Discours du ministre des Affaires étrangères Nikos Dendias, au Parlement hellénique :
1. Débat unique et vote sur le principe des articles et de l'ensemble du projet de loi : « Ratification du Protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'adhésion de la République de Finlande ».
2. Débat unique et vote sur le principe des articles et de l'ensemble du projet de loi : « Ratification du Protocole au Traité de l'Atlantique Nord sur l'adhésion du Royaume de Suède ».
Monsieur le Président, merci beaucoup. J'ai choisi de prendre la parole après les rapporteurs et non à la fin du débat comme d'habitude, car le ministre délégué aux Affaires étrangères, M. Varvitsiotis, fera à la fin l’intervention de clôture.
Toutefois, j'ai pensé qu'il serait utile de dire quelques mots au milieu du débat et avant que les représentants parlementaires ne prennent la parole.
Mais je voudrais commencer par évoquer les trois grands hommes de culture que notre pays a perdus, Dimitris Pandermalis, Irini Papa et Kostas Kazakos.
Je pense que tous les trois ont apporté une excellente contribution au domaine de la culture. Je pourrais en dire long sur chacun d'entre eux individuellement. Mais je pense que tout ce que je peux dire pour leur rendre hommage serait insuffisant.
Je voudrais également rappeler à la Délégation nationale l'anniversaire du décès d'un ministre, d’un ministre des Affaires étrangères, qui a apporté sa contribution à notre pays.
Je me réfère à Yannos Kranidiotis. Il est bon, chaque année, à l'occasion de l'anniversaire de sa mort, survenue alors qu’il était au service de son devoir national, de se souvenir de sa contribution.
Je voudrais ensuite souhaiter la bienvenue, au nom du gouvernement, à l'Ambassadeur du Royaume de Suède et à la chargée d’affaires de la République de Finlande à la session plénière du Parlement grec. Leur présence en plénière en ce jour important nous réjouit.
Et ce jour est important car la République hellénique, à travers l'écrasante majorité des partis et des députés, accueille la Finlande et la Suède dans l'alliance de l'OTAN.
Deux pays partenaires et amis dans la famille européenne, deux pays dont la présence renforcera l'Alliance de deux manières. D'une part, leurs capacités militaires avancées contribueront à renforcer les capacités opérationnelles de l'Alliance de l'Atlantique Nord, ce qui revêt une grande importance dans la conjoncture actuelle.
Mais je voudrais souligner que pour la République grecque et, je pense, pour la société grecque aussi, il y a une autre chose, peut-être même plus importante. Que leur adhésion fera augmenter le nombre de pays au sein de l'Alliance de l'Atlantique Nord qui souscrivent à un cadre commun de principes et de valeurs tels que ces principes et valeurs sont représentés dans la construction européenne.
La politique étrangère grecque a fait un grand effort pendant une longue série d'années pour que l’attention de l'OTAN soit focalisée sur ce cadre de principes et de valeurs, ce qui, je pense, a été largement réalisé avec succès avec le concept stratégique qui a été adopté à Madrid il y a quelques mois.
Nous, Grecs, pensons que l'OTAN doit mettre en évidence son cadre de valeurs et que c'est précisément à travers ce cadre de valeurs qu'il sera mis en évidence que le comportement transgressif, la remise en cause de la souveraineté de l'espace territorial d'un allié et d'un pays ami ne s’inscrit pas dans les principes de l'Alliance, ce qui permettra justement, à travers l’ensemble de ce cadre de valeurs, de combler la lacune de l'article 5 du Traité qui ne donne pas l’autorisation de faire face à une menace lorsque celle-ci provient d'un pays membre.
Je voudrais également me référer à deux ou trois choses qui ont été dites dans cette salle et y apporter des réponses. La première est la question soulevée par le représentant du président du PASOK-KINAL concernant la planification énergétique du pays d'une part et le fait que le pays n'avait pas prévu le « mémorandum » turco-libyen.
L'expression utilisée par le représentant du Président du PASOK-KINAL était plus acerbe par rapport à l’expression que j’ai utilisé « il n'avait pas prévu » ; je choisis de ne pas l'utiliser.
En ce qui concerne la planification énergétique, je pense que l'on peut reprocher beaucoup de choses à la Grèce, mais on ne peut pas lui reprocher le manque de perspicacité.
Et parce que je suis ici pour répondre des actions du gouvernement actuel, du gouvernement Mitsotakis, je voudrais faire référence à un simple fait. Au choix d'Alexandroupolis dans l'accord de 2019 avec les États-Unis. Parce qu'Alexandroupolis est un centre énergétique, stratégique et commercial.
Lorsque j'ai mentionné Alexandroupolis parmi les avantages de l'accord avec les États-Unis signé avec Mike Pompeo au début de l'automne de 2019, tout le monde, dans le meilleur des cas, a été étonné.
La vie est venue prouver en peu de temps l'énorme succès de ce choix. Et nous savons tous qu'Alexandroupolis est le principal port de l'OTAN pour acheminer son assistance à l'Ukraine. La distance jusqu'à Odessa est plus courte que la distance à travers le détroit et aussi, si vous regardez les distances géographiques des autres options, vous comprenez quelle différence cela fait.
Donc, si vous regardez les pipelines, les installations flottantes telles qu'elles sont conçues et la planification générale des services du pays, je pense que vous devez reconnaître cela.
Le fait que l'invasion russe se soit produite au moment où elle s'est produite ne signifie pas que cela annule cet effort qui a donné à notre pays des capacités que les autres pays n'ont pas.
En ce qui concerne le « mémorandum » turco-libyen, auquel je veux me référer spécifiquement, beaucoup de choses se sont passées, mais le gouvernement grec ne l'a pas négligé comme une possibilité.
