrés clandestins, des immigrés sans papiers venant de pays tiers, en est une autre. On ne doit pas confondre les ressortissants européens et les ressortissants de pays tiers qui essaient d’entrer illégalement en UE. Il faut donc faire cette distinction et je pense que tout ce que je dis est très clair et très simple.
Je vous remercie beaucoup.
November 28, 2013