Je tiens à remercier le St Anthony's College de l'invitation et de notre coopération de longue date. C'était ici où, il y a quinze ans, nous avons commencé avec Kalypso Nikolaidis le premier séminaire organisé à l'Oxford University sur la gouvernance mondiale.
Je vous remercie de cette invitation qui m’offre l’occasion de parler pour la première fois après la prise de mes fonctions, de la politique étrangère grecque et ce, en une période de crise.
A travers l'étude des relations internationales et notamment des expériences en matière de politique étrangère des plus petits Etats - et plus particulièrement des Etats européens - je suis parvenu à la conclusion que, tout comme dans la répartition internationale du travail chaque Etat doit trouver la niche de marché où il pourra maximiser sa productivité et avoir une présence très marquée, dans la diplomatie internationale, chaque Etat doit également optimiser son potentiel et ses capacités dans des thématiques spécifiques, dans des régions géographiques, ainsi qu’au niveau de ses moyens. En d'autres termes, un Etat doit disposer des capacités indispensables qui lui permettront d’accomplir ses trois devoirs dans les domaines suivants :
(a) identifier les problèmes dans l'environnement international, régional et dans son voisinage immédiat.
(b) élaborer et formuler des solutions, des plans, des actions et des alliances alternatives, et,
(c) rassembler le plus grand nombre possible de forces intellectuelles et de ressources en vue d'assurer la mise en œuvre la plus efficace des projets en matière de politique étrangère en général ou de politique dans un domaine spécifique, des projets qui seront réalistes et dont la réalisation serait la plus rentable en termes de coût et d'avantages.
A cette fin, il est indispensable de procéder comme suit:
1. Parvenir à une compréhension la plus approfondie et multidimensionnelle possible des changements opérés dans le monde contemporain, au sein de l'UE elle-même et dans son voisinage, en vue d'acquérir les connaissances adéquates et pouvoir comprendre et réfléchir sur les expériences acquises.
2. Etablir un lien entre la politique étrangère - en son sens stricte - et les autres négociations internationales, telle que la négociation menée actuellement sur la dette grecque. Cela signifie que la Grèce à travers sa politique étrangère essaye de supprimer et non pas de créer de nouveaux problèmes et, si cela n'est pas possible, elle essaye donc de les gérer de la manière la plus efficace possible en faisant preuve de retenue et de modération et en mesurant ses paroles. Elle essaye de résoudre les problèmes au niveau national avant que ceux-ci soit soulevés au niveau le plus élevé, par exemple à celui des Premiers ministres au Conseil européen. L'objectif est de donner la possibilité au Premier ministre grec de se concentrer sur les priorités et ses fonctions.
3. Les acteurs et les organes de la politique étrangère se considèrent comme un système institutionnel qui est au service de la lutte contre la pauvreté de la population, ils constituent, c'est-à-dire un moyen pour assurer de nouvelles possibilités au niveau de la politique économique et sociale, pour pouvoir mieux comprendre les inquiétudes du peuple face à l'avenir et créer un nouveau mouvement de solidarité avec le peuple qui est mis à rude épreuve.
Ces nouvelles possibilités constituent les instruments pour la conclusion d'accords potentiels, dès aujourd'hui, visant à renforcer la coopération économique avec des pays tiers aussitôt que les problèmes de liquidité sont résolus. A travers les rencontres effectuées, nous avons d'ores et déjà créé des champs de coopération dans les domaines de l'économie et du développement avec les Etats-Unis, ainsi qu'avec les Etats membres de l'UE, avec la Russie et la Chine, avec l'Egypte et les Emirats arabes unis, avec les Balkans et la Turquie. Avec tous ces pays et régions nous avons signé des accords et des précontrats sur le développement ultérieur de la coopération économique, nous avons mis en place de groupes techniques et économiques sur la promotion des investissements et nous avons mis en route de grands projets portant même sur la fourniture de liquidités à notre pays. Il existe des accords sur des projets majeurs dans le domaine des infrastructures, tels que les chemins de fer et les pipelines énergétiques ou les terminaux de transbordement de GNL, des projets qui contribuent à l'interconnexion plus étendue et plus stable de la Grèce et des Etats de l'Europe du sud. Dans ce contexte, je suis très optimiste à l'égard des perspectives de la Grèce après la conclusion d'un accord sur les questions de la dette et de la liquidité. Et cela préoccupe ceux qui veulent que ce gouvernement qui est élu par le peuple et qui œuvre au profit du peuple échoue.
