Déclarations du vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, E. Vénizélos et de Hannes Swoboda, président du Groupe des Socialistes et Démocrates du parlement européen

Déclarations du vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, E. Vénizélos et de Hannes Swoboda, président du Groupe des Socialistes et Démocrates du parlement européenE. VENIZELOS : C'est avec un grand plaisir que j'accueille ici au ministère des Affaires étrangères Hannes Swoboda, président du Groupe des Socialistes et Démocrates du parlement européen ainsi que les membres éminents de la délégation de ce groupe parlementaire.

Ma joie était encore plus grande car je les ai accueillis non seulement en ma qualité de vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères en vue de la Présidence hellénique, mais aussi en celle de Président du PASOK. Le PASOK participe au parti socialiste européen ainsi qu'au groupe parlementaire des Socialistes et Démocrates européens par le biais d'un groupe puissant de députés européens.

Les priorités de la Présidence hellénique sont bien connues. Ce sont des priorités qui expriment les préoccupations des sociétés européennes et, bien entendu, celle de la société grecque. Qui ne veut pas d'une Europe qui retrouvera sa croissance, qui offrira des emplois et du travail aux jeunes? Qui ne veut pas de la protection de l'Etat social européen, sur des bases budgétaires et démographiques saines? Il s'agit d'un besoin vital pour les pays en crise mais aussi pour tous les autres pays.

Qui ne veut pas que l'on approfondisse les institutions de la gouvernance économique? Qui ne veut pas d'une union bancaire qui assurera les dépôts de tous les citoyens européens? Cela revêt une très grande importance pour la transparence, la compétitivité ainsi que pour la perspective d'un système bancaire européen qui renforcerait l'entrepreneuriat, les investissements et l'économique réelle.

Qui ne veut pas de la protection des frontières européennes, de la protection du littoral européen? Qui ne veut pas de la gestion des flux migratoires, sans des crises humanitaires, telles que les événements tragiques de Lampedusa et de Sicile? Qui ne veut pas que les problèmes auxquels est confronté le monde arabe soient résolus à leur source?

Et, bien évidemment, pour un pays comme la Grèce à laquelle succédera à la présidence au Conseil de l'UE, un autre pays méditerranéen, l'Italie, la politique maritime globale constitue une priorité horizontale. Car la mer nous offre des opportunités d'investissement et d'emploi dans le domaine de la pêche, de l'énergie et de la protection de l'environnement. La mer nous offre de nouvelles institutions comme la Grande région en Adriatique et en Mer Ionienne, ce qui nous permet de valoriser le droit international de la mer dans cette région sensible de la Méditerranée.

Enfin, la Présidence hellénique coïncide avec la période préélectorale pour la formation du nouveau parlement européen. Par conséquent, elle coïncide avec ce grand débat sur le nouveau récit européen. Et pour nous, Socialistes et Démocrates européens, le défi à relever est grand. Car les citoyens européens attendent de nous une proposition alternative, un récit alternatif pour une Europe qui sera sûre, développée et compétitive et, dans le même temps, sensible aux questions sociales. Une Europe qui offrira des emplois, des espoirs, des perspectives et de la protection et qui sera dans le même temps compétitive.

Je me réjouis de l'accueil favorable de la part de mes collègues du Groupe parlementaire des Socialistes et Démocrates. Nous avons également discuté des questions relevant de la politique étrangère et je suis certain que sous la direction de Hannes Swoboda, une personnalité parlementaire européenne éminente, le Groupe parlementaire des Socialistes et Démocrates européens livrera un véritable combat au cours de ce semestre critique de la Présidence hellénique, mais aussi des élections européennes.

H. SWOBODA: Je vous remercie beaucoup monsieur le vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères. Pour nous la Présidence hellénique revêt une importance multiple. Bien évidemment, il est important d'avoir à la fin de la période parlementaire une présidence puissante, car il y a de nombreuses questions qui doivent être résolues. M. Vénizélos a évoqué par exemple, pour ce qui est de la gouvernance économique, l'union bancaire qui est l'un de ces éléments importants. Il a aussi évoqué les questions sociales, car nous avons besoin des critères sociaux, notamment pour l'Union monétaire européenne, la question de l'immigration, des questions que nous devons envisager.

