Discours du ministre des Affaires étrangères, M. D. Avramopoulos devant le parlement hellénique

D. AVRAMOPOULOS : Chers collègues,

Comme vous le savez tous, notre pays est actuellement confronté à la situation la plus grave et la plus critique de son histoire après la Seconde guerre mondiale. Toutefois, à travers cette crise nous pouvons en fait créer de nouvelles opportunités et réussir à créer enfin un modèle de croissance économique durable doté d’un aspect social.
C’est à cela justement que visait, Monsieur Papadimoulis, la majorité du parlement hellénique en adoptant mercredi dernier le cadre de stratégie budgétaire à moyen terme et les mesures d’application.

Ce processus se conforme pleinement aux dispositions de la constitution et à l’ordre juridique du pays. Chaque fois que l’occasion se présente, vous cherchez à contester le caractère constitutionnel du fonctionnement de l’instance à laquelle vous participez. Il ne faut pas dévaloriser la politique car, comme nous tous, vous faites aussi partie de cette grande famille.

Aujourd’hui, chers collègues, nous sommes invités à adopter le budget de 2013. L’adoption de ce budget sera le deuxième pas dans ce sens. Cela dit, la parole sera à l’Europe. Les citoyens attendent à ce que nous faisons preuve de responsabilité et de détermination et je suis sûr qu’en parlant avec eux ces derniers jours, vous avez partagé leur contrariété et leur colère quant aux événements qui se sont déroulés il y a quelques jours dans cette salle.

Nous, en tant que Grece, avons fait ce que nous devions faire et maintenant nous attendons a ce que nos partenaires et creanciers en fassent de meme. Afin que la Grece sorte de la crise, afin que notre pays demeure au sein de l’Europe tout en ayant les perspectives qu’il merite. Toutefois, nous sommes desormais tous conscients qu’il faut lutter, consentir des efforts et faire des sacrifices pour atteindre cet objectif. Pour que notre pays sorte de la crise, nous devons tous ensemble, Etat et societe, livrer cette bataille. Toute la population active et toute la societe, en rassemblant leurs forces accordent leur soutien inconditionnel a l’orientation europeenne de la Grece. Par ailleurs, tel a ete le choix du peuple grec lors des dernieres elections et c’est justement dans ce sens que nous ?uvrons.

Chers collègues,

La crise économique n’a pas seulement porté atteinte aux économies européennes et mondiales. Elle a aussi touché la crédibilité des institutions sur lesquelles est axée notre monnaie unique. Après des efforts parfois pas coordonnés et souvent individuels et inefficaces, nous nous trouvons au seuil d’une nouvelle ère qui peut jeter les bases d’une union économique et monétaire intégrée, tout en protégeant notre économie et l’euro.

Chers collègues,

La Grèce constitue d’ores et déjà l’exemple d’une économie où la stricte discipline budgétaire n’est pas suffisante pour faire face à la récession. Au contraire, elle intensifie la crise tout en créant des problèmes sociaux.

Par conséquent, ladite expérience grecque que malheureusement nous sommes tous en train de vivre et notamment la population active et les jeunes, peut et doit servir de catalyseur afin de mettre en valeur et de promouvoir une nouvelle politique qui libérera l’Europe du stress de la dette et qui lui garantira des finances publiques saines, un secteur financier plus responsable qui devra rendre compte de ses choix, une croissance économique équilibrée dans l’Union européenne dans son ensemble. Un tel objectif ne peut être atteint qu’en restant au sein de la zone euro et de l’Europe.

Il est du devoir historique de la Grèce de se trouver au cœur de ces évolutions, tout en participant avec les partenaires européens au façonnement de l’avenir de l’euro. L’objectif est l’application réussie des changements structurels nécessaires afin de sortir de ce cercle vicieux de l’austérité. Le manque de liquidités et l’incapacité de financement de la partie même la plus sainte de notre secteur privé nous ont conduit à une profonde récession.

Et, il appartient au système politique, à nous-mêmes d’évaluer la situation réelle du pays. Notre objectif doit être l’entente nationale et le rassemblement de nos forces, et non la division.