4. Notre objectif est de développer les capacités de la Grèce dans le triptyque négociation, consultation et arbitrage. La Grèce peut et doit se spécialiser de plus en plus dans ces domaines. Les Israéliens, les Palestiniens, les Iraniens et les Européens, les Ukrainiens et les Russes, peuvent venir dans notre pays, sur l'une des centaines de nos îles et s'entretenir en toute tranquillité en vue d’aborder les grands problèmes qui les préoccupent. La Grèce ne fait pas partie et elle ne veut pas faire partie de ce genre de problèmes, sa volonté étant de contribuer de manière déterminante à leur règlement. Nous n'avons jamais été une puissance coloniale, et nous entretenons avec ces pays des liens multiples culturels, historiques, traditionnels tout en partageant les mêmes aspirations, ce qui nous confère des capacités particulières.
5. Plus particulièrement, nous disposons de capacités qui nous permettent de coopérer avec les pays émergents tant pour répondre à nos besoins que pour devenir le pont entre ces pays et l'Occident auquel nous appartenons. La Grèce comprend que dans le monde contemporain, dans de nombreuses régions, il existe des tas de pierres. Mais elle n'utilise pas ses pierres pour lapider, ni pour construire des murs de séparation. Elle veut construire des ponts de compréhension et de communication, de coopération et de perspective.
Nous traversons une époque transitoire. Dans un sens, toute époque comporte ces caractéristiques transitoires. Le monde connaît de grands changements, tandis que le centre de gravité se déplace de l'Occident vers l'Asie du Sud-est, du « lac » de l'océan atlantique à celui du Pacifique. De nouveaux problèmes, de nouveaux défis émergent. Les sociétés de l'Europe, à l'encontre de celle des Etats-Unis, sont en train de vieillir. Autour de l'UE il existe de nombreux pays où les jeunes représentent une très grande partie de la population, des dizaines de milliers de jeunes qui aspirent à un meilleur avenir. Nos sociétés sont confrontées à des problèmes multiples, dont deux portent sur la démographie et le chômage, ce qui exerce des pressions sur l'Etat social. La solution à ce problème ne réside pas, bien évidemment, dans la suppression de l'Etat social, mais dans l'augmentation de la productivité et, notamment, dans l'adhésion dans notre société de jeunes talentueux venant du monde entier qui insuffleront une nouvelle dynamique à cet effort visant à régler ces problèmes.
Nous vivons en une époque où l'idéologie ne joue pas le même rôle qu'elle jouait pendant la guerre froide. Désormais, le rôle de la géopolitique est plus important par rapport au passé.
Notre monde est tiraillé entre ses besoins actuels et les exigences futures de la nature elle-même qui est la mère de nous tous. Au cœur de ce conflit se trouvent nos sociétés qui se distinguent par rapport à leur façon d’envisager leur avenir. Leurs priorités sont axées soit sur l'homme, le bonheur et la prospérité, soit sur les chiffres et les taux de profit, soit sur le développement durable et sûr dans un contexte de démocratie et de liberté, soit sur une politique d'opportunisme à grand risque.
Comme je l'ai signalé il y a trois ans dans un discours que j'avais prononcé ici à Oxford, l'UE tend à passer d'un système axé sur l'Etat de droit et la recherche de compromis, en une nouvelle forme d'empire où la bureaucratie de Bruxelles, les marchés financiers et Berlin (appelé Nouvelle Rome), jouent un rôle spécial et ont des droits bien précis. En fait, les nouveaux mécanismes de gestion de la crise suppriment l'égalité juridique des Etats membres et créent une chaîne de puissance classique en faisant disparaitre l'acquis social et les avantages sociaux. L'élément économique transcende l'élément politique et le citoyen constitutionnel est remplacé par l'acteur du marché.
