Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Chers collègues,
C’est pour moi un très grand honneur de soumettre, au nom du gouvernement de Mitsotakis, ce projet de loi au vote du Parlement hellénique, lequel prévoit l’exercice du droit de notre pays d’étendre ses eaux territoriales de 6 à 12 milles nautiques dans la mer Ionienne et les îles Ioniennes jusqu’au Cap Τénare.
De cette façon, notre espace de souveraineté nationale s’étend à plus de 13 000 kilomètres carrés. C’est la première fois depuis 1947 que le Parlement national est appelé à voter l’extension de notre espace de souveraineté nationale.
Il s’agit – je le répète – de l’exercice de notre pleine souveraineté nationale et non d’une partie de droits souverains.
Le gouvernement a procédé à ce geste d’une importance majeure, en exerçant le droit inaliénable de notre pays, en vertu de l’article 3 de la Convention des Nations Unies de 1982 sur le droit de la mer, lequel constitue aussi un élément, une règle du droit international coutumier.
Le projet de loi a été soumis au parlement suite à la publication du décret présidentiel sur la fermeture des baies et le tracé de lignes de base droites dans la mer Ionienne et les îles Ioniennes jusqu’au Cap Ténare dans le Péloponnèse.
En vertu aussi de l’article 1, paragraphe 2 du projet de loi, la République hellénique se réserve le droit d’exercer dans d’autres régions aussi de son territoire le droit d’étendre ses eaux territoriales, à tout moment qu’elle juge opportun.
Je voudrais ici donner quelques précisions car il y a eu toute une discussion sur les questions suivantes : où, comment, quand, qui, quoi. Mesdames et Messieurs, la Grèce se prépare et se réserve le droit d’étendre ses eaux territoriales, où elle veut et quand elle le juge opportun.
Bien évidemment, je comprends que le regard se tourne vers la Crète car c’était là-bas que le protocole d’accord avec l’Egypte a été signé. Toutefois, nous limitons notre droit national si nous parlons seulement de la Crète. La Grèce a le droit inaliénable d’étendre ses eaux territoriales à 12 milles nautiques, où elle le veut et quand elle le veut.
Je voudrais être tout à fait clair à cet égard depuis la tribune du parlement national. Et, en outre, je voudrais saluer la déclaration extrêmement importante et à plusieurs reprises, du ministre de la Russie, Sergei Lavrov, qui qualifie – ce qui est par ailleurs bien évident – de pleinement légal la declaration de la Grèce concernant l’extension de ses eaux territoriales.
Je voudrais également remercier les partis et les collègues car la procédure parlementaire s’est déroulée à ce jour dans un climat d’unanimité nationale, sans les altercations insipides habituelles et les manigances servant les intérêts des partis.
Le consensus national sur les principaux axes stratégiques de la politique étrangère de notre pays, a été par ailleurs confirmé lors de mes rencontres privées avec les représentants de tous les partis du parlement.
Le respect du droit international et de la légalité internationale constitue un principe intemporel. Il est un point de référence constant de la politique étrangère grecque.
Je voudrais toutefois dire qu’il existe encore une dimension. L’UNCLOS a été aussi ratifiée à titre individuel par l’Union européenne. Par conséquent, elle fait partie, et je le répète, de l’acquis communautaire. Non seulement de l’ordre légal national de la Grèce. Ainsi, elle est contraignante pour l’ensemble des pays de l’Union européenne et pour l’Union européenne elle-même en tant qu’entité autonome.
Et notamment dans une région et à une époque marquée par d’importants bouleversements, l’application tangible des dispositions du droit international, y compris du droit de la mer, est d’autant plus importante.
En soumettant au vote du parlement hellénique le projet de loi sur l’extension des eaux territoriales en mer Ionienne, nous faisons encore un pas en avant vers la mise en œuvre de notre plan national concernant les zones maritimes du pays. L’extension intervient tout de suite après la conclusion d’un accord sur la délimitation des zones maritimes avec l’Italie et l’Egypte et de notre accord avec l’Albanie concernant les modalités de gestion de ce dossier.
Par conséquent, à travers ce projet de loi en cours de discussion, notre pays figure désormais parmi les pays ayant fait usage de la clause y relative de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.
Ce projet de loi vient confirmer l’importance des dispositions de ladite Convention à l’égard de tous ceux qui choisissent de ne pas l’appliquer ou qui la négligent. Autrement dit, à l’égard de ceux - qui sont peu nombreux - qui osent agir en dehors du cadre du droit international.
Et à ce stade, je dois me référer notamment à la tactique inacceptable du pays voisin, de la Turquie qui menace de guerre (casus belli) la Grèce si cette dernière exerce ses droits légaux.
L’approche que nous avons suivie, du point de vue technique, pour la délimitation de nos eaux territoriales, mais aussi pour la fermeture des baies qui lui a précédé à travers le décret présidentiel, est tout à fait conforme, chers collègues, avec le droit international de la mer.
Notre pays, comme vous le savez, n’agit pas de manière abusive, il ne convoite pas les droits des autres ; il exerce, bien évidemment, se propres droits à part entière, dans le plein respect de la légalité internationale.
L’extension de nos eaux territoriales en mer Ionienne renforce notre sécurité et élargit notre présence.
