Nous vous communiquons ci-dessous le texte de l'intervention du vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, Evangelos Vénizélos lors de la session plénière du Parlement européen au sujet du rapport de progrès sur l'ARYM.
« S'agissant de la question de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine, force est de signaler que le Conseil dans ses conclusions de décembre 2013, a pris note de la crise politique provoquée par les incidents bien connus qui ont eu lieu au sein du parlement le 24 décembre 2012. Ces incidents ont fait apparaitre les divisions profondes qui existent entre les partis politiques ce qui a sapé le fonctionnement adéquat du parlement. La crise politique a également mis en exergue les problèmes liés à l'attitude du gouvernement à l'égard des médias tout en signalant la nécessité d'engager de nouveau un dialogue entre le gouvernement et les médias.
L'évolution - en tant que tendance- portant sur le fait que la perspective européenne demeure une priorité stratégique de ce pays, est positive et cela constitue à mon avis la base sur laquelle est axée notre discussion.
Le Conseil a salué la contribution du Dialogue de haut niveau sur l'adhésion à l'avancement de nombreux dossiers de priorité, y compris ceux ayant trait à des questions en suspens qui ont été portées devant la justice -qui doivent être réglées- ainsi que des questions relatives à la lutte contre la corruption.
Le Conseil a signalé la nécessité de mettre un accent plus important sur l'état de droit - ainsi que sur le caractère indépendant de la justice – sur la lutte contre la corruption et le crime organisé, sur la nécessité de protéger la liberté d'expression ainsi que sur la situation, juridique et réelle, des médias. Toutes ces questions sont en suspens et doivent être réglées. Il est nécessaire que les relations entre l'Etat et le parti au pouvoir soient bien claires. Cela a été signalé aussi par le Bureau des Institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'OSCE dans le cadre du processus électoral.
Le Conseil considère que l'évaluation de l'application de l'accord-cadre d'Ohrid, qui est particulièrement important pour les relations interethniques, doit être parachevée et que les propositions doivent être appliquées.
La stratégie concernant les Roms doit être appliquée de manière active. Des mesures doivent être prises contre le taux de chômage élevé et la gestion des finances publiques doit être plus efficace.
Les relations de bon voisinage constituent un élément d'importance majeure. C'est dans ce contexte des relations de bon voisinage et du respect du droit international, que s'intègre la question de l’atteinte d’une solution mutuellement acceptable à la question du nom, une question qui demeure en suspens, dans le cadre des négociations menées conformément aux résolutions y relatives du Conseil de sécurité de l'ONU, sous l'égide du Secrétaire général par le biais de l'ambassadeur Nimetz. Il est nécessaire que ces pourparlers sur la question du nom, qui durent depuis de nombreuses années, arrivent à une fin et qu'une solution définitive soit atteinte.
Nous voulons- je parle en ma qualité de ministre grec des Affaires étrangères - que cela soit fait dans les plus brefs délais.
Permettez-moi de faire une petite parenthèse à caractère national: la position grecque est modérée, concrète et c’est une position de compromis. L'occasion m'a été offerte, le 30 janvier, en m'adressant au parlement hellénique, de réitérer encore une fois que la Grèce accepte une appellation composée, dotée d'un déterminatif géographique concernant le terme Macédoine. Cela permet de faire la distinction par rapport aux régions grecques appelées également Macédoine. De cette façon, nous effaçons toute trace d'irrédentisme, nous façonnons un cadre régissant les relations de bon voisinage et nous respectons les résolutions du Conseil de sécurité et les efforts consentis par le Secrétaire général et M. Nimetz.
Cette proposition est très concrète, c'est une proposition qui garantit la dignité du dialogue et de toutes les parties, mais la solution doit être définitive et globale. Par conséquent, nous sommes en faveur d'un compromis, à savoir une appellation composée, dotée d'un déterminatif géographique, mais nous voulons que cette appellation soit pour tous les usages, à l'intérieur et à l'extérieur. L'objection qui a été formulée, à savoir que cela ne peut pas être changé et que la Constitution ne peut pas être révisée, n'est pas compréhensible au sein de l'UE car les pays membres de l'UE procèdent très souvent à la révision de leurs constitutions nationales afin de s'adapter aux changements du droit européen et à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme. L'espace constitutionnel européen est façonné à travers des changements continus dans les constitutions nationales - et bien entendu l'accord d'Ohrid lui-même fonctionne comme un mécanisme de changements constitutionnels.
Sur ces mots, je ferme ma parenthèse à caractère national que j'ai faite en saisissant l'occasion qui m'a été offerte de m'adresser à vous.
Je reviens sur les positions du Conseil lequel a également pris note des contacts continus de haut niveau entre l'Ancienne République yougoslave de Macédoine et la Bulgarie et s'attend à ce que ces contacts donnent lieu à des actions et des résultats concrets. Dans ce domaine aussi il y a des questions ayant trait aux relations de bon voisinage.
Le Conseil a pris note de la proposition de la Commission relative à l'ouverture des négociations d'adhésion. Nous débattrons de cette question vers le mois de juin, mais, bien évidemment, il est important de voir quelles seront les réformes qui seront mises en place entre-temps dans le cadre du Dialogue de haut niveau sur l'adhésion, y compris l'application de l'accord politique du 1er mars 2013. Le Conseil a demandé que des pas concrets soient faits dans le sens de la promotion des relations de bon voisinage et de l'atteinte d'une solution mutuellement acceptable à la question du nom.
Permettez-moi d'ajouter que, en dépit de la participation active de ce pays aux différentes initiatives régionales, telles que le Conseil de coopération régionale (Regional Cooperation Council) et le Processus de coopération en Europe du Sud-est (South East European Cooperation Process), de plus grands efforts doivent être consentis afin qu'il y ait un rôle clair, constructif dans le cadre de la région élargie.