Dans ce contexte, deux objectifs deviennent de plus en plus importants. Des objectifs qui, à première vue, sont contradictoires: sauvegarder les droits démocratiques, sociaux et les droits de l'homme et assurer la sécurité et la stabilité. Nous pensons que la politique étrangère de la Grèce peut joindre ces deux objectifs, d'une part à travers le respect des droits susmentionnés dans toute la région des Balkans, de l'Afrique du nord et du Moyen-Orient et, d'autre part, à travers l'instauration de la sécurité et de la stabilité.
Dans la réalisation de ces objectifs, dans la lutte contre ces problèmes mondiaux, tels que l'immigration et la protection de l'environnement, l'UE doit prendre en considération deux critères positifs : (a) toute action menée par l'UE doit servir d'exemple illustrant le rôle constructif qu'elle peut jouer dans le règlement de ces problèmes. Elle doit transmettre un message positif dans tous les sens, à savoir que l'Europe apprend, connaît et peut trouver les solutions appropriées au niveau mondial et, (b) que le modèle européen est bien vivant, se renouvelle et se développe et peut répondre aux problèmes contemporains d'une façon qui satisfasse ses sociétés.
L'UE peut et doit contribuer dans le sens de l'atteinte d'une solution constructive à cette contradiction. Nous croyons en une Europe démocratique, sociale, en une Europe de la justice, de l'égalité et de la participation de tous les Etats membres, avec les mêmes droits, au sein de son système institutionnel, nous croyons en renforcement de la coopération politique et de l'intégration, en respect des traditions, des choix, des besoins des Etats, à travers la création d'une municipalité européenne, nous croyons en le respect de la Charte européenne des droits fondamentaux que la Troïka a enfreinte avec une telle facilité.
Afin que l'UE puisse entreprendre ce parcours positif, elle doit surmonter ses faiblesses qui m’ont tant surpris depuis les quelques mois que j'exerce mes fonctions de ministre. Elle doit apprendre à voir plus loin que le bout de son nez, comme nous disons nous les Grecs. Elle doit apprendre à gérer son avenir non pas à court terme, comme une assemblée d'actionnaires, mais à un horizon plus lointain, en engageant une réflexion plus approfondie sur les conséquences de ses choix et de ses actions. L'UE doit de nouveau apprendre à réfléchir à long terme sur les conséquences de ses actes et dans chaque choix qu'elle fait, elle doit s'inspirer des valeurs et des visions d'un Etat démocratique.
Nous comprenons tous, par exemple, qu’une union peut valoriser des outils complexes et polyvalents dans le domaine de sa politique étrangère. Des outils de type « la carotte et le bâton » que l’on impose à des tiers, des sanctions renforcées. Mais ces outils, lorsqu’ils sont utilisés, doivent viser à attirer l’autre partie à la table des négociations et à instaurer des valeurs et des principes et non pas à détruire l’autre partie, ni à désorganiser ou à déstabiliser.
Il est très important de ne pas limiter la vision européenne à ce genre d’outils, qu’ils soient nécessaires ou pas. Il est inadmissible que les nouvelles générations de nos pays entendent du matin au soir les mots : punition, mémorandum, répression. Pour nous, l’UE est une notion positive, une vision positive. Elle ne peut se borner à certaines pratiques négatives.
En d’autres termes, l’UE d’aujourd’hui doit revenir à ses valeurs fondatrices, qui ont été enrichies par l’expérience de tant de décennies, et notamment aux réussites enregistrées tout au long de sa vie, afin qu’elle puisse gérer avec succès le triangle d’instabilité qui se créé.
Mon analyse sur le triangle de stabilité et d’instabilité a été répétée maintes fois et a dépassé les frontières nationales. Elle constitue une constante dans notre analyse de la politique étrangère de la Grèce sur la situation dans notre région élargie.
