Déclarations des ministres des Affaires étrangères de la Grèce et de la Roumanie, MM. D. Avramopoulos et T. Corlatean (04.04.2013)

Déclarations des ministres des Affaires étrangères de la Grèce et de la Roumanie, MM. D. Avramopoulos et T. Corlatean (04.04.2013)T. CORLATEAN : Bonjour, avant toute chose, j’aimerais saluer la visite de mon collègue, partenaire et ami de la République hellénique, Dimitris Avramopoulos, qui effectue une visite à Bucarest aujourd’hui. Cette visite inclut une réception donnée par le Premier ministre, Victor Ponta et la présence du ministre dans notre pays confirme l’excellent niveau de nos relations sur le plan politique, économique et culturel.

Nous avons eu des discussions très fertiles aujourd’hui sur des questions bilatérales de nature politique et nous avons clairement fait savoir que nous continuerons le rythme accru des contacts politiques de haut niveau entre nos pays et bien entendu au niveau des ministres des Affaires étrangères.

Nous avons également eu des discussions approfondies sur des questions liées au commerce. Je dois dire que la Grèce est le sixième partenaire commercial et investisseur étranger en Roumanie, et en 2012, les échanges commerciaux s’élevaient à 1 116 milliards d’euros. Nous avons également discuté longuement sur la présence des investisseurs grecs en Roumanie et l’intérêt marqué manifesté par les deux parties. Cinq mille cinq cent vingt entreprises dont le capital est détenu par des Grecs sont enregistrées en Roumanie. Nous avons récemment reçu un message d’ouverture et de volonté de poursuivre la coopération en présence des investisseurs grecs en Roumanie.

Nous avons également parlé de la Présidence grecque de l’Union européenne au premier semestre 2014, et pendant un moment la présidence grecque coïncidera avec la présidence roumaine du Processus de coopération en Europe du Sud-est, au 1er juillet 2013, présidence qui se poursuivra l’année suivante. D’une part, cela signifie que la Roumanie sera capable d’offrir un soutien sans faille à la présidence grecque du Conseil de l’UE. Cela nous permettra également de coopérer et de coordonner notre travail au niveau régional et en Europe du sud-est afin de soutenir le processus européen, le processus euro-atlantique et le processus d’intégration continue dans cette région, à condition, bien entendu, que les critères soient respectés.

Le ministre a également fait part d’une grande ouverture à l’égard d’une dimension orientale du projet européen et nous avons souligné dans ce contexte le soutien au travail européen.

J’aimerais attirer votre attention sur un point, outre les questions liées aux affaires européennes, outre les consultations que nous avons eues et que nous continuerons d’avoir après cette conférence de presse sur des questions internationales, sur les développements au Moyen-Orient, en Afrique du Nord, le processus de paix en Syrie etc.

J’aimerais attirer votre attention sur un point. Au nom du gouvernement roumain, j’ai affirmé combien la Roumanie appréciait le soutien sans faille exprimé par la Grèce à l’adhésion de la Roumanie à l’espace Schengen. Cela a été par ailleurs exprimé lors du Conseil Justice et Affaires intérieures et nous comptons sur l’aide de la Grèce, que celle-ci appuie de manière tout aussi correcte que légitime la décision en faveur de l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l’espace Schengen, probablement sur la base de la solution déjà proposée : une adhésion progressive.

Par ailleurs, je remercie le ministre pour avoir confirme qu’aujourd’hui l’accord relatif a la designation du nouvel ambassadeur de la Roumanie a Athenes, M. Lucian Fatu. Et j’aimerais souhaiter la bienvenue au nouvel ambassadeur de la Grece a Bucarest, M. Grigorios Vassilokonstandakis. Nous constatons un renouvellement simultane de la representation diplomatique des deux pays, un autre element tres positif.

En conclusion, je redirais au ministre que je suis pleinement satisfait de la teneur et de la qualité de nos discussions et que nous continuerons ces entretiens après la conférence. Dimitris, tu as la parole.

