Discours du ministre des Affaires étrangères, N. Kotzias lors de la cérémonie d’attribution de prix par la Fédération des organisations chypriotes d’Amérique (New-York, 21.09.2017)

Discours du ministre des Affaires étrangères, N. Kotzias lors de la cérémonie d’attribution de prix par la Fédération des organisations chypriotes d’Amérique (New-York, 21.09.2017)Ce prix qui m’est décerné par l’Union panaméricaine des Chypriotes – le cœur de Chypre aux Etats-Unis – me fait grand honneur. Un honneur qui me procure une joie particulière.

Je remercie la Fédération des organisations chypriotes d’Amérique pour cet honneur.

Je remercie son Eminence l’Archevêque pour ses propos aimables.

Tout comme M. Christopher, le Président du Comité de coordination pour le combat chypriote.

Enfin, je souhaiterais remercier tout particulièrement le Président Anastassiadis pour ses propos aimables et avec lequel nous avons livré des batailles difficiles.

Chypre a besoin de patriotes et d’actes patriotiques.

Le patriotisme est sans aucun rapport avec le nationalisme extrême et encore moins avec le chauvinisme. Certains font exprès de déformer le sens de ces deux termes, de ces deux attitudes politiques.

Nous entendons par patriotisme, les liens que chaque homme entretient avec l’espace géographique où il grandit ou aimerait grandir, l'espace où chaque citoyen garantit ses droits. L’espace de son existence, son action et son choix démocratique. L’espace dont il considère comme étant siennes la culture, la langue, les us et coutumes, les expressions (de la musique au dialogue). Il s’agit de l’espace qui lui donne une identité et le sentiment d’appartenir quelque part.

Pour les expatriés, des contradictions et dilemmes naissent souvent, car ils peuvent avoir le sentiment d’appartenir à deux patries. Mais pour moi aussi qui ne suis pas expatrié, j’ai le sentiment d’avoir deux patries : ma mère, la Grèce, et ma sœur, Chypre. Ces deux patries constituent un espace culturel quasiment unique. Construit, toutefois, sur deux Etats distincts présentant des particularités. Quiconque ne respecte pas ces particularités, le fait que les citoyens de Chypre et de Grèce garantissent leurs droits, autrement dit leur patriotisme constitutionnel au sein de systèmes étatiques - institutionnels différents, peuvent nuire aux deux patries.

L’exemple le plus caractéristique est celui des événements criminels de l’été 1974 qui ont permis à la Turquie de violer la loi et la légalité internationales, lorsque Chypre était en grande partie démunie, en dépit de l’héroïsme de nos compatriotes, Grecs et Chypriotes. Des événements qui ont marqué ma vie, tout comme les événements des années soixante. Des événements pendant lesquels ma génération a affirmé ses positions politiques.

Le patriotisme est donc lié à un sentiment d’amour pour la patrie, les droits démocratiques y étant corrélés et la culture patriotique. Et en même temps, il est lié à un sens profond de l’internationalisme. Le patriotisme reconnaît également la valeur des autres "patries", le droit de peuples différents d’être eux-aussi fiers de leur histoire, leurs institutions et leurs traditions. De leur culture et leurs coutumes. Il ne respecte pas seulement la différence. Il va au-delà d’une conception étroite de tolérance de la différence. Il s’efforce d’incorporer et d’assimiler certains éléments de cette différence. De cette façon, il enrichit sa propre patrie, la culture, les institutions, les processus démocratiques et les relations dans celle-ci. Autrement dit, il reconnaît la valeur de la différence. D’ailleurs, aucune civilisation et aucun système institutionnel démocratique, aucune valeur et aucun principe ne sont tombés du ciel. Tout a été influencé par des civilisations antérieures, leur héritage ainsi que les aspects positifs de nombreuses civilisations de leur époque. Un mouvement patriotique, une attitude patriotique sont dans le même temps solidaires avec ceux qui aspirent à des objectifs, des valeurs et des principes similaires. Le patriotisme garantit la patrie et l’horizon démocratique, au travers de son internationalisation.

Contrairement au patriotisme, le nationalisme extrémiste ne respecte pas la différence. Il n’admet pas que d’autres peuples puissent avoir une civilisation riche, d’importants éléments dans leur existence. Il ne reconnaît pas l’existence de valeurs dans le mode de vie, le quotidien, les traditions et les rêves de tiers. Ce type de nationalisme est contraire au patriotisme démocratique. Celui-ci considère son identité comme étant, non seulement préférable, mais aussi supérieure à toute autre. Il sous-estime les succès des autres. Il ne considère pas qu'il a quelque chose à apprendre d’autrui, tandis qu’il peut vite se transformer en racisme. Ce dernier soutient que sa civilisation est totalement supérieure aux autres. Que sa prétendue supériorité se base sur plusieurs sources, voire même sur ses propres traits de caractéristique biologiques. La pire forme de déni du patriotisme est l’adoption de visions ultranationalistes de tiers.