Dans cette région, deux puissances d’un genre différent s’affrontent : celles de l’instabilité et de la déstabilisation et celles de la stabilité. Notre région a la forme d’un triangle. Au sommet se trouve l’est de l’Ukraine et à sa base, nous avons d’un côté la Libye et de l’autre le Moyen-Orient. Dans le cadre de ce triangle, des puissances sont donc en présence et ces puissances non seulement affaiblissent le processus démocratique, mais aussi sapent l’existence même des Etats. Des statuts d’Etats obsolètes font de nouveau leur apparition par le biais de l’utilisation de nouvelles technologies et moyens, qui sont en rapport tant avec la guerre, qu’avec la mise en valeur de l’image : nous nous référons à la réapparition de la souveraineté des races, comme en Libye et le cas du Califat au Moyen-Orient. Il s’agit de régions où les droits de l’homme sont bafoués. Dans le même temps, il existe dans le même espace des régions sans aucune structure d’Etat. Et c’est dans cette vacuité qu’évoluent des millions de réfugiés et victimes de la guerre.
Si en Libye, qui a tant préoccupé la communauté internationale, il y a des déplacements de 1 – 2 millions de réfugiés, 12 millions de réfugiés quittent la Syrie. Sans parler des millions de réfugiés d’Afghanistan et du Pakistan (cette année en Grèce seulement, 200 000 réfugiés sont venus de Syrie et 300 000 d’Afghanistan et du Pakistan). Peut-on un instant s’imaginer ce qui se passerait en Méditerranée et en Europe si l’Egypte, avec ses 95 millions d’habitants, dont plus de 65 millions sont des jeunes et en règle générale des chômeurs, est déstabilisée ? Avec, en toile de fond, la guerre civile au Soudan et le non-Etat de la Somalie.
Si je dis tout cela, c’est parce que nous prenons toutes les mesures nécessaires en vue de soutenir une politique de stabilité et de sécurité en Méditerranée orientale. Nous prenons des mesures spéciales pour la stabilité en Egypte, tout en soutenant sa démocratisation. Nous créons une ligne de coopération Grèce – Chypre – Egypte, une coopération dans le sens que je viens de vous décrire. La deuxième ligne de stabilité est tout aussi importante : la coopération entre la Grèce, Chypre et Israël, où nous développons dans le même temps la politique de soutien de la Palestine, avec toute une série de mesures dont je viens de convenir pas plus tard qu’avant-hier avec M. Malki, le ministre des Affaires étrangères de la Palestine.
Nous avons proposé, en outre, à la Turquie et à l’Italie, de former une troisième ligne de coopération dans le triangle concernant des questions de sécurité et de stabilité, afin que nous puissions contribuer à la création de piliers de stabilité solides de ces trois lignes – qui ont la Grèce en leur centre – et éviter les vagues d’instabilité qui engendreront des vagues de réfugiés encore plus incontrôlées et permettront aux djihadistes de gagner du terrain.
De l’autre côté du triangle, la politique étrangère de la Grèce soutient la solution à la crise en Ukraine sur la base des principes du droit international, de la sauvegarde de la souveraineté et de l’indépendance de l’Ukraine et des accords de Minsk. Sur la base de la reconnaissance des droits qui émanent de la différence linguistique et ethnique et de l’organisation, respectivement, de l’autonomie administrative en une Ukraine fédérale.
La région de Marioupol est cruciale pour la politique étrangère grecque. Plus de 150 000 Ukrainiens d’origine grecque y vivent. Nous sommes fiers de l’aide que nous avons offerte à cette région : denrées alimentaires, médicaments, mise sur pieds d’une équipe médicale, aide pécuniaire et transfert des familles en Grèce pour leur protection. Nous sommes fiers car nous sommes la seule puissance occidentale qui a le courage et qui a pris le risque de conserver sa représentation diplomatique dans cette région. La seule puissance occidentale qui brandit bien haut le drapeau de nos visions et de nos valeurs sur un champ de bataille.
