Bonjour. Je vous remercie d’avoir, encore une fois, accepté notre invitation d’assister à la réunion à Thessalonique. Il s’agit d’une nouvelle institution axée sur notre action commune et les liens d’amitié qui unissent nos quatre Etats. Je voudrais tout particulièrement remercier Ekaterina Zaharieva qui a pu trouver le temps, dans le cadre de ses responsabilités émanant de la présidence, d’être avec nous.
Je tiens à remercier aussi Nikola Dimitrov. Nous aimons toujours, tous les deux, nous rencontrer, ici, à Thessalonique et engager des discussions constructives et « last but not least », je voudrais remercier mon cher ami, le plus ancien de toutes et de tous qui se trouvent ici, Ditmir Bushati, avec lequel nous avons réussi à régler des problèmes datant depuis des décennies entières entre nos deux pays.
J’espère que nous réussirons à régler toutes les questions de la région et que nous nous engagerons ensemble dans un chemin européen constructif. Je salue en conséquence la 3ème conférence des Etats partis à la coopération transfrontalière et je voudrais dire quelques mots, très brièvement, sur les changements géostratégiques et leur importance pour notre coopération.
Notre région est, par rapport à toute l’Europe, la plus proche de la Méditerranée orientale et du Moyen-Orient, mais aussi de l’Afrique de l’est et du nord. Nous sommes les premiers à ressentir les changements qui s’opèrent dans ces régions, à comprendre les problèmes, les dangers, mais à entrevoir aussi les opportunités offertes pour la paix et le développement dans notre région.
Je dirais que les changements, notamment en Afrique du nord, en Libye, au Moyen-Orient, en Syrie, en Irak et en Méditerranée orientale, sont des changements qui intensifient les changements tectoniques qui s’opèrent sur notre planète.
Les changements qui s’opèrent sur notre planète ont certaines caractéristiques, que vous connaissez, à savoir nous vivons dans un monde en constante évolution où le rôle de l’Occident ne peut et n’est pas le même que ce qu’il était au 19e et au 20e siècles, où de nouvelles puissances émergent, où le rôle de l’Occident est relativement moins important. Cela a comme résultat que les puissances de l’Occident s’occupent plutôt de regions autres que de celle de l’Europe du Sud-est.
Il y a notamment un grand déplacement de l’intérêt de ce que j’appelle « le lac de l’Atlantique » vers le « lac du Pacifique ». Cela signifie que les Etats-Unis s’occuperont de plus en plus de ce grand changement et moins de ce qui se passe en Europe et par conséquent dans notre région.
Je dirais également que les changements montrent que la Russie, notamment au Moyen-Orient, se redresse et manifeste de nouveau un intérêt à l’égard de notre région.
Et, bien évidemment, une chose complètement nouvelle par rapport à ce qui s’est passé il y a 20 et 30 ans est l’apparition de la Chine en tant que grande puissance économique, offrant d’importantes possibilités en matière de projets et de partenariats dans notre région.
Lorsque le monde change en entraînant des conséquences sur notre région, il y a une seule conclusion pour nous, Grecs, et pour nous tous, à mon avis, à savoir que nous devons renforcer et approfondir notre coopération dans la région.
Des changements s’opèrent aussi au sein de l’Union européenne. Des changements qui feront l’objet de nos discussions en moins d’une semaine d’ici, lors de la conférence internationale de Sounio, où seront présents tous les pays candidats des Balkans occidentaux et tous les Etats des Balkans occidentaux.
Les pays du groupe de Višegrad y assisteront tout comme les Etats membres balkaniques de l’Union européenne.
Je pense que nous devrons dans les semaines à venir établir une coopération, non seulement au niveau des ministres mais aussi entre nos directions en charge des questions européennes, afin de pouvoir de manière systématique et concertée enregistrer et dans une certaine mesure influencer les changements qui s’opèrent en Europe.
Mon pays, tout comme la présidence, sommes disponibles à apporter toute sorte d’aide aux deux autres pays, si besoin est, en matière d’expertise et dans des autres domaines.
Les changements dans la région du Moyen-Orient requièrent, à mon avis, une meilleure concertation de notre part. Hier soir, nous avons engagé une discussion sur cette question. Les changements qui s’opèrent et les guerres qui sont menées ont déclenché, à côté du conflit israélo-palestinien, trois guerres, celle de la Syrie, de l’Irak et de la Libye.
En outre, nous pensons que nos départements en charge du Moyen-Orient et de la Méditerranée orientale peuvent - ce qui serait productif - se rencontrer pour échanger des points de vue et trouver les moyens permettant de renforcer notre action commune au Moyen-Orient.
Dans ce sens contribuera aussi la réunion que nous aurons - et nous sommes tous invités à y assister - à Rhodes, en juin prochain, lors de laquelle nous rencontrerons tous les Etats arabes, la Ligue arabe et le Conseil de coopération du Golfe, en vue de discuter du développement ultérieur de notre agenda positif entre l’Europe du Sud-est et le monde arabe.
Lors de cette réunion et lors du débat qui sera engagé sur le Moyen-Orient, il vaudrait peut-être évaluer certaines nouvelles indications. L’Iran, à travers les partenariats qu’il a établis en Irak et en Syrie ainsi qu’avec le Hezbollah, a pu trouver une issue menant depuis sa région jusqu’à la Méditerranée. Il est devenu un acteur qui agit et qui a d’ores et déjà une présence puissante au Moyen-Orient.
