Conférence de presse du ministre des Affaires étrangères, N. Kotzias, à l’issue des travaux de la 2ème réunion des ministres des Affaires étrangères du Groupe Višegrad et des Etats membres balkaniques de l’UE (Sounion, 11.05.2018)

Conférence de presse du ministre des Affaires étrangères, N. Kotzias, à l’issue des travaux de la deuxième réunion des ministres des Affaires étrangères du Groupe de Višegrad (Višegrad 4) et des Etats membres balkaniques de l’UE (Balkan-4) (Sounion, 11 maMODERATEUR : Bonjour. Bienvenue à la conférence de presse qui se tient à l’issue des travaux de la réunion ministérielle d’aujourd’hui entre le groupe de Višegrad et les pays européens de la région des Balkans et Etats membres candidats des Balkans occidentaux. Nous commencerons par l’intervention du ministre des Affaires étrangères, M. Kotzias, puis l’on continuera avec celle du ministre des Affaires étrangères de la Hongrie et président en exercice du groupe de Višegrad, M. Szijjarto. Par la suite, il y aura une brève séance des questions-réponses. Je vous remercie. Monsieur le ministre, vous avez la parole.

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Merci beaucoup. Je pense que depuis hier que nous avons entamé nos débats, nous avons eu une discussion très constructive, un échange de vues et d’idées et avons étudié les questions liées à l’avenir de l’Union européenne, à l’élargissement de l’Union européenne ainsi que des questions énergétiques. Il y avait eu 15 Etats, dont 10 Etats membres de l’Union européens avec leurs ministres. Deux étaient absents tandis que 5 Etats des Balkans occidentaux qui sont soit des Etats candidats à l’adhésion à l’Union européenne, soit ils envisagent de le devenir, y ont été représentés. Nous avons aussi organisé une table ronde avec la participation de quatre professeurs de l’étranger et de la Grèce, que je voudrais remercier. Nous avons tenu une séance de brainstorming en vue d’examiner les dossiers en question, sous des angles différents, au-delà des politiques et des ministres. Et la discussion était très constructive. Comme toujours et comme à la rencontre précédente à Budapest, nous avons parlé ouvertement et en toute sincérité, ce qui n’est pas toujours le cas lors des discussions formelles sur l’avenir de l’Europe. Nous avons parlé de la manière dont l’Union européenne pourrait développer son fonctionnement, des questions liées à son système institutionnel à l’avenir, ainsi que des thématiques que nous voulons voir se développer au sein de l’Union européenne.

Pour ce qui est des points spécifiques que j’ai signalés au nom du gouvernement grec, vous pouvez recourir à mon discours en grec et en anglais qui est disponible sur le site du ministère des Affaires étrangères. Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de revenir là-dessus.

Nous avons également étudié les problèmes liés aux relations entre l’Union européenne et l’Etat national et je pense que nous sommes tous convenus de la nécessité de mettre l’homme au cœur de nos politiques, et non pas certaines constructions métaphysiques, et de ne pas avoir peur d’entreprendre des initiatives courageuses.

Nous avons également évoqué des questions ayant trait au rôle de l’Union européenne à l’avenir, au niveau mondial. Nous avons parlé de la relation entre l’approfondissement du processus européen et le processus de l’élargissement et avons souligné qu’il était nécessaire que l’Union européenne ainsi que nous-mêmes, en tant que citoyens, nous nous rappelions aussi de l’importance des principes de la solidarité.

Nous avons également abordé la question de la connectivité sur laquelle nous avons décidé, comme vous le savez, la semaine dernière à Thessalonique, d’organiser une conférence internationale spécialisée. Car conjointement avec la question de l’élargissement, nous avons aussi discuté de nos relations avec les 6 Etats du voisinage oriental, ainsi que des relations que doit avoir à l’avenir l’Union européenne avec son voisinage en général.

Nous avons discuté de la nécessité d’intégrer les Etats candidats, les Etats avec lesquels il existe un accord d’association avec l’Union européenne, dans notre débat général et nos politiques et l’un des objectifs fixés aujourd’hui était, dès lors que nous parlons de l’avenir de l’Union européenne, d’encourager la participation aussi des Etats qui espèrent, et nous l’espérons également, devenir des membres de la future Union européenne, dont nous sommes en train de parler. En outre, nous avons soutenu la nécessité d’accélérer le processus d’adhésion pour les pays qui ont commencé leur parcours – le Monténégro et la Serbie - en vue d’accélérer l’ouverture des chapitres et toute la procédure afin d’éviter la bureaucratie.