D. AVRAMOPOULOS : Merci. Tout d’abord, permettez-moi de vous dire que je me sens, comme je l’ai dit tout à l’heure, chez moi ici à Bucarest. Merci pour l’accueil très chaleureux de mon très bon ami et collègue, le ministre des Affaires étrangères, Titus Corlatean, qui a été l’un de mes meilleurs interlocuteurs au Conseil européen et, je dirais même, l’un des meilleurs représentants de notre pays. Pour moi, c’est un grand plaisir de revenir dans cette belle ville de Bucarest, cher Titus. Et je suis sûr que cette courte visite sera tout aussi utile que substantielle.

Mon ami Titus et moi-même coopérons, comme je l’ai dit tout à l’heure, très étroitement dans le cadre de l’Union européenne et d’autres enceintes internationales. Comme vous le savez, la Grèce et la Roumanie sont de très bons amis. Nos excellentes relations et les liens solides d’admiration et de respect mutuels entre nos peuples sont le fruit d’un parcours historique commun dans la région.

Je n’oublierais jamais l’atmosphère tendue d’anticipation en 1989, Titus, alors que j’étais ici au moment où la révolution avait éclaté. Je n’oublierais pas non plus mes visites régulières à Bucarest en ma qualité de maire d’Athènes. Pendant ces années, la Grèce a été aux côtés de la Roumanie dans son cheminement vers les structures euro-atlantiques. Vous vous souviendrez que la Grèce a joué un rôle très important dans le processus d’adhésion de la Roumanie à l’Union européenne. Et bien entendu, on ne peut imaginer l’Europe sans la Roumanie. Et aujourd’hui, nous sommes fiers d’être votre partenaire à l’OTAN, votre partenaire à l’UE et votre partenaire ici dans notre voisinage sud-européen.

Lors de notre rencontre aujourd’hui, comme l’a affirmé mon ami Titus tout à l’heure, nous avons abordé des questions liées à la coopération bilatérale et parlé des moyens qui nous permettront de promouvoir davantage nos relations déjà excellentes dans les secteurs politiques, économiques et culturels. Nous avons aussi échangé des vues sur des questions régionales et européennes d’intérêt mutuel, notamment la question de l’intégration euro-atlantique des Balkans occidentaux.

Une perspective européenne est un élément catalyseur pour la mise en œuvre des réformes. Et c’est pourquoi la Grèce et la Roumanie ont un intérêt partagé pour une perspective européenne ferme pour tous les pays voisins de l’Europe du sud-est. Cela signifie, bien entendu, que chacun dans la région doit honorer le principe européen des relations de bon voisinage et œuvrer à la résolution des litiges en suspens. Cela signifie aussi que les dirigeants dans la région doivent clairement comprendre, et je suis totalement d’accord avec ce qu’a dit Titus tout à l’heure, que l’extrémisme, le nationalisme, le racisme et la xénophobie ne sont pas permis. Cela est impensable au sein de notre grande famille européenne actuelle.

Nous avons abordé la question de l’admission de la Roumanie (et de la Bulgarie) à l’espace Schengen, une décision que la Grèce appuie fermement depuis longtemps. Dans ce contexte, nous avons également discuté de notre coopération dans le cadre d’initiatives et organisations régionales, le Processus de Coopération d’Europe du Sud-est (SEECP) et la Coopération économique de la Mer Noire (BSEC) – ainsi que de notre coopération étroite dans le cadre de la réunion tripartite avec la Bulgarie, une initiative hautement saluée par la partie grecque.

Nous avons aussi discuté de la crise économique en Europe et de la façon dont l’UE et l’Eurogroupe réagissent à cette crise. La Grèce est déterminée à avancer dans la mise en œuvre de ses réformes structurelles et de son adaptation fiscale. Les mesures que nous prenons, il est vrai, sont douloureuses. Les Grecs font de grands sacrifices. Mais c’est la voie de la solidarité. C’est la voie européenne, la seule voie possible vers la reprise et la croissance pour tous les peuples d’Europe.

Comme l’a dit le ministre tout à l’heure, la Grèce assumera la présidence de l’Union européenne au premier semestre 2014 et j’ai informé Titus des préparatifs que nous effectuons et de nos priorités en tant que présidence. Nous avons également passé en revue notre approche commune concernant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020, car nos deux pays sont membres du Groupe des Amis de la Cohésion.

