N. KOTZIAS : J’aimerais remercier mon ami le ministre des Affaires étrangères Mevlüt Çavuşoğlu de m’avoir de nouveau invité à Ankara, une ville qui ne cesse de s’embellir, aussi bien elle-même que ses habitants.
Je le remercie pour cette invitation qui nous offre la possibilité d’échanger des réflexions, car tant que la diplomatie prévaudra, il sera toujours possible de définir un agenda positif dans les relations entre les deux Etats.
Par ailleurs, je dois vous dire que je suis très heureux de rencontrer aujourd’hui le Président, Erdoğan, un grand dirigeant du pays voisin.
Nous voulons que les relations entre la Grèce et la Turquie soient le plus étroites, amicales et humaines possibles. Nos peuples et nos pays ont tant à gagner du développement de notre coopération et de ce que nous empêchons des tiers de se mêler à nos affaires.
Nous vivons dans un monde difficile, en constante mutation, un monde dans lequel certains ne se sentent pas en sécurité. En d’autres termes, nous vivons dans un monde d’instabilité et certains ne s’imaginent même pas comment sera l’avenir.
Dans ce monde en constante mutation, il est important que les relations entre la Grèce et la Turquie se développent de manière constante car ce sont deux pays exceptionnels avec une grande histoire et un avenir commun encore plus grand.
Nos pays sont situés dans une région très affectée par des crises : au nord en Ukraine, au sud-ouest en Libye, au sud-est en Syrie et en Irak. Nous sommes deux pays à vouloir la paix dans la région, la stabilité aussi et c’est pourquoi nous devons coopérer et échanger des vues et des idées à ce sujet.
Il est important que nous soyons une ancre de stabilité dans un monde qui change et qui est caractérisé par l’instabilité et que cette relation amicale stable soit honnête. Nous avons bien entendu des désaccords et des différends, mais nous avons devant nous un agenda positif pour avancer.
Nous soutenons, avec passion je dirais, car nous avons aussi enduré des épreuves à nous-mêmes, la démocratie et les institutions de la démocratie en Turquie et nous nous sommes d’emblée positionnés en défaveur du coup d’Etat, sous toutes ses formes.
Par ailleurs, nous sommes le pays à s’être positionné avec la plus grande honnêteté, conviction et constance, en faveur du parcours européen – du cheminement vers l’Union européenne – de la Turquie.
Nous sommes profondément convaincus que notre pays aura tout à gagner d’une Union européenne qui accueillera en son sein la Turquie. Nous le croyons fermement, nous le voulons et nous n’aimons pas le double langage et l’hypocrisie, qui n’ont pas leur place en politique internationale et dans les relations entre Etats.
Il est important, pendant cette période d’instabilité, de pouvoir maintenir les voies de communication ouvertes entre les deux Etats. Les rencontres des ministres des Affaires étrangères sont très importantes de ce point de vue, car les ministères des Affaires étrangères jouent encore le rôle de coordinateur des coopérations et des contacts entre les autres ministères.
Nous avons aujourd’hui discuté de la nécessité de continuer notre coopération en matière d’immigration, d’organiser une rencontre des ministres de la Culture. Et il y a aussi une manifestation très importante en février, organiser la cinquième réunion de gouvernement à gouvernement, au Conseil de coopération de haut niveau, dans la ville historique de Thessalonique qui a été imprégnée par les civilisations de plusieurs peuples.
Je vais également vous avouer quelque chose, même si ce n’est peut-être pas très élégant, à savoir que nous allons adresser aujourd’hui une invitation officielle au Président Erdoğan, qui est le bienvenu. Le Président de la République hellénique, M. Prokopis Pavlopoulos l’attend avec joie et amitié.
Avec Mevlüt, je dirais que de manière générale, nous mettons en œuvre un agenda positif et nous contribuons à la coopération dans le domaine du tourisme. Nous avons la chance de représenter deux pays avec de très belles côtes et régions. Nous sommes en avance pour ce qui est de la coopération économique et des projets communs dans le transport et de la coopération dans le domaine de l’éducation, de la formation et notamment de l’enseignement supérieur.
Nous pensons également que nous devons continuer nos rencontres à tous les niveaux au ministère des Affaires étrangères, notamment avec les rencontres très réussies de nos Secrétaires généraux, les directeurs politiques respectifs, car il n’y pas vraiment le même équivalent.