Deuxième partie
"Dans mon intervention initiale, j'ai remercié les trois rapporteurs du Parlement européen et j'aimerais maintenant remercier le Commissaire Štefan Füle pour le travail qu'il a accompli, pour son dévouement à cet objectif, à l'élargissement de l'UE et à la perspective d'adhésion des Etats des Balkans occidentaux. Nous avons une coopération très étroite et il sait très bien que dans les jours à venir je visiterai les six capitales de la région, en ma qualité de Président du Conseil et, bien entendu, je visiterai Skopje car ce semestre de la Présidence hellénique nous offre l'occasion d'engager une discussion sur le terrain concernant les questions relevant de l'avenir européen commun et, si vous me le permettez, de l'avenir euro-atlantique de la région.
Je n'ai pas l'intention de me référer à la Bosnie-Herzégovine et à Monténégro. L'intervention du Commissaire Fule a été très pertinente à cet égard. Permettez-moi, non seulement en ma qualité de Président du Conseil, mais aussi en ma qualité de ministre grec des Affaires étrangères de donner quelques clarifications concernant la question de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine.
De nombreux membres distingués du Parlement ont avancé l'argument qu'il existe un différend bilatéral entre l'Ancienne République yougoslave de Macédoine et la Grèce concernant l'appellation et que cette question en suspens entrave le parcours d'adhésion de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine. Cette approche est erronée.
La question du nom n'est pas un différend bilatéral et, si je ne m'abuse pas, M. Chountis l'a tout à l'heure affirmé, c'est une question internationale en suspens. Le dialogue, la négociation, l'initiative de médiation du Secrétaire général et de son représentant spécial, M. Nimetz, émanent des deux résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU et le principe fondamental qui régit le fonctionnement de l'UE, un élément central de l'acquis communautaire et de l'ordre juridique européen, est le respect des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU.
Ce n'est pas la question du nom qui constitue une entrave à l'accélération du processus et à l'ouverture des négociations d'adhésion avec l'Ancienne République yougoslave de Macédoine. Le problème réside dans le respect des critères généraux que tous les Etats membres doivent remplir, tous les Etats membres candidats à l'adhésion, et ce qui est valable pour les Etats candidats à l’adhésion est également valable pour l'Ancienne République yougoslave de Macédoine.
Derrière le nom, il existe une question liée au respect du droit international, à la stabilité régionale, à un irrédentisme latent ou manifeste et aux relations de bon voisinage. Supposons que la question du nom soit réglée, d'une manière magique. Cela ne signifierait pas que nous aurions tout d'un coup résolu tous les problèmes liés aux critères d'adhésion.
Vous avez écouté les interventions des MM. Kovatchev et Stoyanov. Ce ne sont pas des interventions qui expriment le point de vue grec. La question des relations de bon voisinage se pose également avec d'autres pays. Il existe un problème qui se pose de manière générale et, bien entendu, force est de signaler que ces réponses ne sont pas les réponses du Conseil. Ce sont des interventions que j'ai l'occasion de faire en m'adressant à vous, en ma qualité de ministre grec des Affaires étrangères.
Par conséquent, cette question n'est pas autre que celle incluse dans les conclusions du Conseil du 19 décembre 21013. Dans le texte des conclusions il est explicitement indiqué et souligné que des pas concrets doivent être faits dans le sens de l'application de l'accord du 1er mars 2013. Il est explicitement indiqué que des pas concrets doivent être faits dans le sens des relations de bon voisinage.
Telle est la question. Et le paradoxe est que, permettez-moi de l'affirmer, la Grèce est probablement le pays le plus amicalement disposée dans la région à l'égard de l'Ancienne République yougoslave de Macédoine. Nous sommes toujours le premier investisseur étranger dans ce pays. La Grèce est une destination de prédilection pour les citoyens de ce pays. Le port de Thessalonique constitue une porte d'accès naturelle pour ce pays à la mer Méditerranéenne. Par conséquent, les conditions à l'établissement d'une bonne et active coopération existent, mais, bien évidemment, afin d'y insuffler l'élan souhaité, nous devons faire face aux causes du problème qui concernent le critère relatif aux relations de bon voisinage.
Je me suis entretenu plusieurs fois avec mon homologue, avec les chefs d'autres partis politiques et j'accorde une importance considérable à ma visite à Skopje dans quelques jours. Je pense que nous aurons un aperçu plus clair de la situation, mais je veux, à tout prix, clarifier qu'il ne s'agit pas d'une approche superficielle et que la question du nom ne porte pas sur une obsession ou un stéréotype. Il existe un problème que nous devons envisager dans sa dimension historique, dans sa dimension institutionnelle, et en fonction de ce critère dont je vous ai parlé, à savoir des critères et des modalités que chaque Etat candidat à l'adhésion à l'UE doit remplir.
J'ose espérer que les membres distingués du Parlement qui soutenaient des points de vue différents à l'égard des faits réels et de l'historique de la question, prendront en considération mes remarques.
Nous pouvons très clairement faire la distinction entre les devoirs de la Présidence du Conseil et nos sensibilités et priorités nationales. Au niveau national, nous participons à l'initiative de M. Nimetz, en faisant preuve d'un esprit constructif, en formulant une proposition de compromis axée sur la modération, à savoir une appellation composée dotée d'un déterminatif géographique, mais pour tous les usages. En tant que Présidence du Conseil, en faisant preuve d'une retenue et d'une objectivité complètes, tout comme nous le faisons à l'égard de la politique d'élargissement en général, des relations et des politiques de voisinage, nous respecterons les conclusions du Conseil formulées le 19 décembre 2013 ».
February 5, 2014