Nous sommes une puissance pacifique, qui prend des risques aussi bien dans les bons que dans les mauvais moments pour défendre les droits de l’humanité, pour imposer le droit international, pour que tous les Etats puissent fonctionner sur la base du principe de la règle de droit et de la culture européenne des compromis. Le comportement et la pratique du gouvernement de l’Ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM) ne sont pas dictés par ces principes. La responsabilité est partagée entre elle-même et les puissances de l’Occident, qui, lors de chaque crise dans ce pays, proposent son intégration plus directe, dans des conditions moindres, au processus euro-atlantique. Au contraire, nous pensons que certains à Skopje ont appris à ne pas communiquer, à ne pas œuvrer dans le sens de l’entente avec leurs voisins, car ils « exerceront des pressions sur eux ». Par la suite, d’autres leur ont appris à ne pas parvenir à un compromis au niveau intérieur avec la communauté albanaise, car ils « les ramèneront à la raison ». Après ces choix, il était logique que les dirigeants de ce pays procèdent de leur propre chef aux compromis et ententes nécessaires.
Nous œuvrons en faveur de la paix et de la stabilité en ARYM. Nous souhaitons sa présence à tous les fora internationaux ainsi que la résolution de tous ses problèmes. Contrairement à une partie de ses dirigeants, nous avons fait plusieurs propositions concernant la question du nom et un grand pas en avant en faveur d’un compromis. Nous avons proposé et sommes convenus d’élaborer un programme commun de mesures de confiance. Nous avons fait une proposition très intéressante sur le mode, le processus de résolution de la question du nom du pays ami. Le principal pour elle étant de renoncer à l’irrédentisme et aux projets chauvins d’une « grande » ARYM.
Il s’agit de projets similaires – et tout aussi contreproductifs – aux projets de ceux qui rêvent d’une « grande » Albanie et produisent des cartes [d’une «grande» Albanie] qui incluent des parties de la Grèce du nord et des îles de la mer Ionienne, notamment du nouveau partenaire gouvernemental, le parti pour la Justice, l’Intégration et l’Unité (PDIU) qui s’intègre dans la lignée des partis nazis, de l’époque où la région était sous occupation nazie.
La Grèce est le pays qui accueille le plus grand nombre d’Albanais dans le monde. Ils participent à un gros pourcentage du PIB. Nous avons de la chance de les avoir dans notre société. Dans nos universités, les enfants d’immigrés albanais comptent parmi les meilleurs étudiants chaque année. Récemment, nous avons promu une nouvelle loi qui leur accorde la citoyenneté. Notre pays, notre gouvernement est l’un des pays les plus amicaux et les plus justes au monde envers les immigrés.
Avec l’Albanie, nous sommes unis par un riche passé commun, des rêves et des perspectives communs. Il y a beaucoup de problèmes qui datent du passé, des problèmes qui sont en rapport avec les points de vue des dirigeants de ce pays, comme le non application des accords convenus, le refus d’appliquer les dispositions du droit international, la violation des droits de la minorité grecque indigène. Nous avons la volonté de résoudre les problèmes et de surmonter les difficultés. Nous planifions de proposer très bientôt une solution pour résoudre tous les problèmes, une solution réaliste, prometteuse et intéressante pour les deux peuples, loin de nationalismes de type balkanique et de comportements visant à reproduire plus d’histoire que celle que la région ne peut consommer.
Nos relations avec la Bulgarie et la Roumanie sont bonnes et nous continuons dans ce sens. La promotion de notre coopération tripartite est un pôle de stabilité dans la région. Il en va de même de nos relations avec l’Italie, avec laquelle nous avons préparé le premier accord sur la ZEE et le plateau continental.
La relation que la Grèce entretient avec Chypre est cruciale. Nous pensons, souhaitons et soutenons une Chypre véritablement indépendante et souveraine. Une Chypre fédérale, sans le fardeau de la honte que constitue l’occupation de territoires de l’île – et par extension de l’UE – par une puissance étrangère.
