Discussion entre le ministre des Affaires étrangères Nikos Dendias et le journaliste Pierros Tzanetakos sur protagon.gr (Athènes, 26.11.2022)

Lors d'une discussion avec le journaliste Pierros Tzanetakos sur protagon.gr, le ministre des Affaires étrangères, Nikos Dendias a, entre autres choses, déclaré :

- Nous nous sommes engagés dans un effort intense afin de faire face à l'escalade de la rhétorique agressive turque et à ses actions illégales. Notre objectif est de soutenir nos positions fondées sur le respect du droit international et de déconstruire le révisionnisme turc. Ces efforts portent leurs fruits, puisque de plus en plus de partenaires soulignent publiquement l'évidence, à savoir que les revendications turques, notamment en ce qui concerne la souveraineté grecque sur les îles de la mer Égée, mais pas seulement, sont totalement infondées.

Nous continuerons à défendre le caractère juste de nos positions, ainsi que notre souveraineté nationale et nos droits souverains, par tous les moyens légaux. Tant à titre individuel, qu'en coordination avec nos alliés stratégiques.

-Malheureusement, la politique turque, qui ignore, au mieux, les règles fondamentales du droit international, ne devrait pas changer à court terme. Ne nous faisons pas d'illusions à ce sujet.

Notre réponse est, toujours dans le respect des règles internationales, de négocier des accords internationaux avec les pays voisins tels que l'Égypte, l'Italie et, au niveau politique, l'Albanie sur le renvoi [de la question] à La Haye, donnant ainsi l'exemple du contexte dans lequel ces questions doivent être traitées.

L'exemple récent de l'accord israélo-libanais devrait être une autre indication claire de la direction que prend la pratique internationale.

Bien sûr, comme nous ne nous attendons pas à un changement d'attitude de la Turquie et à un « retour » rapide à la légitimité internationale, il est de notre devoir de dénoncer les pratiques illégales et d'obtenir leur condamnation par la communauté internationale. Ces questions ont été au cœur de mes contacts de ces derniers jours à Rome, à Benghazi, à Djerba en Tunisie et à Manama au Bahreïn.

La visite dans l'est de la Libye était à sens unique. À l'heure où la Turquie tente d'entrer en contact avec les acteurs clés de l'est de la Libye, qui sont favorables à nos positions, il n'y avait pas de place pour un report ou un retard.

Les contacts que j'ai eus à Benghazi étaient nécessaires pour consolider la présence de notre pays dans une région très instable qui n'est qu'à 20 minutes de vol de la Crète.

En ce qui concerne la visite de Tripoli, nous nous étions préparés à toutes les éventualités. Nous n'avons pas été surpris. Cependant, comme l'accord que nous avions avait été rompu, nous avons dû adopter une position de principe.

Bien sûr, notre objectif reste le développement des relations avec la Libye. Mais avec un gouvernement représentatif démocratiquement élu, pas avec un gouvernement dont le mandat a expiré depuis longtemps et qui signe des « protocoles d’accord » totalement infondés.

Des « protocoles d’accord » qui sortent non seulement du cadre du droit international et du droit international de la mer, mais aussi du cadre de la géographie et du bon sens.

Permettez-moi tout d'abord de préciser que notre vision n'est pas celle d'une Grèce phobique, qui a accepté, en raison de sa population, d'être sur la défensive vis-à-vis de tout et de tous, « pour éviter de s'attirer des ennuis ». Notre objectif n'est pas une Grèce fermée, mais un pays tourné vers l'extérieur, qui cherche à entretenir de bonnes relations avec ses voisins, mais qui, dans le même temps, joue un rôle et a son mot à dire dans les développements de sa région. Et un pays qui croit au potentiel de la « marque » Grèce dans le monde entier, non seulement en raison de sa culture et de son histoire, mais aussi de sa présence active dans les développements internationaux.

Mais l'invasion russe de l'Ukraine a changé le contexte géopolitique de notre région.
La Turquie tente de convaincre nos alliés occidentaux que son importance stratégique a augmenté.

Et ce, malgré son attitude ambivalente à l'égard de la Russie.

Par exemple, en n'appliquant pas de sanctions.

Cependant, contrairement à ce que l'on aurait pu attendre, les positions de nos alliés et partenaires à l'égard des provocations turques ne se sont pas assouplies.

Dans mes contacts, je constate une plus grande compréhension et, dans de nombreux cas, un soutien à nos positions.

Ce changement progressif est essentiellement dû à trois facteurs.

Tout d'abord, nous développons nos positions avec des arguments, en montrant des cartes représentant la situation réelle sur le terrain.

Nous ne nous limitons pas aux discussions théoriques.

Deuxièmement, les positions turques, par exemple sur notre souveraineté sur les îles de la mer Égée, ou le « protocole d’accord » turco-libyen, sont manifestement en dehors du cadre des principes fondamentaux du droit international et du bon sens.

Aucun pays, même ami de la Turquie, ne peut les soutenir au niveau international.

Troisièmement, la Grèce a acquis sa propre importance stratégique, pour les États-Unis, ses partenaires européens, ainsi que pour les États de la région.

Nos relations avec ces pays ne sont pas déterminées par nos relations avec la Turquie.
La Grèce a désormais acquis sa propre valeur sur la bourse géopolitique.

Et ses « actions » ne dépendent pas de la valeur de la Turquie.

- Tout d'abord, permettez-moi de souligner que la Turquie semble ouvrir la « porte de la folie » en Irak et en Syrie en ce moment, avec une issue inconnue.

Cette évolution est en soi particulièrement inquiétante, car elle montre que la Turquie n'hésitera pas à recourir à la violence contre ses voisins.

Et ce, malgré les appels des États-Unis et de la Russie, dont les positions sur ce seul point semblent converger, bien qu'elles partent de points de départ complètement différents et aient des objectifs différents.

Face à ce défi permanent, nous devons être prêts à répondre, grâce au pouvoir de dissuasion dont nous disposons, diplomatique et militaire.

Nous devons veiller à ce que la « porte de la folie » reste hermétiquement fermée.

Nous pensons que c'est dans l'intérêt de la Grèce, mais aussi dans celui de la société turque. Parce que notre point de vue reste que nous pouvons vivre en harmonie avec la société turque dans un cadre commun de respect mutuel et de règles internationalement acceptées.

November 26, 2022