Conférence de presse de E. Vénizélos, vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, à l'issue du Conseil Affaires étrangères (Bruxelles, 10 février 2014)

Conférence de presse de  E. Vénizélos,  vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères,  à l'issue du Conseil Affaires étrangères (Bruxelles, 10 février 2014)

"Aujourd'hui, lors du Conseil Affaires étrangères nous avons d'abord discuté de la réunion au sommet UE-Russie et des développements actuels en Bosnie-Herzégovine. Par la suite, lors du déjeuner de travail de courte durée, nous avons longuement débattu de la situation en Ukraine et en général des questions ayant trait au Partenariat oriental. Tout cela a donné finalement lieu à l'élaboration du texte des conclusions dans lequel est précisée la position du Conseil au sujet de l'Ukraine.

Dans mon intervention sur l'Ukraine, j'ai signalé cinq points principaux:

A savoir que, dès lors notre position est une position de principe, nos messages doivent être clairs en ce qui concerne non seulement la démocratie et les droits de l'homme, mais aussi l'unité et l'intégrité territoriale de l'Ukraine.

Deuxièmement, puisque notre position émane de la solidarité et de notre respect à l'égard du peuple ukrainien, nous ne pouvons pas discuter de sanctions ou brandir la menace d'éventuelles sanctions. Nous devons renforcer la crédibilité et l'efficacité diplomatique de l'UE afin de surmonter la crise et apporter un soutien réel aux citoyens et à la société.

Troisièmement, nous devons, en tout état de cause, élaborer et offrir un programme d'aide financière à l'Ukraine. Nous ne pouvons pas affirmer que notre aide est limitée et que la solution est le recours au Fonds monétaire international car un tel recours est accompagné de mesures, d'une certaine conditionnalité et des conséquences pour la société ukrainienne. La question qui se pose est la suivante: "puisque nous traversons une période de crise, qui prendra cette décision et qui est habilité à prendre cette décision sur une telle relation?

Le quatrième point porte sur la perspective européenne de l'Ukraine et nombreux sont ceux qui le signalent. Nous le faisons également, mais la perspective européenne est une approche géostratégique. Il s'agit de toute d'une stratégie.  L'Ukraine, tout comme les autres pays du Partenariat oriental, appartiennent au continent européen. Autrefois, nous aurions en effet voulu voir tous ces pays adhérer à la grande communauté. Mais cela n'a pas rapport à la conjoncture, nous ne pouvons pas transformer cette stratégie du Partenariat oriental en un instrument au service de la conjoncture.

Cinquième et dernier point, nous ne devons en aucune manière laisser l'Ukraine devenir le terrain d'une nouvelle "guerre froide" entre l'Orient et l'Occident. Cela irait à l'encontre de la vérité historique et serait dénué de toute perspective stratégique.

Je pense que plus ou moins les points présentés ci-dessus reflètent le courant dominant des opinions qui ont été exprimées. Toutefois,  cela ne relève pas de ma compétence mais de celle de Mme Ashton mais mon impression, sur la base du débat qui a été engagé, est qu'il s'agit d'une approche équilibrée et intégrée à l'égard de la question de l'Ukraine.

Par la suite, nous avons tenu une discussion de fond sur les questions relevant du Voisinage du sud. A savoir, sur des questions liées à l'Egypte, à la Syrie, à l'Irak, à la Libye, à la Tunisie et au Yémen. Puisque ces questions sont en état d'avancement, les conclusions formulées s'intègrent, plus ou moins, dans le cadre d'ores et déjà élaboré par l'UE. Vous connaissez les points majeurs. Il s'agit de tout ce que l'on a affirmé à ce jour au sujet de l'Egypte. Ce que l'on a déclaré à Montreux concernant la Syrie.
Nous saluons tout particulièrement les évolutions en Tunisie. Nous exprimons notre préoccupation à l'égard de la situation en Irak et la menace pesant sur la stabilité du pays.

Actuellement, le débat sur la République centrafricaine est en train de s'achever. Dans ce cadre, il y a l'opération de la PESC dont le quartier-général est à Larissa, conformément à l'accord conclu avec le gouvernement français.

Tel est l'aperçu des dossiers débattus à ce jour lors de la session du Conseil Affaires étrangères.

A 19h00, se tiendra un dîner des 28 ministres et ministres des pays candidats à l'adhésion. Parmi les participants, sera également M. Davutoglu et j'aurai donc l'occasion, en marge du dîner, de m'entretenir avec lui, en vue des dernières évolutions relatives au dossier chypriote concernant lequel vous pouvez me poser vos questions.