Le problème principal qui se pose est de savoir dans quelle mesure la société et l’économie grecques pourront survivre sans le versement des prochaines tranches de l’aide. Ce n’est pas un chantage mais un dilemme bel et bien réel. La Grèce ne peut s’offrir le luxe de mettre en danger les générations à venir. Il est temps que toutes les forces du pays se mobilisent.
La convention nécessaire pour le fonctionnement de la démocratie est la confiance des citoyens au gouvernement mais aussi la responsabilité du gouvernement envers ses citoyens. Tel est le pari des jours, des semaines et des mois à venir. Tel est le pari que nous devons tous ensemble gagner.
Mesdames et messieurs,
Le redressement du pays exige dans le même temps la restructuration et la refonte des institutions. La révision constitutionnelle, la réforme administrative et la création de nouvelles bases sur lesquelles sera fondée l’économie qui sera aussi dotée d’une nouvelle perspective doivent être l’affaire de nous tous.
Dans ce cadre, le ministere des Affaires etrangeres n’a pas ete epargne des coupes dans son budget. Les hauts fonctionnaires du ministere consentent eux aussi des sacrifices pour tous les citoyens grecs qui en payent eux aussi le prix. Au cours de l’application du programme d’ajustement budgetaire, depuis 2012 jusqu’a ce jour, le budget ordinaire du ministere des Affaires etrangeres a subi une reduction de l’ordre de 25%.
Nous cherchons toute ressource possible et tout moyen pour économiser de l’argent de manière à limiter l’impact négatif au niveau de l’exercice de la politique étrangère et à assurer pour notre pays une présence efficace, digne et dynamique à l’étranger.
A cet effort collectif participe l’Hellénisme oecuménique, qui constitue pour nous une source d’inspiration et d’encouragement, un pilier de notre politique étrangère et un soutien substantiel de nos affaires nationales, animé d’une ferme intention d’offrir sa contribution.
Les relations entre l’Etat et la communauté grecque de l’étranger ont été revalorisées, comme vous pouvez le constater vous-mêmes ces dernier temps, ce qui a été le résultat d’une grande campagne que nous avons lancée dans le monde entier, tout en inspirant nos compatriotes et en demandant aussi leur contribution dans ce grand effort national. Et leur réaction a été touchante. Elle nous rappelle notre passé historique récent, où le volontariat et la contribution individuelle et collective a été un exemple illustrant la grandeur de l’âme grecque.

Chers collègues,
S’agissant de la question des visas d’entrée, notre pays a établi des partenariats internationaux et a réussi à accroître le nombre de touristes visitant notre pays et l’influx de fonds étrangers.

Ce processus s'étendra bientôt à tous les pays du monde à travers un nouveau cadre de coopération institutionnelle, avec des règles et des conditions précises, tout en valorisant les règles de la concurrence internationale. Ainsi, nous parviendrons aux meilleurs résultats possibles pour notre pays. Nous assurons qu’une partie des profits venant des centres de délivrance de visas, notamment pour ce qui est de ce domaine aussi sensible qu’est celui des visas, sera utilisée pour financer la promotion de notre pays au niveau mondial et nos missions consulaires.
Par ailleurs, renforcer l’extraversion, attirer des investissements, promouvoir les exportations et le tourisme, sont des objectifs qui se trouvent en tête de liste des priorités du gouvernement et du ministère des Affaires étrangères qui a la principale responsabilité pour ce qui est de la présence de notre pays à l’étranger.

Et, ça ne pourrait en être autrement car le milieu d’affaires grec a le regard de plus en plus tourné vers l’extérieur et au-delà des frontières de notre pays. Chers députés, nous nous trouvons dans un voisinage difficile. Il est vrai que la crise a limité nos moyens matériels, sans toutefois limiter nos activités diplomatiques. Le noyau dur de nos priorités nationales reste indemne. Le ministère des Affaires étrangères et le service diplomatique grec défendent l’intégralité de nos droits et de notre souveraineté nationale. Nous n’avons laissé la crise économique dégénérer en instabilité nationale et crise nationale et je vous assure que cette lutte est très difficile.
La Grèce demeure et est considérée comme un pilier de stabilité et de sécurité dans cette région agitée de la Méditerranée orientale et de l’Europe du Sud-est.

Nous sommes aux côtés de la République de Chypre, dans cette bataille livrée pour régler la question chypriote et nous soutenons fermement son droit d’explorer et d’exploiter ses ressources naturelles.

Nous œuvrons en faveur de l’amélioration des relations gréco-turques dans le cadre strict dicté par le respect du droit international et de la souveraineté nationale.

