Discours du ministre des Affaires étrangères, N. Dendias, à l'Académie diplomatique du Paraguay sur le thème« La politique étrangère de la Grèce dans son voisinage et au-delà : Les liens avec l'Amérique latine, le cas du Paraguay» (Asunción, 09.02.2023

Discours du ministre des Affaires étrangères, Nikos Dendias, à l'Académie diplomatique du Paraguay sur le thème « La politique étrangère de la Grèce dans son voisinage et au-delà : Les liens avec l'Amérique latine, le cas du Paraguay » (Asunción, 09.02.2023)



Votre honneur, Cher Julio, Excellences, Chers étudiants,

C'est un grand plaisir d'être ici aujourd'hui pour m'adresser à un public de jeunes leaders et de décideurs éminents.

Je suis vraiment honoré d'être le premier ministre grec des Affaires étrangères à visiter votre beau et important pays. J'espère que ma visite ici aujourd'hui me permettra de vous donner au moins un aperçu de la politique étrangère de la Grèce, à la fois dans notre voisinage mais aussi au-delà. Et en tant que pays individuel, mais aussi en notre qualité de membre de l'Union européenne.

La Grèce entretient  une amitié de longue date, sincère et étroite avec le Paraguay et les autres pays d'Amérique latine. Et c'est une amitié solide parce que c'est une amitié qui est basée sur des valeurs et des principes communs. Et ce que nous essayons activement de faire aujourd'hui, c'est de renouer le dialogue avec nos partenaires d'Amérique latine, surtout après la crise de la pandémie.

Hier, j'étais en Argentine, avant-hier j'étais en Uruguay, en début de semaine j'étais au Brésil, je me rendrai demain et après-demain au Panama et en Jamaïque. C'est notre effort pour renouer le dialogue avec tout un continent. Et un continent, permettez-moi de le dire, qui a tant à offrir à tous les niveaux, aussi bien dans les relations bilatérales que multilatérales.

Ma visite ici, aujourd'hui, vise à consolider nos relations avec le Paraguay, à « donner corps » à cet effort, selon une expression utilisée.  C'est  l'occasion pour nous de discuter et de promouvoir la seule base solide des affaires internationales, qui est le droit international et, si je puis dire, venant également d'un pays maritime, le droit international de la mer, la CNUDM.

Et permettez-moi d'exprimer mon plus profond respect pour le Paraguay car, bien que vous soyez un pays enclavé, vous avez signé et ratifié l'UNCLOS, la Convention des Nations unies sur le droit de la mer.

Sur le plan politique, nous avons signé aujourd'hui un protocole d'accord pour l'établissement d'un mécanisme de consultations politiques. Et nous nous réjouissons de mettre en place un lien, également, au niveau de nos académies diplomatiques, y compris la signature de l'accord pertinent, qui a eu lieu il y a quelques minutes dans ce bâtiment et dans cette salle. Et permettez-moi de dire, permettez-moi d'exprimer l'espoir de vous accueillir bientôt, cher Julio, à Athènes, en Grèce.

Mais malgré cette absence de visites bilatérales jusqu'à présent, nos deux pays avancent ensemble, dans le cadre des Organisations Internationales. Et je suis sûr que vous le savez déjà, nous nous efforçons tous deux d'obtenir un siège au Conseil de sécurité des Nations unies, avant la fin de cette décennie.

Mais nous avons également des liens dans d'autres domaines. Le commerce, l'environnement. Le Paraguay excelle. Vous avez réussi à produire cent pour cent de votre énergie électrique à partir de sources d'énergie renouvelables. Nous nous sommes classés au huitième rang mondial pour la part des sources d'énergie renouvelables dans le bouquet de production d'électricité et nous espérons seulement pouvoir imiter votre exemple.

Nous nous efforçons de progresser sur d'autres questions liées à la protection de l'environnement, notamment dans le secteur maritime. La Grèce, une nation traditionnellement maritime, accueillera en 2024, avec les États-Unis, la 9e Conférence sur les Océans « Our Ocean Conference » . Une conférence qui ne se concentrera pas seulement sur les océans, mais sur tous les aspects des défis environnementaux actuels afin de garantir un meilleur avenir aux générations à venir.

Et nous espérons que le Paraguay sera représenté au plus haut niveau à cette conférence. Permettez-moi également de dire que le mot « océan », dans sa signification initiale, ne désignait pas l'océan tel que nous le comprenons aujourd'hui. Il s'agit d'un dieu grec qui était associé à la mer. À l'époque, l'océan dans l'esprit des gens était simplement la Méditerranée. Ainsi, dans notre langue, « océan » signifie toujours le concept de la mer ; mais la mer n'est pas dissociée, mais liée aux défis environnementaux globaux auxquels nous sommes confrontés, la forêt tropicale, par exemple. Nous aimerions donc beaucoup étendre notre coopération sur les questions environnementales avec un pays enclavé qui se soucie beaucoup des rivières, comme le Paraguay.