Dans l’affaire chypriote, nous avons noté le cas le plus absurde, mais aussi le plus extrême, de nationalisme dans notre région. Ces perceptions sont propres à ceux qui qualifient arbitrairement de nationalisme, en usant des expressions stéréotypes, toute attitude démocratique-patriotique de l’hellénisme, lesquels acceptent et, avec leur attitude, servent le nationalisme turc.

Ce sont ceux qui sont méfiants à l’égard de ce que disent les directions de Chypre et de la Grèce, mais qui acceptent tous les mensonges de l’autre partie. Il s’agit d’un phénomène unique dans l’histoire de l’hellénisme dans son ensemble.

Prenons deux exemples tirés des récentes négociations sur les deux importants traités, mais de longueur limitée, qui oppriment Chypre depuis des décennies. Le Traité des garanties et celui concernant l’Alliance. Certains ont déclaré que toute demande en faveur de leur suppression est une manifestation de nationalisme, voire une politique de l’extrême droite.

A leurs yeux, les mouvements démocratiques pour l’indépendance, les mouvements contre le fascisme ainsi que les mouvements contre l’occupation sont des mouvements de l’extrême droite. Je comprends, par les positions qu’ils soutiennent, que la défense de la patrie est considérée comme contreproductive. C’est une attitude que nous trouvons dans le révisionnisme historique contemporain en Grèce, selon lequel la résistance à la triple occupation de la Grèce au cours de la Seconde guerre mondiale a été la source de tous les maux de l’occupation. Autrement dit, que ces maux n’ont pas été causés par l’occupation elle-même. Toujours selon cette perception, les 300 Spartiates ne devaient pas s’opposer à Xerxès. Aujourd’hui, ils sont allés jusqu’au point de considérer tout rejet de l’occupation de Chypre comme un acte nationaliste ! Il ne reste plus q'ils nous disent maintenant que l’occupation turque et son acceptation est un acte d’une forme particulière d’internationalisme.

En raison de sa taille et de sa position géopolitique, Chypre, après son indépendance, n’est pas devenue un "Etat normal", comme le sont tous les autres Etats membres de l’ONU. Le Royaume-Uni a maintenu ses bases militaires sur l’île et la Turquie a obtenu des "droits" de garantie. Les anciennes puissances coloniales ont maintenu leur présence sur l’île, en leur qualité d’anciennes puissances coloniales et non pas suite à un accord entre le nouvel Etat et les nouveaux amis et alliés. La question qui se pose est simple : la lutte contre la suppression des garanties est-elle une lutte régressive ? Est-elle une lutte nationaliste ? Ou, permettez-moi de formuler la question d’une manière différente : la transformation de Chypre en un Etat normal, constitue-t-elle une demande illégitime ? Force est de rappeler que la notion et le fait d’exiger la transformation de Chypre en un Etat normal a été pour la première fois formulée dans une lettre que j’ai adressée à l’ONU avant la Conférence de Genève II, à travers laquelle j’ai rejeté le texte, aux multiples distorsions proturques, qui a été rédigé par Eide en vue de Genève II. Et, par ailleurs, le S.G. de l’ONU, M. Gutteres, m’a fait l’honneur d’adopter ma formulation.

Les trois puissances garantes ont violé le droit international mais aussi le traité des garanties lui-même. La Grèce a bientôt contribué à rétablir cette digression, tandis que la Turquie enfreint la loi depuis 43 ans, en revendiquant la légalisation et la consolidation de ses actes illégaux.

La question est simple : la défense du droit international est-elle une attitude à la fois patriotique et internationaliste ou bien nationaliste et d'extrême droite ? La réponse est simple : la défense de la patrie et des droits de l’homme, des droits démocratiques est une lutte démocratique. La lutte pour la suppression du passé ottoman quant à l’indépendance de Chypre est démocratique et digne. Le nationalisme, l’anachronisme et l’extrémisme sont des attitudes propres de la Turquie qui veut occuper un Etat tiers et le contrôler, qui veut avoir des « droits » d’intervention. C’est ainsi qu’est la Turquie. Car si elle ne se comportait pas ainsi, elle cèderait aux 17 millions de ses citoyens kurdes au moins une partie des droits que cette dernière revendique pour elle-même et pour les colons turcs à Chypre.