Je voudrais souligner le deuxième élément qui est lié au soutien accordé au gouvernement grec et à la Grèce en tant que pays. Pour ce qui est des questions économiques, la Grèce traverse une crise profonde, mais nous voulons également appeler toutes les parties, y compris la Troïka, à reconnaitre l'immense travail accompli par le gouvernement en vue de mettre en œuvre des réformes, par exemple dans le secteur administratif. Bien évidemment, il reste encore beaucoup à faire, mais aucun pays ne peut opérer tous ces changements en quelques jours ou en quelques mois, qui plus est en quelques années.

Un travail énorme a été accompli, ce qui n'est pas toujours reconnu. Je voudrais également adresser un appel à la Commission européenne, au Conseil et aux organes institutionnels, tels que la Troïka, afin qu'ils reconnaissent le travail accompli et ne demandent pas des mesures qui soient inacceptables, car ils vont torpiller le soutien du peuple au gouvernement en ce moment difficile.

La question de l'immigration est un autre dossier très important. La Grèce a entrepris un travail gigantesque en raison de sa position géographique. Et dans ce domaine aussi, il faut agir, améliorer les actions, notamment dans la région méditerranéenne où il est important d'avoir des intérêts européens communs et des activités européennes communes.

Par conséquent, le Groupe socialiste européen accorde, bien entendu, son plein soutien à la Grèce, au gouvernement et à la participation du PASOK au gouvernement. Comme je l'ai également affirmé, ainsi que le vice-premier ministre, cette tâche n'est pas du tout facile. Il serait plus facile de dire que le travail doit être fait et de jouer le rôle de spectateur depuis l'étranger. Mais, c’est la responsabilité du PASOK d'être à l'intérieur et de lutter pour faire avancer ce processus de réforme. Mais je pense qu'il est temps que chacun reconnaisse les progrès réalisés par le gouvernement, tout en sachant qu'il faut mener des actions ultérieures, des actions qui ont d'ores et déjà été mises en route. C'est pourquoi nous pensons que cette présidence sera très constructive et très modeste en matière de coût, mais pas en matière d'objectifs. Je vous remercie beaucoup.

JOURNALISTE: La question est adressée aux deux messieurs. Avez-vous abordé la question du néonazisme en Europe et les initiatives communes au cours de la Présidence hellénique?

E. VENIZELOS : Au cours de cette discussion, nous n'avons pas évoqué le phénomène de l'Aube dorée, un parti qui dissimule une organisation criminelle, ni le phénomène du néonazisme. Car nous avons, à maintes reprises, abordé cette question dans le passé et l'attitude des Socialistes et Démocrates européens à cet égard est bien claire. C'est une priorité pour chaque citoyen européen progressiste de s'opposer aux phénomènes du fascisme, du nazisme, du racisme, de la xénophobie et de toute forme de violence, politique ou sociale. Avec le groupe des Socialistes et Démocrates européens et en général avec le parlement européen, nous allons organiser un bon nombre de manifestations ainsi que d'autres activités au cours du semestre de la présidence. Il s'agit de manifestations qui sont prévues et qui seront communiquées progressivement.

H. SWOBODA : Une remarque. Comme vous le savez, nous sommes très stricts à l'égard de ces questions liées à la lutte contre l'extrémisme et toute forme d'extrémisme, y compris l'extrémisme de l'extrême droite. Il y a eu également une discussion sur le rôle des partis européens, car les extrémistes de l'extrême droite essayent également de former un parti européen.

Finalement, il s'agit de la lutte de la société contre ce phénomène. Et nous sommes très préoccupés par certaines tendances dans certains Etats membres. Il ne s'agit pas d'un problème grec. Certains Etats membres ne travaillent pas en faveur de la reconstruction de la société, ils ne cultivent pas la tolérance et de ce fait ils ne vont pas de l'avant. Et cela nous ne devons pas l’accepter. Je salue la détermination dont font preuve les socialistes grecs, mais aussi le gouvernement en vue de lutter contre les organisations criminelles qui se trouvent derrière les mouvements politiques et les partis politiques.