Nous avons examiné des questions liées au parcours futur de l’Union européenne dans notre voisinage et en Méditerranée orientale. Force est de vous rappeler que les 21 et 22 juin nous avons la troisième conférence de Rhodes qui se penchera sur l’organisation d’un système institutionnel de sécurité et de stabilité en Europe, à l’exemple de celui qui a été mis en place dans les années ‘70 pour l’Europe par le Traité d’Helsinki. On examinera donc la mise en place des structures similaires pour la Méditerranée orientale. Comme vous vous le rappelez, nous avons entamé la réunion de Rhodes avec 11 Etats membres. Aujourd’hui, avec les ligues arabes, nous sommes passés à 24 Etats membres et nous sommes fiers de ces initiatives que prend notre pays, ce qui lui confère un rôle particulier et lui donne l’opportunité de développer des relations amicales avec des pays et des Etats dont le parcours historique est différent, les perceptions politiques sont différentes, mais avec lesquels nous avons des points de vue convergents à l’égard de la thématique en question.

Je me réjouis du fait que cette conférence d’aujourd’hui a été organisée de concert avec Petros, Peter, le ministre des Affaires étrangères de la Hongrie. Nous poursuivrons cette coopération entre l’Union européenne du Nord-est et du Sud-est, car il est nécessaire de discuter, d’élaborer nos positions et de ne pas abandonner le sort de l’avenir de l’Europe à la réflexion ou aux initiatives de l’un ou de l’autre pays ou de la Commission européenne. Notre réflexion, notre sagesse ainsi que notre volonté commune sont également nécessaires.
[...]

MODERATEUR : Il y aura un nombre limité de questions. Vous êtes priés de citer votre nom et le média que vous représentez.

JOURNALISTE : Monsieur le ministre, après cette deuxième réunion lors de laquelle il y a eu un dialogue constructif, d’après ce que nous avons compris, quels sont les pas, à votre avis, qu’il faut entreprendre, quelle voie s’ouvre-t-elle pour les prochains pas à entreprendre et quand est-ce que vous envisagez d’organiser ou êtes-vous convenus d’organiser votre prochaine réunion ? Je vous remercie.

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Tout d’abord, je voudrais vous dire que je suis fermement convaincu, tout comme le ministre, Peter, que nous devons discuter tant de nos accords que de nos désaccords, car tous les deux sont nécessaires pour développer une Europe démocratique. Nous pensons organiser notre prochaine réunion vers le mois d’octobre, ou de novembre, dans un pays du groupe de Višegrad dans le nord afin d’organiser la prochaine réunion l’année prochaine au sud, car je dois vous dire que cette conférence a été une vraie publicité pour Sounion et une occasion pour tous, pour les médias de leurs pays, de connaitre cette région.

Pour ce qui est de la thématique, j’ai formulé une série de propositions, tout comme les pays du groupe de Višegrad, et nous sommes convenus que dans la période à venir nous soumettrons des propositions écrites à cet égard. Je pense que la question de l’immigration, comme vous avez pu le comprendre par le discours de mon collègue, sera l’une des questions qui figurera dans notre agenda.

La question de la connectivité et de la solidarité feront l’objet de nos discussions, ainsi que la nécessité d’entamer un dialogue démocratique au sein de l’Union européenne sur le parcours de cette dernière à l’avenir en général, afin que nous ne soyons pas obligés de régler les questions auxquelles nous sommes confrontés de manière fragmentaire, sans critères et sous la pression des évènements.

JOURNALISTE : Monsieur le ministre, puisque la discussion a également porté sur l’élargissement, est-ce que la Grèce accepterait que votre pays voisin, la « Belle Macédoine », comme vous l’avez appelée, commence les négociations d’adhésion, sans un règlement préalable de la question du nom ? C’est-à-dire en juin. Merci.

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Nous avons discuté de la valeur, de l’importance et des résultats positifs de chaque élargissement. Et c’est pourquoi nous avons également discuté de nos relations avec ce que l’on appelle le Voisinage oriental, des relations qui concernent six pays, dont trois sont situés en Europe. Pour ce qui est du terme « belle », nous l’utilisons provisoirement dans la négociation jusqu’à qu’un accord sur le terme qui sera utilisé soit atteint. Il ne s’agit pas d’une détermination géographique.

Je pense que dès lors que nous nous mettrons d’accord et que l’accord sera légalement ratifié, la voie qui mènera à la négociation avec l’Union européenne sera ouverte.