Nous avons également échangé des vues sur un nombre de questions internationales d’importance particulière : la situation en Syrie, les perspectives du processus de paix au Proche-Orient et les évolutions dans la région élargie du Moyen-Orient. Nos entretiens aujourd’hui ont réaffirmé que nos deux pays, partenaires et alliés à l’UE et à l’OTAN partagent des vues similaires sur des questions internationales, régionales et européennes clés. Ce résultat est une coopération étroite et multiple dans les enceintes dont nous faisons tous deux partie.

Ma visite et notre rencontre aujourd’hui avec mon collègue et ami est une preuve supplémentaire de l’excellent niveau de nos relations. J’aimerais de nouveau le remercier pour sa chaleureuse hospitalité aujourd’hui et me réjouis à l’avance de travailler avec lui car nos pays étendent leur coopération et ce, dans l’intérêt mutuel de nos deux pays amis et de leurs peuples. Titus, merci encore et j’espère te voir bientôt à Athènes.

Extrait des questions et réponses à la presse

Question relative à la vente d’ambassades et à la crise économique en Grèce.

D. AVRAMOPOULOS : Nous ne parlons pas des ambassades, nous parlons des bâtiments. Il y a certains bâtiments dont nous n’avons pas besoin et pendant toutes ces années, leur nombre a augmenté. A l’heure actuelle la valeur de ces biens immobiliers peut nous aider à surmonter la crise.

Il est vrai que notre pays traverse des moments difficiles. Néanmoins, en dépit de la crise, nous savons ce que nous voulons réellement faire à l’avenir. Nous conduisons la Grèce vers un nouvel avenir prometteur doté d’un système mieux organisé.

La crise nous a enseigné beaucoup de choses et nous sommes déterminés à commencer à construire la nouvelle Grèce. Cette période transitoire sera très difficile. Le peuple grec à l’heure actuelle traverse une période douloureuse. Mais nous savons ce que nous devons faire pour améliorer la situation et sortir de la crise le plus rapidement possible.

En ce qui concerne la vente de certains biens immobiliers, c’est une chose que nous aurions du faire bien avant. Maintenant nous avançons, nous prenons toutes les mesures nécessaires, nous procédons à des réformes structurelles profondes et à des changements radicaux.

Lors de la prochaine période interparlementaire, lorsque l’heure sera venue, d’importantes réformes seront mises en place, ce qui constituera une base pour la mise en œuvre d’une nouvelle architecture pour la Grèce.

En dépit de tout cela et de la crise, la Grèce demeure l’un des facteurs de stabilité et de stabilisation de la région. Aujourd’hui, dans le cadre de nos entretiens, nous sommes convenus des moyens d’application et d’adoption de politiques communes afin de transformer notre voisinage en un modèle de stabilité, d’amitié, de paix et de coopération.

T. CORLATEAN : Pendant nos entretiens aujourd’hui et en présence du premier ministre Victor Ponta, nous avons passé en revue les moyens par lesquels le gouvernement grec a géré la situation en cette conjoncture difficile de crise économique. Il est parvenu à maintenir la stabilité du pays.

Nous avons exprimé notre estime et notre respect pour le processus de réformes élargi, qui est certes douloureux, et le fait que le gouvernement grec ait pu maintenir la stabilité a été un avantage particulier pour la région tout entière et l’Union européenne dans son ensemble.

A preuve, les banques grecques exerçant une activité en Roumanie ont continué de fonctionner normalement et cela est le meilleur exemple que nous puissions donner.

Question : Quelles sont à votre avis les priorités dans le cadre de la coopération stratégique bilatérale entre la Roumanie et la Grèce, au niveau régional et européen ?

D. AVRAMOPOULOS : Il s’agit en effet d’une coopération stratégique, puisque nos deux pays œuvrent en faveur de la création, comme je l’ai dit tout à l’heure, d’un environnement de stabilité, de paix et de coopération dans notre région.