JOURNALISTE : Monsieur le président, M. Swoboda et M. Vénizélos, vous avez dit dans la première partie de vos déclarations que la société grecque subit de très grosses pressions. La Grèce a fait beaucoup de choses, mais nos partenaires ne l’entendent pas de la même oreille. Vous, en tant que Socialistes et Démocrates européens, comment allez-vous aider concrètement le pays qui, à l’heure actuelle, traverse une crise économique très grave et veut en sortir ? Est-ce que finalement vous ne le pouvez pas et qu’à un moment donné le pays, la société « déraillera », avec tous ces phénomènes que nous connaissons au niveau politique également ? Merci.

H. SWOBODA : Ecoutez, c’est en même temps très difficile et très facile. J’ai regardé les derniers chiffres sur la croissance grecque et les signes sont positifs. Mais il y a une contrainte. L’Europe n’a pas de politique en faveur de la croissance. Et tant qu’on n’a pas de politique pour la croissance comment est-il possible de transformer le coût du travail peu élevé en une hausse des exportations, par exemple ?

C’est pourquoi je suis totalement d’accord pour dire que la Grèce ne doit pas supporter à elle seule tout le poids, ni d’autres pays. Le poids doit être supporté par l’Union européenne. Nous ne pensons pas que le nouveau gouvernement allemand apportera un changement radical. Mais il y aura plus de soutien à une politique de croissance. Nous luttons pour attirer les investissements, car les investissements sont essentiels à la promotion de la croissance au sein de l’UE. Qu’il s’agisse d’investissements publics ou privés.

L’abandon de la Grèce est le résultat de l’absence de croissance en Europe. C’est la conséquence la plus importante en Grèce et dans d’autres pays européens. Si nous optons pour le changement en faveur de la croissance – et cela sera la principale caractéristique de ces prochains mois, avec, nous l’espérons, le soutien du gouvernement grec – nous passerons d’une politique d’austérité à une politique de croissance.

Vous avez beaucoup fait pour réduire le coût du travail. Il en va de même pour le Portugal et l’Espagne et l’Italie aussi. Vous avez réduit les effectifs dans le secteur public et l’administration. De nombreuses réformes ont donc été appliquées, mais comment tout cela peut-il se transformer en nouveaux emplois s’il n’y a pas de croissance en Europe ? C’est donc notre principal objectif dans le cadre des élections européennes également. Car ce qui préoccupe le plus le monde c’est l’absence de croissance, d’investissements et d’emplois. Et parfois tout cela se transforme en radicalisme.

JOURNALISTE : Hier vous avez eu une communication téléphonique avec M. Schäuble et M. Rehn concernant l’évolution de la négociation et de la dette grecque. Pourriez-vous nous parler de la teneur de votre conversation ?

Ε. VENIZELOS : Je suis en contact permanent avec tous les acteurs européens importants, qui peuvent influencer les évolutions en Grèce également. Car, en tant que président du PASOK, je participe à un réseau très important réunissant des partis socialistes et progressistes européens, parce qu’en tant que ministre des Affaires étrangères je suis en contact permanent avec mes homologues et parce qu’en tant qu’ancien ministre des Finances j’ai toujours des contacts avec la communauté économique et financière européenne. Donc parler avec le commissaire compétent ou avec un ministre des Finances n’est pas une nouvelle.

D’ailleurs, les deux noms que vous avez mentionnés, sont devenus deux amis après l’expérience douloureuse de la gestion de la crise. Mais naturellement l’objet de ces entretiens est toujours : ce qui se passe en Europe, ce qui se passe en Grèce, comment allons-nous avancer ensemble pour sortir de la crise.

Il est très important de réussir à sortir de la crise, de changer l’ambiance, d’apaiser les esprits au sein de la société grecque et calmer la situation au sein de l’économie grecque. Je ne parlerais pas de la teneur de ces discussions, mais je rebondirais sur les propos de M. Swoboda et je dirais que le secteur privé international, les entreprises, les funds, les banques ont bien compris que la situation en Grèce a changé, que la Grèce est une opportunité pour les investissements, la croissance et nous voulons que nos partenaires institutionnels le comprennent bien.

Nous ne voulons pas obtenir de grâces, nous ne voulons pas une « négociation » politique, où le mot politique est synonyme de « non économique », « non équitable ». Au contraire. Nous voulons une discussion économique sérieuse pour pouvoir sortir définitivement de la crise et non une discussion stérile et bureaucratique. Une discussion qui soit dynamique et qui prenne conscience du moment historique pour l’Europe.

Merci.

December 2, 2013