D’un point de vue méthodologique, pour ce qui est du patriotisme, l’attitude de la Turquie n’est pas le principal problème. Elle cherche à protéger ses intérêts, ou ce qu’elle considère comme étant ses intérêts. Le principal problème est le fait que nos compatriotes soutiennent les demandes de la Turquie. Ils les considèrent comme étant évidentes et ils nous invitent à les supporter et à les accepter. Ils présentent cette soumission comme étant un acte contre le nationalisme. En réalité, ils adoptent le nationalisme agressif d’un pays lequel, du point de vue de la démocratie, est à la traine par rapport à Chypre et à la Grèce. En d'autres termes, ils adoptent le nationalisme agressif et réactionnaire turc contre le patriotisme chypriote et grec. Cette question revêt également une importance pour les Chypriotes turcs.

Les Chypriotes turcs vivent depuis 43 ans dans une région occupée par une armée étrangère, l’armée turque. Dans cette région vivent 220 000 personnes dont seulement 95 000 sont des Chypriotes turcs. A cette population correspond aujourd’hui une armée de 43 000 conquérents.

Ceux-ci n’ont pas seulement occupé Chypre, mais ils entravent le développement démocratique de la partie nord de Chypre et exercent une politique similaire à celle exercée sur l’île grecque d’Imvros. Une île qui comptait 11 000 habitants au début du 20e siècle, tous Grecs. Conformément au Traité de Lausanne, l’île devrait être placée sous l’administration autonome des habitants grecs. Toutefois, les gouvernements turcs, n’ont jamais appliqué les accords internationaux. Ils ont violé les droits des habitants d’Imvros et, par conséquent, aujourd’hui des milliers de colons turcs vivent sur l’île et 300 Grecs. Ce n’est que récemment que la Turquie a commencé à respecter ce qui a été convenu.

Certains veulent à long terme faire la même chose à Chypre aussi.

La partie chypriote grecque ne cesse de signaler, et moi aussi, le problème de l’occupation et des réfugiés. Nous devons aussi signaler que seul le retrait de l’armée d’occupation rendra les Chypriotes turcs libres, que la démocratie sur l’ensemble de Chypre et parmi les Chypriotes turcs ne pourra être établie qu’à travers la suppression du militarisme des Turcs dans les territoires occupés de Chypre. L’armée d’occupation turque est un facteur qui entrave aussi le développement de la démocratie dans les territoires occupés de Chypre.

La défense des droits des Chypriotes turcs au sein d’une République de Chypre reconstruite et leur libération de la botte de l’armée turque n’est qu’un grand acte patriotique et internationaliste et il serait absurde de la considérer comme étant un acte nationaliste.

Sauf si certains dans nos deux pays pensent que l’armée turque est la garantie de la démocratie. Même les dirigeants turcs ne soutiennent pas cela, car ils ont arrêté la majorité des hauts officiers de l’armée d’occupation, dont leur commandant, comme étant des putschistes gulenistes. Sommes-nous donc invités à accueillir cette armée d’occupation et de putschistes pour que les "nouveaux rayas" puissent nous certifier que nous ne sommes pas des nationalistes ?

Un exemple de ce type d’attitude d’asservissement est un texte qui soutient que ce ne serait pas grave si nous conférions par écrit à la Turquie le "droit" d’intervention, même dans la partie sud de l’île. Car, soutient-il, la Turquie peut le faire de toute façon à n’importe quel moment. Il s’agit d’un rejet cynique de l’importance du droit international, du système mondial de la légalité et du respect des droits de l’homme et des sociétés. Il nous invite avec cynisme à nous rendre. Autrement dit, il soutient que les Grecs ont eu tort de faire la bataille des Thermopyles, l’Epique de 1940, la résistance à l’occupation et à la junte militaire.

De la même façon, une ancienne personnalité politique chypriote a accusé Kotzias de "nous avoir tendu un piège" avec la question des garanties et des droits d’intervention de la Turquie. Elle ne déplore pas l’occupation, mais sa dénonciation. Elle ne déplore pas le contrôle de la patrie par une force d’occupation étrangère, mais le fait que nous ne la cautionnons pas. Ils nous accusent parce que nous refusons de faire l’autruche.

Mais en vérité, pourquoi ne nous disent-ils pas ce qu’ils veulent exactement ? Le ministre turc des Affaires étrangères a déclaré devant tout le monde à Crans-Montana qu’il souhaite avoir son armée à Chypre pour pouvoir intervenir sur toute l’île lorsque bon lui semble.