Nous prenons aussi note du conflit interminable en Syrie. Il s’agit ici d’une guerre civile en apparence à laquelle sont impliquées 9 autres puissances. Une guerre civile sans fin à cause du flux de personnes et du matériel militaire en provenance de pays différents, en dépit de la fatigue qu’éprouve la société syrienne et de la destruction qu’elle a subie.
Cela signifie, toutefois, que ce conflit sera toujours en suspens et que nous devrons faire face de concert, les quatre pays, aux questions liées à l’immigration, aux flux migratoires et aux réfugiés.
Et j’aimerais répéter ce que j’avais affirmé avant-hier, à savoir que les nouveaux règlements et lois du gouvernement de la Syrie suscitent de l’inquiétude, du moins en Grèce, car, d’une certaine manière, à travers les conditions et les règles qu’ils imposent, ils ne garantissent pas la protection des biens, formels ou informels, des 14 000 000 Syriens qui se sont déplacés soit à l’intérieur du pays soit à l’étranger. Ce qui signifie que le retour de millions de Syriens dans leurs foyers sera plus difficile que ce qu’elle aurait été sans cette législation.
Et il y a aussi la présence de notre pays voisin, de la Turquie, à Afrin, laquelle, à notre avis, remet en question le Traité de Lausanne dans l’est de son territoire. Toutefois, ce traité concerne beaucoup d’autres pays parmi lesquels figure aussi la Grèce.
Nous pensons que la poursuite des tensions au Moyen-Orient impose, en tant que devoir impératif, la coopération continue entre nos ministères en charge des réfugiés, de l’immigration et de la sécurité dans les régions frontalières du pays. Et nous aurons une discussion exhaustive ici avec la participation aussi de M. Toskas. Notre coopération étroite ne doit pas seulement porter sur ce que j’appelle l’agenda négatif, mais elle doit sûrement porter sur notre développement et notre coopération dans le domaine de l’énergie et des grandes infrastructures.
L’année dernière nous avons discuté de notre coopération dans le domaine de l’énergie, des nouveaux pipelines. C’était une discussion très intéressante et constructive.
Cette année, M. Spirtzis est avec nous pour discuter des modalités permettant de développer la connectivité (« connectivity ») de la région.
Je pense que nous, en tant qu’Etats de petite et de moyenne taille pour l’Europe, devons développer non seulement notre connectivité mais aussi notre coopération globale en fixant deux objectifs : aider les deux Etats qui ne sont pas encore des Etats membres de l’Union européenne à y adhérer et préparer, à travers notre coopération d’aujourd’hui, notre coopération future au sein de l’Union européenne.
Bien évidemment, cette coopération ne peut pas se limiter seulement aux ministères et à leurs départements compétents. Cette coopération doit aussi s’étendre à l’ensemble de la société.
Nous voulons établir une coopération entre nos universités et nos centres de recherche. Organiser des conférences et des symposiums internationaux sur ces questions. Organiser des conférences internationales sur les questions de la connectivité. Les chemins de fer, les routes, les aéroports. Mais aussi sur les hydravions, comme l’a affirmé hier soir M. Spirtzis.
Et établir aussi une connectivité entre nos pays dans le domaine de l’énergie, avec des bateaux, des pipelines et des câbles, en employant tout moyen à notre disposition. Nous avons donc besoin du développement de notre coopération dans tous les domaines, allant de l’éducation jusqu’à la civilisation. Et nous pourrons éventuellement aussi mettre en place des initiatives communes, soit à travers des documents, soit à travers des voyages dans des pays où nous avons des intérêts communs et lesquels revêtent un intérêt pour notre développement, mais aussi pour l’instauration de la paix dans le monde.
Je voudrais encore une fois vous souhaiter la bienvenue. Je suis très content et satisfait à la fois du fait que l’initiative que nous avons prise il y a deux ans et demi est devenue un lieu commun de notre coexistence, de notre échange de vues, dans un esprit sincère et direct, une approche qu’une autre partie de l’Europe ferait bien d’adopter, avec laquelle nos discussions sont plutôt de caractère bureaucratique que constructives et sincères.
Nous avons des problèmes. Nous ne pouvons pas développer nos relations en balayant nos problèmes sous le tapis. Ce que nous faisons depuis de nombreuses années - discuter, échanger des points de vues, des critiques, des observations - nous aide à résoudre nos problèmes et à avancer. Bien évidemment, vous savez comment est la vie. Aussitôt qu’un problème est résolu, de nombreux autres font leur apparition.
Régler les problèmes ne signifie pas les faire disparaitre. On le sait bien. La mythologie grecque avec l’Hydre de Lerne et les travaux d’Héraclès nous l’a appris. Mais ce seront des problèmes de développement qui ouvriront la voie vers l’avenir et pas des problèmes du passé.
Je vous remercie et maintenant je demanderai à mon cher ami et confrère, M. Toskas, de diriger, comme il l’a fait l’année dernière, la séance consacrée aux échanges de vues. Je voudrais vous dire qu’à mon avis le fait que nous avons ici des pays dont les gouvernements se rencontrent, des rencontres de type G2G, et non pas une réunion quadripartite entre certains ministres, mais une réunion quadripartite élargie, un format très puissant en tant qu’image et substance, constitue une sorte d’exploit.
Je vous remercie.
May 4, 2018