Demain, comme vous le savez, à 10h30, se tiendra le prochain tour des négociations. M. Nimetz viendra aussi. Le dernier tour des négociations a eu lieu à Thessalonique sans sa présence. Je pense que dès lors que nous le voudrons vraiment, les deux parties en finiront avec ce problème qui n’aurait pas dû rester en suspens. Et comme je dis avec mon collègue, Nikola Dimitrov, en tant que ministres nous sommes invités à régler un problème pour lequel nous ne sommes responsables et je voudrais signaler cela. Un problème qui a pris des racines, il est demeuré en suspens et s’est détérioré pendant la période de Gruevski. Nous étions confrontés à des anciens problèmes, sans que lui, ni moi et nos gouvernements actuels en soient responsables. Toutefois, nous avons une responsabilité vis-à-vis de la région ce qui nous impose de trouver une solution à ce problème. Je crois fermement que le règlement de ces problèmes, tout comme la ratification des accords conclus avec l’Albanie – et comme vous l’avez vu nous avons aujourd’hui aussi signé des accords – influera sur la vie quotidienne des gens, améliorera la vie de nos citoyens, renforcera la sécurité et la stabilité de nos pays et de la région.

Deuxièmement, je pense – je ne cesse de le dire à chaque occasion, vous l’aurez appris vous aussi par cœur – que l’histoire ne doit pas être une prison, mais une école. Et, à l’égard d’un bon nombre de questions, l’histoire est devenue une prison pour nous. Ce sont des questions que les autres pays, bien que se trouvant dans des camps adverses, avaient réglées pendant la période de la guerre froide. Toutefois, dans notre cas, ces problèmes ont surgi après la guerre froide. Car, ce problème avec le pays ami n’existait pas sous la forme actuelle à l’époque de la Fédération yougoslave. Par conséquent, il faut signaler, car certains se demandent pourquoi nous nous occupons de ce genre de problèmes, que ce problème est survenu après.

Je voudrais aussi vous dire que notre gouvernement pense que, maintenant que le pays est en train de sortir de la crise, nous ne devons pas être seuls au cours de ce processus, nous avons besoin des synergies avec nos pays voisins et notamment avec les pays balkaniques afin que tous les pays profitent de la croissance. Et la croissance de chaque pays de la région contribuera sans aucun doute à la croissance ultérieure de la Grèce, comme la croissance de cette dernière facilitera les autres pays. Nous pensons que cette région a besoin d’une croissance globale car l’autre région, vers la Méditerranée orientale, le Moyen-Orient, à l’est de notre pays, et la région de l’Afrique du nord, est confrontée à de nombreuses difficultés, à cause des crises, des conflits et des tensions.

JOURNALISTE : Monsieur le ministre, comme vous l’avez tout à l’heure affirmé, à l’égard des questions quotidiennes aussi, l’Albanie et la Grèce s’entendent très bien. Il existe toutefois, parmi les dossiers dont vous discutez, des questions historiques et plus difficiles que la délimitation des zones maritimes. Première question : est-ce que des progrès ont été réalisés concernant ces questions ? Deuxième question: cela ne relève pas, bien évidemment, de votre compétence, mais est-ce que vous savez quand le Premier ministre effectuera enfin une visite en Albanie? Avant ou après les élections ?

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Quelles élections ?

JOURNALISTE : Je parle des élections dans notre pays.

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Ce sera sûrement avant, car les élections se tiendront dans un an et demi. La visite du Premier ministre en Albanie aurait dû avoir lieu bien avant s’il n’y avait pas eu ce problème institutionnel entre le gouvernement et le Président en Albanie qui a retardé tout le processus de conclusion des accords. Je pense que pour ce qui est des questions liées aux zones économiques, nous avons effectué les premières réunions. Je pense que ces rencontres ont été constructives et que, lors de nos prochaines réunions prévues, nous parviendrons à un accord juste, sur la base du droit international. Je suis optimiste à cet égard. Je voudrais aussi signaler que cet accord sera accompagné d’un décret présidentiel sur la suppression de l’état de guerre qui est une schizophrénie historique, ainsi que de certains accords sur les frontières terrestres relatifs à la délimitation de la signalisation de la frontière.

Je pense que les hommes politiques doivent être présents pour régler les problèmes et libérer le pays des fardeaux du passé. Comme vous le savez, je ne suis pas un homme politique de carrière, je me suis pour la première fois dans ma vie porté candidat en 2015. J’ai un bon travail, je pense que le travail de professeur est le plus beau métier - le plus mal payé dans le monde, mais c'est quand même le plus beau métier du monde. Je suis un être politique et j’espère que tout au long de mon mandat, je parviendrai à résoudre, grâce à la politique d’Alexis Tsipras, les problèmes qui demeuraient en suspens car les partis de l’opposition qui étaient au pouvoir depuis 40 ans n’ont pas osé les régler.