Permettez-moi de faire une remarque amicale. Certains, critiquant les amis du nationalisme turc, les présentent comme les partisans d’une « solution quelle qu’elle soit », voire d’une « mauvaise solution ». Permettez-moi de ne pas être d’accord. Toutes propositions – par exemple celles des Turcs – ne constituent pas une solution. En réalité, ce sont des propositions visant à faire perdurer le problème, celui de l’occupation. Autrement dit, une mauvaise proposition n’est même pas une mauvaise solution. Car quel genre de solution promouvrait la mise en œuvre de solutions prévoyant le maintien de l’occupation et des capacités d’intervention de la Turquie ?

Il y a deux ans et demi, ici à New-York, j’ai déclaré très clairement que la Grèce ne voulait pas les garanties à Chypre, ni demeurer une force garante. Que l’on me dise alors pourquoi la non-ingérence dans les affaires intérieures de Chypre et l’abolition de garanties de type colonialistes ne constitue pas un progrès ?

Le gouvernement grec, tout comme le gouvernement chypriote, soutient et valorise le droit international, les règles internationales, les organisations, institutions et régimes. L’ONU se trouve au sommet de ce choix qui est le nôtre. Nous soutenons son œuvre de toutes nos forces. Et tout comme un Etat ne s’identifie pas à l’un ou l’autre gouvernement, de la même façon – voire plus – l’ONU ne peut s’identifier – et cela n’est pas juste – à l’une ou l’autre personne, qui plus est à un conseiller spécial. L’époque où Louis XIV déclarait que l’Etat c’est lui, est bel est bien révolue.

S’agissant de M. Eide, pour citer un exemple, en janvier 2017 à Genève, lors d’une réunion que nous avons eue avec l’ONU, j’ai posé la question de savoir si le conseiller spécial est un médiateur unidimensionnel entre la Turquie et la Grèce, ou bien si sa tâche première est de mettre en œuvre les décisions de l’ONU. Après que l’on m’ait répondu que c’était le deuxième qui prévaut, j’ai demandé pourquoi alors M. Eide ne défend pas les décisions des assemblées générales de l’ONU et du Conseil de sécurité portant sur le retrait de l’armée d’occupation. Sa réponse était qu’ "il n’y a pas de telles décisions". Lorsque nous lui avons montré des copies des décisions de l’Assemblée générale de l’ONU et du Conseil de sécurité, il a déclaré – devant le SG – qu’il ne les connaissait pas. Autrement dit, le conseiller spécial de l’ONU sur Chypre ne connaissait même pas, après deux ans de médiation, les décisions de l’organisation qu’il représentait.

De manière générale, le comportement de M. Eide n’était pas celui d’une personne qui recherchait des compromis honnêtes sur la base des résolutions de l’ONU et du droit international, mais celui d’un acteur qui était convaincu de pouvoir exercer plus de pression sur la République de Chypre, même de manière injuste, que sur la Turquie.

Il est donc étonnant de constater qu’il y a eu des puissances à Chypre qui estimaient que la Grèce n’a pas le droit de s’adresser à l’ONU, ni d’envoyer des lettres à cette organisation en vue de souligner ce qui a été dit précédemment. Comme si la Grèce était un pays à souveraineté limitée et un Etat membre de l’ONU avec des droits limités.

Au cours de ces deux dernières années et demie, je n’ai manqué une occasion de souligner que Chypre a besoin d’une vraie solution. Une solution qui fera d’elle un Etat normal du 21e siècle. Cela signifie un pays avec une souveraineté, une intégrité territoriale et une indépendance dans le cadre du monde actuel interdépendant. Un Etat fédéral normal qui procurera la sécurité maximale aux deux communautés et aux trois minorités. Un Etat qui procurera une sécurité individuelle et sociale, un maximum de droits sociaux et humains. Un Etat qui défendra les principes de la démocratie et les droits du citoyen.

Cet Etat ne sera occupé par personne. Pas même une partie de son territoire. Il n’aura pas d’armée étrangère sur son territoire. Le retrait des forces d’occupation étrangères se fera sous la supervision d’un mécanisme de suivi et de garantie de la mise en œuvre de l’accord convenu sous l’égide de l’ONU. Ses relations avec les deux anciennes « puissances de garantie » seront régies par un pacte de paix et de coopération, sans caractère militaire. Un pacte visant à promouvoir la coopération économique, éducative, scientifique et culturelle.