Dans le même temps, elle renforce la position internationale de la Grèce, tant par rapport aux pays avec lesquels nous mettons en place un réseau de partenariats dans notre région pour consolider la stabilité et la sécurité, qu’à l’égard de ceux qui ne partagent pas les mêmes principes que nous.
Chers collègues,
Forte, depuis quelques mois, d’une plus grande zone de souveraineté, des plus grandes zones d’exercice de ses droits souverains, la Grèce s’érige en modèle, en modèle de cohérence, d’approche méthodique, de respect de la légalité, d’attachement aux objectifs mais aussi en modèle de confiance.
Je voudrais toutefois à cette occasion aborder brièvement – puisque certains collègues l’ont demandé – la reprise des contacts exploratoires.
J’aimerais premièrement rappeler que le gouvernement a toujours été ferme dans sa volonté en faveur du dialogue et ce, même quand la crise dans nos relations avec la Turquie était particulièrement intense.
Il imposait toutefois toujours les mêmes conditions bien claires. Il demandait à la Turquie de cesser ses activités illégales et de retirer le navire Oruc Reis. Le Conseil européen de décembre a adopté cette même position grecque dans ses conclusions.
Deux mois se sont écoulés depuis le retrait d’Oruc Reis. Deux mois à peu près. Par conséquent, cette condition qui a été imposée par notre pays, a en effet été remplie.
On pourrait dire qu’une occasion de dialogue se présente. Toujours dans le cadre et au niveau des contacts exploratoires. La Grèce assistera à ce dialogue en faisant preuve de bonne foi et dans un esprit de franchise, car notre position nationale préconise le dialogue en tant que moyen de règlement des problèmes, et non le recours à la violence et, certainement pas, les menaces de guerre.
Et, bien évidemment, les contacts exploratoires, le gouvernement l’a à plusieurs reprises affirmé, portent exclusivement sur notre différend relatif à la ZEE et au plateau continental.
Tel qu’il a été prévu et tel que ces contacts se sont déroulés à ce jour, c’est ainsi qu’ils se poursuivront.
Le règlement de ce différend a été par ailleurs explicitement reconnu, tout comme son objet par l’Union européenne dans les conclusions du Conseil européen et, du côté des Etats-Unis par la prise de position officielle du State Department.
En outre, la référence même faite par la Turquie au déroulement de la prochaine 61e rencontre, donne clairement ce sens de continuité au processus qui aura exactement le même objet, comme cela a été le cas jusqu’à présent.
Force est également de rappeler que le dialogue qui commencera de nouveau le 25 janvier ne constitue pas une négociation. Il s’agit d’une étape préparatoire de contacts en vue d’explorer l’éventuelle existence de perceptions communes et de voir dans quelle mesure le terrain serait propice au lancement d’une telle négociation.
Il va sans dire que pour poursuivre ce dialogue, le retour à la désescalade ne doit en aucune manière être compromis. C’est justement cela qui a été affirmé par le Conseil européen qui a signalé qu’une désescalade stable confirmée est requise non seulement pour la reprise des contacts exploratoires mais aussi pour leur poursuite.
Enfin, puisqu’on a beaucoup parlé dans cette salle du rôle de tiers et notamment de l’Allemagne, mais aussi du Premier ministre albanais, je voudrais vous rappeler qu’en effet tout au long de sa présidence l’Allemagne a eu des contacts à différents niveaux avec les deux parties, en promouvant la reprise du dialogue gréco-turc.
Finalement, comme vous le savez, l’accord sur la date de la reprise des contacts exploratoires a été conclu et annoncé après la fin de la présidence allemande.
Et de nombreux pays amis se sont proposés de temps à autre d’accueillir une éventuelle rencontre entre moi-même et mon homologue turc. Et parmi ces pays figure aussi l’Albanie à travers la proposition du Premier ministre albanais.
Toutefois, nous avions en temps utile signalé à toutes les parties citées ci-dessus qu’il faudrait premièrement que les contacts exploratoires reprennent et deuxièmement qu’un nouveau climat s’instaure dans les relations gréco-turques pour que je puisse m’entretenir avec mon homologue.
Telle a été et demeure notre position.
En guise de conclusion, je répète que l’adoption de ce projet de loi par la session plénière du parlement hellénique constitue un pas vers le renforcement de notre arsenal national dans un climat d’unanimité nationale imperturbable.
Avec comme armes supplémentaires, les récents accords conclus avec les Etats-Unis. Et à ce stade j’aimerais me référer au Secrétaire d’Etat américain sortant, M. Pompeo, avec lequel nous avons eu une coopération excellente et lequel a toujours été à l’écoute des positions légitimes de notre pays ; dans le cadre de l’accord avec l’Italie et de celui avec l’Egypte ; en faisant preuve de compréhension à l’égard de la façon de procéder avec l’Albanie et dans le cadre des accords avec les Emirats arabes unis.
Lors de l’extension de nos eaux territoriales, lors de l’extension de notre espace aérien national qui coïncide désormais, bien sûr, dans la région de la mer Ionienne, avec nos eaux nationales. Dans le cadre de la politique des horizons élargis qui sert les intérêts de la nouvelle Grèce des 200 ans.
Je vous remercie beaucoup chers collègues
January 19, 2021