J’espère qu’ils feront preuve de rationalisme et qu’ils soutiendront ces solutions. Nous avons eu hier une discussion au sein du parlement concernant l’accord sur l’octroi d’une aide à l’Albanie pour ce qui est des questions européennes. Les partis de l’opposition l’ont soutenu tandis que l’opposition a éprouvé des difficultés. Je dois avouer que je ne l’ai pas compris. Nous devrions, à leur avis, fixer des conditions (conditionality). Mais lorsqu’on conclut un accord sur l’octroi d’une aide, faut-il que nous imposions à l’autre partie des conditions sur la façon dont cette aide lui sera fournie ? Cette mentalité n’est pas de notre époque.

Je pense que nous réglerons ces questions, nous avons réglé de petits et de grands problèmes, y compris celui des conducteurs. Et je pense que nous sommes déterminés à développer notre coopération. Je voudrais aussi exprimer ma profonde conviction qu’au sein d’une Union européenne de 35 à 40 Etats membres, les Etats de petite taille ou même de taille moyenne, ne pourrons pas jouer un rôle s’ils n’ont pas coopéré et n’ont pas une perception commune, comme les pays du groupe de Višegrad ou le Benelux.

Les grands pays n’en pas besoin. Cela ne pourra être possible que si tous ces pays adhèrent à l’Union européenne. A l’heure actuelle où il y a des difficultés, où des négociations sont menées, ce projet est en train de prendre forme afin qu’il y ait, au sein de l’Union européenne un parcours commun.

Et je voudrais vous dire que la coopération avec les pays du groupe de Višegrad est une coopération – à l’exception de la Pologne, pays puissant parmi les pays de la même taille que celle-ci – entre des Etats de petite et de moyenne taille qui doivent défendre leurs droits lors des prochains changements institutionnels.

Puisque j’ai participé à un très grand nombre de négociations, je sais que les négociations commencent par l’élargissement et, avant que le processus prenne fin, des changements institutionnels sont opérés au nom de l’élargissement, des changements qui ne sont pas toujours faciles et agréables. Par conséquent, la discussion sur l’avenir de l’Europe revêt aussi cet aspect.

JOURNALISTE : Je reviens un peu sur la question de Skopje et sur la rencontre que vous aurez demain. Si l’on a bien compris, vos discussions avec M. Dimitrov portent-elles aussi sur la signature d’un accord international qui aura un calendrier bien précis et prévoira les pas que les deux pays devront entreprendre ainsi que leurs obligations, en vue de faire avancer ce processus, une fois que dans une période d’un an, de deux ans, de trois ans, les demandes de l’une et de l’autre partie seront satisfaites ?

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Depuis ce matin j’entends parler d’un calendrier et je me demande d’où cela est venu.

JOURNALISTE : M. Tzanakopoulos en a parlé sur la chaîne de télévision Alpha.

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Oui, est-ce qu’il a parlé d’une période de deux, trois ans ?

JOURNALISTE : Non, il n’a pas parlé de deux, trois ans mais d’un calendrier.

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Moi, je n’ai pas entendu parler de ça, je n’ai pas négocié un tel calendrier, je ne l’ai pas proposé, on ne me l’a pas proposé, je le dis pour que cela soit clair. Notre médiateur est M. Nimetz. Un fois qu’un accord sera conclu sur la question du nom entre les deux parties, M. Nimetz, en vertu des résolutions 817 et 845 de l’ONU, a la responsabilité d’informer l’ONU en la matière afin que cet accord soit ratifié par l’ONU. M. Nimetz a élaboré son propre projet à caractère légal qu’il soumettra, le moment venu, à l’ONU. Et à côté de cela, nous avons soumis une proposition à l’autre partie portant sur le règlement de certaines questions, telles que l’irrédentisme et l’élaboration d’un projet commun sur la coopération future entre les deux Etats. Pour avoir, autrement dit, parallèlement aux rencontres au niveau des deux gouvernements, des rencontres entre les directions et une coopération dans le domaine de la sécurité, de l’économie, de la culture et de l’éducation. Et ce, parce que nous voulons le jour où nous annoncerons – ce jour viendra et je l’espère au plus profond de moi – l’accord sur la question du nom et les questions connexes, que celui-ci s’intègre dans le cadre d’un accord global d’amitié et de coopération. Je ne voudrais pas d’un accord qui règlera certaines questions négatives sans apporter quelque chose de positif pour l’avenir.

Pour ce qui est de ces questions portant sur le progrès, la perspective, etc., nous n’avons aucun problème. Comme vous pouvez le constater, l’avenir s’avère plus facile que le passé. J’espère que nous y parviendrons et que nous prouverons que le passé appartient au passé et que l’avenir appartient à nous deux.

Merci beaucoup.

MODERATEUR : On vous remercie.

May 11, 2018