Nous assumons des initiatives dans le domaine de l’énergie. Le changement de la donne dans le domaine de l’énergie créé de nouvelles opportunités pour ce qui est de l’approvisionnement en énergie de l’Europe et modifie l’équilibre géopolitique de la région.

Force est de signaler le pas important qui a été fait dans ce sens à travers la signature avec l’Italie et l’Albanie de l’accord sur le projet du gazoduc Transadriatique (TAP), qui marque un nouveau chapitre dans la politique en matière de développement de la Grèce dans domaine de l’énergie. Une politique qui sera toutefois accompagnée par une série d’initiatives visant à façonner un environnement de sécurité, de paix et de stabilité dans la région car les Balkans agités du passé émettent de nouveaux de signes menaçants et inquiétants. Avec la recrudescence du chauvinisme dans notre région élargie et la présence de groupes rebelles qui influent toujours les affaires politiques intérieures des pays voisins, nous restons le principal pilier de sécurité, en tant que pays membre de l’Union européenne et de l’OTAN.

Chers collègues,

Il s’agit d’une politique qui sera accompagnée d’actions et de politiques précises qui valoriseront la richesse terrestre et maritime de la Grèce. Notre politique est la délimitation de toutes les zones maritimes, y compris la zone économique exclusive avec tous nos voisins ce qui sera un pas vers la consolidation de la paix et de la stabilité dans notre région.

En quelques mots, nous sommes toujours un facteur déterminant de stabilité. Nous contribuons au rapprochement entre l’Europe centrale et l’Europe du Sud-est, la région de l’Afrique du nord et du Moyen-Orient. Nous réchauffons nos relations de confiance avec tous les facteurs importants dans cette région élargie.
Dans ce cadre, lundi prochain, je me déplacerai en Egypte pour la deuxième fois au cours de ces deux derniers mois, en vue de participer à la réunion UE-Ligue arabe. La Grèce retrouve sa place sur la carte géopolitique.

Mesdames et messieurs,

Aujourd’hui, la crise, la fatigue de l’élargissement et le manque de progrès pour ce qui est des questions qui demeurent en suspens, font resurgir des comportements nationalistes et populistes dans cet endroit particulièrement sensible de nos voisins du nord.

La Grèce est de nouveau appelée à lutter pour protéger notre voisinage contre le syndrome balkanique du passé et soutenir le parcours des pays voisins vers leur intégration européenne.

Sans toutefois faire des concessions pour ce qui est de la mise en place de réformes substantielles qui doivent être faites en matière de démocratie, de respect des règles régissant les relations de bon voisinage et le développement équilibré des relations bilatérales.

A l’occasion de la présidence hellénique de l’Union européenne, au cours du premier semestre de 2014, nous ferons de l’avenir de la péninsule balkanique en Europe l’une de nos priorités.

Chers collègues,

Nous savons tous dans cette salle que notre pays traverse une période extrêmement critique. Ces derniers mois nous avons réussi, au prix d’immenses efforts et de manière progressive à changer l’image de notre pays à l’étranger. Notre tâche est lourde et requiert du temps car le dégât a été d’ores et déjà provoqué. Le prestige international de notre pays est atteint. Sa fiabilité est entachée. Nous ne devons pas permettre que tout cela continue, à une époque où tout est devenu international et où une partie de la gestion de la crise économique passe par la présence fiable de la Grèce dans le monde.

Nous retrouvons une partie du prestige qui a été perdue. Nous avons toutefois encore une longue route devant nous. Une route semée d’embûches. Et il nous appartient de réussir et d’aller de l’avant sinon nous plongerons dans les affres de l’histoire. Nous irons à l’encontre des conceptions populistes et démagogues. Pour le bien et l’intérêt de ce pays, tout en ayant foi dans les capacités des citoyens, de la société et de l’Etat grec tout entier. Avec un grand sentiment de responsabilité nationale, nous sommes invites à voter en faveur de l’avenir de ce pays, de nos enfants, avec la conviction qu'avec cette voie nous servons les intérêts de notre pays. Dans la perspective de prospérité, de croissance, je vous invite à voter pour le nouveau budget de la République hellénique pour 2013, car ce budget n'est pas seulement synonyme de chiffres, mais il est une voie unique permettant de sortir de la crise. C'est la porte que nous sommes invités à passer pour que débute notre parcours commun vers un avenir que nous bâtirons – sans aucun doute – à la fin de ce parcours difficile, tous ensemble.

Je vous remercie.

November 9, 2012