Vous savez que la Grèce et la Roumanie n’ont jamais été en conflit dans le passé. Nous sommes les seuls pays dans la région à ne jamais avoir eu de problèmes bilatéraux. Mais cela ne signifie pas que nous ne devons pas faire davantage et c’est ce que nous faisons à l’heure actuelle. A l’ordre du jour de nos contacts aujourd’hui figurait toute une série de questions essentielles relatives à la culture, à l’économie, au tourisme, aux relations politiques, aux initiatives prises dans notre région afin de la transformer en un oasis de stabilité et d’amitié.

Nos relations économiques se développent. Nous nous plaçons parmi le cinquième et sixième plus grand investisseur en Roumanie. J’aimerais également ajouter autre chose : les Roumains commencent à découvrir la Grèce comme destination touristique. Si vous visitez la Grèce en été, vous vous sentirez comme chez vous, vous pourrez profiter de notre hospitalité chaleureuse. Ceux qui viendront en Grèce se sentiront comme chez eux, exactement comme je me sens aujourd’hui ici.

Par ailleurs, la Grèce compte une importante communauté roumaine qui est composée de citoyens roumains qui ont choisi la Grèce pour y vivre et ils constituent un pont d’amitié entre nos deux pays.

Question : concernant la question liée à l’accord de Schengen et les mesures prises par la Grèce pour lutter contre l’immigration clandestine.

D. AVRAMOPOULOS : Il est vrai que la Grèce, qui est en première ligne des frontières de l’Europe, et qui dispose de la plus grande ligne côtière en Europe, est confrontée à de nombreux problèmes concernant l’immigration clandestine. C’est pourquoi, nous avons demandé l’aide et le soutien de nos partenaires européens.

La Grèce a pris toutes les mesures nécessaires et a adopté une législation y relative afin de protéger ses frontières qui sont en même temps des frontières européennes. Mais il y a encore beaucoup à faire.

L’immigration clandestine est l’un des problèmes les plus complexes que nous devons résoudre au sein de l’Europe, car ce problème ne concerne pas seulement la Grèce, il concerne l’Europe tout entière : les immigrés clandestins voyagent partout à partir du moment où ils entrent en Europe, ils ne connaissent pas de frontières et leur rêve est d’arriver à une autre destination.

Enfin, envisager l’immigration clandestine du point de vue politique, ne doit jamais se transformer en une politique raciste ou xénophobe. Nous vivons dans une Europe démocratique. Nous sommes des pays démocratiques et il y a des principes fondamentaux que nous devons respecter.

T. CORLATEAN : C’est une question important. Je partage totalement le point de vue du ministre, à savoir que la question de l’immigration clandestine nécessite une coopération au niveau européen. Ce problème ne doit pas être assumé par un seul pays seulement, il concerne le processus de coopération. C’est la raison pour laquelle la Roumanie, depuis quelques années, a participé activement à différentes entreprises européennes de soutien de la Grèce pour lutter contre cette situation.

Nous avons contribué aux différentes opérations de la Frontex, nous avons contribué aux différentes opérations européennes dans la région, car nous percevons l’Union européenne comme un processus de coopération et non comme des lignes de démarcation et deux poids deux mesures que nous rejetons catégoriquement, et cela est une approche commune.

Par consequent, nous devons cooperer et soutenir la Grece au sein des structures europeennes et voir comment ce processus sera envisage. C’est la raison pour laquelle nous avons, entre autres, institue depuis de nombreuses annees un forum tripartite de cooperation dans la region, entre la Roumanie, la Grece et la Bulgarie. Ce forum n’opere pas seulement au niveau des ministres des Affaires etrangeres – nous avons eu notre derniere rencontre a Sofia il y a quelques mois – mais aussi au niveau des ministres de l’Interieur, pour la cooperation, entre autres, en matiere d’immigration clandestine, de criminalite, etc.

Cela est important pour la région, cela est important pour la question que vous avez soulevée et je peux l’annoncer, après avoir consulté le ministre roumain de l’Intérieur avant notre rencontre d’aujourd’hui, à savoir que la Roumanie accueillera – et lancera des invitations en septembre, probablement après les élections parlementaires qui se tiendront en Bulgarie dans quelques semaines – une conférence tripartite entre les ministres de l’Intérieur de la Roumanie, de la Grèce et de la Bulgarie, afin que nous poursuivions notre coopération pour lutter contre la circulation illégale de personnes et l’immigration clandestine.

April 4, 2013