Nous soutenons et soutiendrons une solution honnête à la question chypriote, sans pressions extérieures. Une solution qui permettra aux Chypriotes turcs de se sentir sur l’île comme chez eux et aux Chypriotes grecs de se sentir en sécurité. C’est pourquoi, nous soutenons le plus de droits possible pour les Chypriotes turcs et des trois minorités et d’un autre côté le plus de sécurité possible pour les Chypriotes grecs. Le problème structurel de Chypre n’est ni la répartition des ressources, ni les différends – quels qu’ils soient – de ses communautés. C’est l’occupation. La présence de 43 000 soldats turcs, 1 pour 4 habitants dans la partie occupée de Chypre, soit 1 sur 2 Chypriotes turcs restants, puisque la plupart ont émigré.
Nous voulons une solution globale et véritable à la question chypriote et nous soutiendrons tout processus. Mais en aucune façon nous ne voulons une solution virtuelle pour nous moquer de nous. Nous ne voulons pas non plus être prisonniers de l’histoire. C’est pourquoi, nous proposons une solution véritable, concrète, c’est pourquoi nous soutenons les pourparlers bicommunautaires, c’est pourquoi nous souhaitons en finir avec le statut des puissances garantes. Dans une Chypre, membre de l’UE, il n’y a pas besoin de troupes étrangères. D’ailleurs, quelle solution est digne de s’appeler ainsi lorsqu’elle continue d’imposer leur présence ? Quelle solution est digne de s’appeler ainsi lorsqu’elle prétend avoir tout résolu en ne changeant rien à l’état des choses ?
Lors de ma récente visite en Turquie, j’ai proposé à mes interlocuteurs de travailler systématiquement en faveur d’un règlement de la question chypriote. Cela signifie la fin de l’occupation et des violations des puissances garantes.
La Turquie est un grand pays voisin situé à l’est de la Grèce. Un pays avec lequel nous avons de nombreux points communs au niveau de la culture et de l’histoire récente. [Des bons et des mauvais]. Allah, comme je l’ai dit à Ankara, nous a placés dans le même endroit de la terre. Nous devons vivre ensemble. Créer les conditions de coopération. La solution à la question chypriote et la fin de toutes interventions ou menaces libèrera de nombreuses forces de coopération entre les deux peuples.
Afin de pouvoir créer un meilleur climat de confiance, nous sommes convenus de promouvoir certaines des mesures de confiance que la Grèce a proposées à la Turquie et de nous préparer pour entamer à nouveau les consultations exploratoires. Dans le même temps, nous prenons des mesures pour développer les relations économiques et culturelles – et ce, en dépit des provocations multiples de la Turquie en Mer Egée et des violations continues de la Turquie en mer et dans les airs. Nous voulons vivre en paix avec la Turquie sur la base des principes de bon voisinage, du droit international, de la compréhension des peuples, du progrès. Nous espérons qu’à la fin Ankara répondra.
Globalement, notre politique étrangère est une politique démocratique, animée d’une énergie positive et faite d’initiatives. Dans ce contexte, nous avons mis en œuvre, après des consultations, une initiative de cinq Etats (Grèce, Chypre, Italie, France et Pays-Bas avec la participation de pays du Moyen-Orient) pour la protection de la diversité religieuse et culturelle du Moyen-Orient. Cette richesse qu’est la diversité et que l’on observe dans cette région, existe depuis 2 000 ans et nous devons la défendre en tant que partie des principes de notre civilisation qui se réfèrent au caractère multiculturel et multi-religieux, des principes et valeurs du siècle des lumières, de l’histoire et de la tradition de la région. Nous avons d’ores et déjà invité des représentants éminents de pays, églises et de la science. Vous êtes tous les bienvenus.
Dans le courant du mois d’octobre, nous envisageons d’organiser à Athènes une conférence sur ce thème. Tout de suite après, débutera une initiative qui rapprochera toute une série d’Etats dans le cadre d’une action commune et qui a été accueillie favorablement par toutes les parties qui la connaissent.
La politique étrangère de la Grèce, en temps de crise, est une politique active, responsable, qui est mise en œuvre par le biais d’initiatives. C’est une politique qui ne veut pas diviser, mais unir. Qui ne veut pas se soumettre au passé, mais valoriser l’avenir.
Je vous remercie.
June 10, 2015