Je tiens à préciser et je voudrais que cela soit inscrit dans le procès-verbal de ce débat, que nos partenaires et amis avaient été informés en la matière afin que cela soit évité comme possibilité et j’avais rencontré à l'époque le ministre italien des Affaires étrangères, M. Movero-Milanesi, qui était le premier ministre européen que j'ai rencontré.
J'avais rencontré le ministre français Le Drian pour aborder exactement ce même sujet. Je me souviens de la réponse qu'il m'a donnée lorsque je lui ai montré pour la première fois la carte figurant dans le « mémorandum » turco-libyen, il l'a regardée et a dit : « ah, exotique », soulignant l'absurdité juridique de cette histoire.
Et j'avais également rencontré à New York le ministre libyen des Affaires étrangères de l'époque, M. Shiala, qui m'avait explicitement assuré qu'une telle chose ne serait jamais signée par la Libye.
La Grèce a fait tout ce qu'elle pouvait. Ce qui a coûté à la Grèce, mais il ne faut pas attribuer cela à la responsabilité de ce gouvernement, c’est son absence de la Libye pendant des années, ainsi que son absence de la Syrie pendant des années, ainsi que la présence limitée dans le monde arabe pendant des années, ainsi que l'absence de l'Afrique pendant des années et je ne voudrais pas m’étendre plus sur ce point.
Mais tout cela a été largement rectifié sous le gouvernement actuel et le cadre des accords et des alliances est là pour le prouver.
Ainsi, sur ces questions qui ont une dimension nationale, il est bon de ne pas lancer des accusations qui ne sont pas fondées sur la réalité.
Je voudrais également dire quelque chose pour défendre les représentants des deux alliés d'aujourd'hui, et déjà amis et partenaires, la Suède et la Finlande, qui n'ont pas de voix dans l'hémicycle, sur la question de l'extradition.
Il a été dit dans l'hémicycle que la Suède et la Finlande, si j'ai bien entendu, ont signé un accord avec la Turquie en vertu duquel elles extraderont les Turcs persécutés.
Mesdames et Messieurs, je vous ai dit à plusieurs reprises que je suis personnellement, mais je pense que nous sommes tous très fiers de l'édifice européen, un édifice qui est au début de son parcours, qui a 70 ans derrière lui mais qui a encore beaucoup de chemin à parcourir, cela prend des siècles, mais malgré cela il a réussi quelque chose d'unique dans l'histoire de l'humanité, à créer un espace de démocratie et de protection des droits de l'homme qui n'a jamais existé dans l'histoire de la planète.
Par conséquent, si vous lisez attentivement le mémorandum tripartite que la Suède et la Finlande ont signé avec la Turquie, je vous lis bien évidemment la partie concernant les extraditions, où à la fin il est indiqué, et je cite, « conformément à la Convention européenne sur les extraditions ».
Il est donc clairement indiqué, malgré le « chantage », si vous voulez, exercé sur la Finlande et la Suède, que rien ne sera fait en violation de la Convention européenne sur les extraditions.
Il ne faut donc pas dire des choses qui sont loin de la réalité, car aucun pays de l'Union européenne ne peut renoncer à l'acquis européen commun, qui est notre patrimoine commun de protection des droits de l'homme, et nous, Grecs, si vous voulez, avons toutes les raisons d'être fiers de cet acquis européen, car il inclut la CNUDM. La Convention sur le droit de la mer, qui, nous le savons tous, est l'évangile de notre politique étrangère.
Je suis donc particulièrement fier qu'au nom du gouvernement, avec le ministre délégué aux Affaires étrangères, M. Varvitsiotis, nous proposions aujourd'hui la ratification des protocoles d'adhésion de la Suède et de la Finlande à l'OTAN.
Nous sommes particulièrement heureux car la grande majorité des partis représentant la société grecque y sont favorables, chacun pour des raisons qui lui sont propres.
Je voudrais dire encore une chose en conclusion. Je suis également heureux d'une autre chose aujourd'hui et je voudrais vous en parler. Vous avez tous vu le sondage de l'opinion publique en Turquie qui a été rendu public.
L'opinion publique turque, Mesdames et Messieurs, ne semble pas « avaler » le délire anti-hellénique qui envahit actuellement le système politique turc.
Je regrette de ne pas pouvoir dire seulement les dirigeants turcs, parce que l'opposition turque dit des choses qui sont pires que les choses inacceptables formulées par les dirigeants turcs.
Mais je suis particulièrement heureux que l'opinion publique turque n’ « avale » pas la narration, mais exprime au contraire l'avis selon lequel ces deux sociétés peuvent vivre ensemble à l'avenir et créer une perception unifiée.
Nous rappelons que nous sommes peut-être l'un des derniers pays à croire que la Turquie a encore l'espoir de faire marche arrière et de se tourner vers la structure européenne, en laissant de côté le révisionnisme. Et je pense que l'invasion russe de l'Ukraine prouve par son échec à quel point le révisionnisme est obsolète.
Et c'est dommage, car, je termine par un dernier anniversaire, le Jour de la Croix, le 14 septembre, est considéré comme le jour de la création de la Filiki Eteria à Odessa. C'est un élément qui, à travers la présence du poète Pouchkine, crée un lien entre la Grèce et la vaste tradition culturelle russe.
Que nous n'ignorons ni n'effaçons et qui fait partie de la vaste culture européenne à travers ses poètes, ses classiques, que nous continuerons à lire et à aimer.
Nous espérons donc que la Russie se rendra compte de l'impasse de cette voie, même pour sa propre société et pour son propre peuple. Elle va se retourner et revenir à une logique de vivre ensemble en sécurité et en paix avec l'Europe.
Je vous remercie.
September 15, 2022