S’agissant de tous ces domaines, la Grèce a d’emblée soumis ses propositions à l’ONU, aux autres parties impliquées dans les négociations et ailleurs. La République hellénique et la République chypriote ont soumis leurs propositions, contrairement à l’autre partie, la Turquie et la communauté chypriote turque. Ces deux dernières se sont bornées à soumettre à Crans-Montana des documents quasi-identiques, d’une demi-page, dans lesquels ils insistaient pour garantir le contrôle illégal de la Turquie sur l’île. La partie grecque a soumis des propositions sur la question des garanties. Elle a promu une proposition de « pacte de paix » entre Chypre, la Turquie et la Grèce. Elle a formulé une proposition pour le retrait des troupes turques contenant une section sur l’aspect juridique de ce processus sous le titre « Pacte de stationnement provisoire » pour la période du processus de retrait. Par ailleurs, elle a proposé, tout comme Chypre, de créer un mécanisme de supervision de l’application des décisions portant sur le rétablissement de Chypre, le retrait des troupes étrangères, la mise en œuvre des changements institutionnels. Nous avons proposé que ce mécanisme n’inclut pas les forces garantes actuelles. Nous avons souligné que le fait que Chypre soit un Etat membre de l’UE constitue une garantie solide pour tous les citoyens de Chypre.

Nous avons eu la chance que le SG de l’ONU adopte notre idée principale et la développe à sa façon. D'ailleurs, le dernier soir, il nous a distribué un texte à ce sujet, le seul texte que l’ONU a distribué à Crans-Montana. Lorsqu’il l’a présenté, j’ai pris la parole en premier et déclaré que la Grèce était d’accord sur les principaux points. J’ai longuement commenté les aspects positifs de sa proposition. Malheureusement, un troisième acteur a pris la parole, perturbant le débat et entravant l’examen du document remis par le SG de l’ONU. Cette perturbation tout au début de la discussion, ainsi que le refus de la Turquie – à la fin de la discussion – de consentir à la proposition faite par le SG de nous mettre d’accord sur un paragraphe qui comprenait l’obligation de la Turquie de renoncer à tous droits de garanties et d’intervention, ont abouti à l’échec de la Conférence internationale sur Chypre. Une Conférence pendant laquelle la question des garanties et de la sécurité a été instituée comme étant cruciale.

Par rapport à ce qui a été dit précédemment, permettez-moi de faire encore deux commentaires : premièrement, lorsque le SG de l’ONU a proposé l’abolition des "droits" d’intervention de la Turquie et de tout autre pays, l'a-t-il fait pour des raisons nationalistes ? Parce qu’il ne voulait pas de solution ? Car certains ne peuvent pas jouer le rôle d’Hercule en tant que défenseurs de l’ONU et, dans un même temps, nous accuser d’être nationaliste, lorsque nos propositions, s’agissant des questions sur lesquelles la Grèce pouvait et avait le droit – conformément au droit international – d’avoir un avis, coïncident avec celles du chef de l’ONU.

Deuxièmement, d’où ont-ils déduit que la Turquie a fait des propositions positives que nous avons soi-disant rejetées ? Sur ce point, je note le phénomène surprenant de ceux qui n’ont pas écouté – car ils n’étaient pas en mesure d’écouter – des propositions qui n’ont jamais été faites et qui les promeuvent comme si elles étaient les meilleures, alors que nous, qui nous sommes battus pour promouvoir nos propositions, nous sommes heurtés au refus de la Turquie et devenons la cible d’accusations.

Je terminerais, donc, en rappelant que nos propositions étaient démocratiques, patriotiques et profondément internationalistes, car elles libéraient Chypre et les Chypriotes, avant tout les Chypriotes turcs, des troupes d’occupation.

L’adoption de la position turque sur le maintien de l’armée d’occupation turque n’est pas synonyme d’internationalisme, mais de collaborationnisme. Un collaborationnisme que l’hellénisme a connu depuis l’Antiquité. Éphialtès aux Thermopyles n’était ni démocrate, ni patriote, encore moins internationaliste. C’était simplement Éphialtès. Nous continuerons notre lutte en vue de réaliser nos objectifs. Et à la fin, les actes barbares perpétrés au détriment du droit international, des principes de l’ONU et des droits de tous les Chypriotes – actes que certains considèrent comme étant une solution – ne passeront pas. Chypre, la République de Chypre, la Chypre fédérale européenne vivra et continuera son parcours dans l’Histoire, fière et belle comme Aphrodite. Et moi je serai fier d’avoir été une partie de cette belle histoire.

September 22, 2017