Permettez-moi également de dire que dans notre mentalité collective européenne, l'Amérique latine, votre continent, est considérée comme l'ami et l'allié naturel de l'Europe. Car, indépendamment de la distance géographique, il existe une proximité culturelle indéniable. Permettez-moi d'utiliser ma propre expérience et de dire que je me sens tout à fait chez moi ici, bien que je ne me trouve que quelques heures sur le territoire paraguayen.

Et nous sommes unis par  des liens politiques, culturels, économiques qui ne sont comparables à aucun autre continent du monde. La réunion UE-CELAC qui s'est tenue à Buenos Aires en octobre dernier en est une preuve tangible. Et nous voyons clairement que cette relation n'a pas encore atteint tout son potentiel. Nous sommes donc tout à fait disposés à travailler dans cette direction.

Dans ce cadre, je voudrais esquisser les grandes lignes de la politique étrangère de la Grèce dans notre environnement actuel. Une politique qui est façonnée par l'appartenance de la Grèce à l'UE, comme je l'ai déjà dit, mais aussi à l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, l'OTAN.

Comme vous le savez, il y a une instabilité croissante dans notre grande région, alimentée principalement par des agendas révisionnistes. Depuis l'invasion russe de l'Ukraine, l'Europe connaît, à l'intérieur de ses frontières, une guerre après plusieurs décennies. Cela a d'énormes répercussions sur le secteur de l'énergie, sur le secteur alimentaire, sur les chaînes d'approvisionnement. Cela affecte le monde entier.

Nous, la Grèce, avons clairement condamné l'invasion de l'Ukraine. Comme nous le ferons, dans tous les cas de ce genre, nous sommes toujours du côté du droit international. Et nous avons prouvé que nous étions un défenseur déterminé de la paix dans le monde entier, un allié fiable, un pilier de la stabilité à la fois dans notre proche voisinage, les Balkans, mais aussi en Méditerranée orientale, au Moyen-Orient, en Afrique du Nord.

Nous sommes également fiers d'être une bastion de la démocratie. Nous croyons sincèrement que le respect du droit international, y compris le droit international de la mer, et la coopération multilatérale sont des instruments clés pour atteindre l'objectif de paix, de stabilité et de démocratie.

Depuis 2013, la Grèce a créé un réseau dynamique de mécanismes de coopération trilatérale avec les pays de notre région. Et ces mécanismes trilatéraux, à ce jour, ont porté leurs fruits dans de nombreux secteurs. Et nous avons activement encouragé le dialogue et créé des synergies mutuellement bénéfiques avec nos voisins et partenaires de confiance. Permettez-moi d'en citer quelques-uns : Israël, l'Égypte, Chypre, les Émirats arabes unis. Et nous avons également fait de même avec nos alliés des Balkans.

C’est justement dans cet esprit que nous avons progressé, au cours des trois dernières années, en délimitant nos zones maritimes avec l'Italie et l'Égypte, conformément aux dispositions de la CNUDM. Et permettez-moi de dire que c'était plus facile à dire qu'à faire. Car nous négocions avec l'Italie depuis un demi-siècle, 50 ans, et nous négocions avec l'Égypte depuis 35 ans. J'étais donc très fier d'apposer ma signature au nom de la République hellénique sur ces accords.

Mais je dois dire que notre voisinage, malheureusement, est encore confronté à de nombreux défis. Des acteurs déstabilisateurs et agressifs cherchent toujours à mettre en œuvre des agendas révisionnistes. Sous cette pression, mon pays reste calme mais ferme.

Toutefois, permettez-moi de dire que les récents tremblements de terre catastrophiques en Turquie et en Syrie ont montré, par les réactions des sociétés grecque et turque, que les sociétés et les personnes sont beaucoup plus proches que ne le pensent parfois leurs dirigeants. Et encore une fois, permettez-moi de répéter que nous, la Grèce, continuerons à soutenir les peuples turc et syrien dans leurs moments difficiles.

Mais dans l'ensemble de la scène internationale, la paix, la démocratie, l'État de droit, les droits de l'homme, sont le seul moyen d'assurer la stabilité et la prospérité pour tous. Et permettez-moi de vous dire qu'il vous appartient, en tant que jeunes diplomates, de poursuivre dans cette voie, dans l'intérêt de votre pays, de votre société, de tous les peuples de ce monde.

Et je vous suis profondément reconnaissant, cher Ministre, mais aussi aux étudiants, de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous ici aujourd'hui. Et permettez-moi de vous souhaiter le meilleur pour votre avenir en tant que fiers représentants de votre beau et important pays.

Je vous remercie.

February 10, 2023