Le matin, avant l'ouverture du Conseil, nous avons eu trois rencontres bilatérales importantes:

Avec la précédente présidence lituanienne avec laquelle nous avons eu des contacts très étroits concernant l'éventualité de donner suite aux dossiers mis en route par cette dernière.

Avec les Pays-Bas qui manifestent un intérêt marqué à l'égard du principe de la subsidiarité, question que nous allons traiter. Dans le cadre de la Présidence, j'ai eu une discussion très intéressante avec mon homologue, M. Timmermans.

En outre, comme vous l'avez lu dans le communiqué écrit qui a été émis, suite à ma propre demande, je me suis entretenu avec le ministre des Affaires étrangères du Kosovo en vue de préparer ma visite dans la région qui aura lieu la semaine prochaine dans les cinq capitales de la région. J'ai visiterai dans un premier temps les cinq capitales et nous verrons quelle est la situation à Sarajevo afin de décider de la remise à plus tard ou non de ma visite là-bas à cause de la crise. Il serait préférable de visiter les capitales où l'environnement politique est favorable à l'engagement d'une discussion substantielle de la part de la présidence du Conseil. 

Demain, se tiendra le Conseil  Affaires générales lors duquel il y a un grand nombre de dossiers à débattre:

Parmi ces dossiers, figure toutefois l'impact du référendum suisse. En vue de ce débat, j'ai demandé au chef du service juridique du Conseil d'élaborer un rapport sur le cadre juridique - tel que celui est façonné vu l'issue du référendum - qui est de caractère constitutionnel, mais relève du droit intérieur suisse. Nous devons maintenant voir au niveau du droit international et du droit communautaire la façon dont cette question se pose mais, bien entendu, l'accent est toujours mis sur la question politique qui se pose sans aucun doute, question qui a fait l'objet d'un communiqué que nous avons émis hier".

JOURNALISTE : Monsieur le Président, un commentaire plus général sur les évolutions à Chypre à l'occasion de la rencontre qui se tiendra demain entre M.  Anastassiadis et  M. Eroglu.

E. Vénizélos : Ça fait des mois que le Président, M. Anastassiadis, a présenté une proposition intégrée sur le dossier chypriote. L'idée centrale de cette proposition est l'application des mesures de confiance substantielles qui changeront le climat non pas en théorie, mais dans la pratique.  Les mesures de confiance portent en effet sur l'application du Protocole additionnel d'Ankara, la restitution de la ville enclavée de Famagouste, l'ouverture du port de Famagouste, l'accès des navires et des avions chypriotes aux ports et aux aéroports turcs. Il s'agit d'une proposition très importante et substantielle.

En outre, force est de rappeler que ces dernières années les discussions sur la question chypriote ont marqué un tournant substantiel. La communauté internationale, l'ONU, acceptent le recours à un référendum comme étant le seul moyen pour prendre une décision définitive sur l'avenir de Chypre et la coexistence des deux communautés, dans le cadre d'une solution fédérale, bizonale et bicommunautaire qui sera viable, juste et fonctionnelle et axée sur les résolutions du Conseil de sécurité, l'acquis européen et avec une personnalité juridique unique, une citoyenneté unique et une souveraineté unique. 

Le Communiqué conjoint qui a été convenu doit être toujours interprété sous cet angle. Et, bien évidement, nous devons toujours prendre en considération l'expérience historique concernant la question chypriote. L'expérience historique plus lointaine, celle de 1960 et la plus récente, celle de la période 2003-2004.

L'important est d'avoir un terrain favorable à l'unité et au consensus nationaux, véritables et permanents, au niveau le plus élargi. Car, faute de ce consensus, de ce ralliement, de cette acceptation universelle, la condition fondamentale à cela, à savoir l'approbation par le biais d'un référendum, ne sera pas remplie. Par conséquent, l'issue quelle qu'elle soit de la question chypriote, relève de la décision finale du peuple chypriote. Et, en ce qui concerne la partie chypriote grecque, cela relève des citoyens chypriotes grecs et de la communauté chypriote grecque.

Je suis convaincu que le Président, M. Anastassiadis, le gouvernement chypriote, la communauté chypriote grecque valoriseront au mieux ce processus, cette possibilité, et ce toujours dans le contexte et conformément aux critères énoncés tout à l'heure.

February 11, 2014