Nous avons prié nos Secrétaires généraux de contribuer à la préparation du Conseil de coopération de haut niveau, à la coordination entre différentes directions, afin que nous échangions des réflexions sur les grands problèmes qui touchent, mobilisent ou dérangent les deux pays ici, dans notre région, et que nous puissions toujours discuter comme nous discutons, avec beaucoup de compréhension mutuelle.
Nous avons par ailleurs discuté de questions ayant trait au bien-être de la minorité musulmane et de son éducation ainsi qu’à la présence grecque d’Imvros jusqu’à Istanbul, en vue de résoudre certains problèmes de nature juridique ou bureaucratique qui existent depuis des années. A ma grande joie, nous sommes convenus, avec mon collègue Mevlüt de réfléchir et de promouvoir des solutions à des questions qui ne doivent plus rester en suspens.
J’aimerais de nouveau remercier Mevlüt pour son accueil, ce bel accueil de l’âme turque, et je lui promets de lui réserver le même accueil.
La dernière fois qu’il était venu, c’était dans la belle île de Crète. Aujourd’hui, nous nous sommes mis d’accord pour nous rendre dans une île tout aussi belle, mais nous révélerons le nom de cette île plus tard. Je pense que la communication entre les ministères des Affaires étrangères dans chaque pays est un élément de la culture et contribue à développer le tourisme de part et d’autre.
Mevlüt, merci encore pour cet accueil, pour la discussion productive et fructueuse que nous avons eue et que nous poursuivrons avec le Président Erdoğan.
Merci beaucoup.
JOURNALISTE : J’aurais une question concernant le combat de la Grèce et de la Turquie contre le terrorisme. Vous l’avez mentionné au début de votre intervention. Pendant les discussions bilatérales, la question de la procédure d’extradition des 8 officiers putschistes qui se sont enfuit en Grèce après le coup d’Etat raté du 15 juillet, a été abordée. Pouvez-vous nous dire où en est actuellement la procédure d’extradition de ces officiers ?
Ν. KOTZIAS : Je n’aime pas les coups d’Etat. J’étais jeune au moment du coup d’Etat en Grèce, de 1967 jusqu’en 1974 et je suis donc victime de ce coup d’Etat. Je me souviens même de mes juges militaires.
Nous avons notre propre expérience et le gouvernement à Athènes est composé de personnes qui sont contre les coups d’Etat et bon nombre de celles-ci étaient d’ailleurs en prison lors du putsch susmentionné – les plus âgés, non les plus jeunes.
Par conséquent, lorsque le coup d’Etat a éclaté en Turquie – je me trouvais en Mongolie, en République de Mongolie lors d’une rencontre Europe – Asie – il était normal que je rentre d’urgence le même jour ; nous avons exprimé notre solidarité vis-à-vis des institutions démocratiques en Turquie et avons souligné la nécessité de défendre démocratiquement ces institutions.
Et bien entendu, quiconque prend les armes contre la démocratie devra répondre de ses actes devant la justice turque.
Les demandeurs d’asile en Grèce obtiennent ou non l’asile par des décisions des tribunaux et non du gouvernement. On peut juger les décisions de justice, les aimer ou non, mais quoi qu’il en soit, il faut les respecter.
Les tribunaux grecs, comme je l’ai souvent dit à Mevlüt, ont souvent rejeté des projets de loi du gouvernement grec. Ils ont même rejeté l’un de nos projets de loi les plus forts qui concernait le contrôle des oligarques des médias de masse. Autrement dit, la Justice dans un Etat de droit, réfléchit à sa manière. Toutes les décisions ne nous plaisent pas, mais le système juridique nous est indifférent. Le tout est de le respecter.
Par contre, pour tout ce qui ne relève pas de la justice, mais de la volonté politique, nous le comprenons et soutenons la République turque.
Et donc, pour ce qui est de la question du terrorisme, je dirais que nous sommes un pays qui n’affectionne guère les groupes terroristes, encore moins le terrorisme.
Je dois dire, et Mevlüt s’en est souvenu, que – en ma qualité d’universitaire – le premier article que j’ai écrit fut à l’âge de 17 ans, sous un pseudonyme, c’était la première année de la junte militaire grecque, et cet article était contre le terrorisme et qui plus est à une période marqueé par le coup d’Etat.
Il est donc plus que manifeste que pour moi-même personnellement et mon gouvernement, quiconque utilise la méthode du terrorisme pour semer la crainte parmi les citoyens et la démocratie doit être condamné et à cet égard la coopération internationale est nécessaire.
Je vous remercie beaucoup Madame pour votre question.
October 24, 2017