T. CHATZIS : Bonjour M. Dendias, ministre des Affaires étrangères. Bonjour M. le ministre.
N. DENDIAS : Bonjour M. Chatzis, bonjour à tous et à vos téléspectateurs.
T. CHATZIS : Une minute M. le ministre, je prierais Dimos de nous faire un rappel de la question concernant Evros car il suit cela depuis les années ’80 et il connait très bien le sujet en tant que journaliste. J’aimerais donc faire un bref rappel pour en venir à vos récentes déclarations.
D. VERIKIOS : Chaque année, nous avons des incidents aux frontières. Certains d’entre eux sont des incidents de petite échelle. Autrement dit, des incidents qui sont résolus dans la journée au niveau local. La question d’Evros est une question qui préoccupe le pays depuis 10 ans. Ce n’est pas nouveau. Les informations que j’ai à ma disposition…
T. CHATZIS : Tu as parlé de dizaines d’années, c’est pourquoi il convient de rappeler qu’en 1950, Konstantinos Karamanlis qui dirigeait alors la Grèce et Menderes, le dirigeant de la Turquie à l’époque, qui fut pendu par la suite, s’étaient mis d’accord et avaient changé le lit du fleuve pour des raisons d’irrigation.
D. VERIKIOS : Quel est donc le problème ?
T. CHATZIS : Je veux dire par là que c’est une longue histoire, ce n’est pas…
D. VERIKIOS : Le problème est que quand le niveau de l’eau baisse – ce qui arrive chaque année – une cellule militaire apparait de l’autre côté dans la région. Souvent, elle s’en va sans créer de problèmes. Mais parfois, certaines années, il y a de petits accrochages.
T. CHATZIS : Cela dépend plus de la conjoncture.
D. VERIKIOS : Mais aujourd’hui, de nos jours, il y a une raison supplémentaire.
T. CHATZIS : Une raison sérieuse.
D. VERIKIOS : Oui très sérieuse. Je suis content en tant que Grec car ce que nous n’avions pas réussi à faire pendant 50 ans, nous l’avons réussi aujourd’hui. Après l’échec et le fiasco de l’autre côté d’Evros, le Lundi pur, de faire entrer des dizaines de migrants dans notre pays. Qu’avons-nous réussi à faire ? Nous avons réussi à conférer une dimension internationale à la question et à faire venir l’Europe et nos frontières nationales à Evros…
T. CHATZIS : Il y a aussi les travaux dont tu parles.
D. VERIKIOS : Oui, les travaux de construction du mur. Ce n’est pas simple. Il faut parachever ces travaux conçus il y a des dizaines d’années, mais nous n’avions pas trouvé le moment de les réaliser. Aujourd’hui, nous avons trouvé le moment. Regardez ici. Les plans que nous voyons, ces blocs sont fabriqués à Xanthe.
Ils sont transportés la nuit. Ces blocs, ces travaux de construction ont lieu dans la nuit, les gens d’en face se réveillent le matin et tout est fini. Ils voient une image différente d’Evros. C’est là le problème.
T. CHATZIS : Tu as dit ce matin à la radio pour en finir avec cette question et continuer à poser nos questions au ministre, tu as dit que dans les années ’80, vers la fin des années ’80, le général de corps aérien et chef de l’armée à l’époque…
D. VERIKIOS : Le tant regretté Nikos Kouris. Il nous avait invités, il nous avait informés. Et nous n’avions jamais donné…
T. CHATZIS : Concernant cette question.
D. VERIKIOS : Oui la question d’Evros. C’est un principe de base.
T. CHATZIS : Mais il faut voir pourquoi a été créé ….
D. VERIKIOS : Pourquoi ? A votre avis ?
T. CHATZIS : Monsieur le ministre, l’opposition a demandé à ce que vous apportiez certaines réponses. Et parmi les questions que l’opposition a directement posées, elle a demandé si les forces armées grecques se sont retirées de l’endroit en question et tout de suite après la police militaire turque s’est rendue audit endroit.
N. DENDIAS : Je suis content de l’occasion qui m’est donnée pour clarifier certaines choses. Tout d’abord, les choses concernant le ministère des Affaires étrangères sont simples. Il y a eu une note verbale turque qui a demandé à la Grèce de donner les coordonnées de construction du mur et de ne procéder à aucune action avant de se concerter avec la partie turque. Cette note a été rejetée. Nous leur avons dit que le mur est construit sur le territoire grec et que nous n’avons nullement l’intention de leur communiquer les coordonnées.
T. CHATZIS : Pas de comptes à rendre.
N. DENDIAS : Exactement. Nous n’avons pas de comptes à leur rendre sur ce que nous faisons chez nous. Cela étant, une certaine agitation a été observée et c’est pourquoi nous avons remis une deuxième note aux Turcs afin qu’ils cessent toute agitation dans la région, en leur disant que la construction du mur se faisait sur le territoire grec. Cela a rapport avec notre relation avec la Turquie également. Et effectivement, comme cela a très justement été dit tout à l’heure par M. Verikios, les histoires dans cette région remontent à des décennies en arrière. Et vous vous êtes à juste titre rappelé de feu Konstantinos Karamanlis. Je ne voudrais pas m’étendre sur la question. Il y avait eu alors une tentative de résoudre définitivement le différend pendant les années ’50, jusqu’en 1963, où ces efforts se sont terminés, sinon nous n’aurions pas les incidents d’aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, cela ne s’est pas fait. J’en vient maintenant à la question de savoir comment le problème a été créé. La chose est simple. Il s’enferme…
T. CHATZIS : Attendez, la question qui a été posée…
N. DENDIAS : Vous me permettez ? Je vais vous répondre à votre question. Très franchement.
T. CHATZIS : L’opposition pose la question et dit les Grecs sont partis et les Turcs y vont ?
N. DENDIAS : C’est très grave et vous avez raison.
T. CHATZIS : Bien entendu que c’est grave.
N. DENDIAS : J’en viens. Le système politique et les partis de l’opposition s’enferment dans la rhétorique Velopoulos (député et président du parti politique ELLINIKI LYSI N.d.T.) d’extrême droite. Si vous voulez, le système politique du pays s’enferme dans la bataille de l’Aube Dorée. Puis les fausses nouvelles commencent. Quelles sont ces fausses nouvelles ? Premièrement qu’il y a eu occupation du territoire grec. 16 stremmas (1 stremma = 1000 mètres carrés environ N.d.T.) d’ailleurs. Et ils montraient des cartes du territoire grec qui avait soi-disant été occupé par les Turcs et ce sont des personnes sérieuses qui avancent ces propos… lesdites personnes sérieuses. Et l’opposition fait ce que vous venez de dire, elle demande au gouvernement si et dans quelle mesure l’armée grecque a reculé face à la gendarmerie turque.
T. CHATZIS : Elle fait bien de demander car à partir du moment où il y a un problème, non seulement l'opposition mais une partie de la presse a soulevé la question.
N. DENDIAS : Monsieur Chatzis, pardonnez-moi. Je ne pense pas qu’elle fait bien de demander. La question, la formulation même de la question pose problème.
T. CHATZIS : C’est différent.
N. DENDIAS : Et la seule chose qui puisse sauver l’opposition c’est le point d’interrogation à la fin. Et seule la formulation, même si elle est indirecte, de l’affirmation selon laquelle les forces armées du pays auraient abandonné le territoire grecque face aux gendarmes turcs, n’est-elle pas insultante ? Ils apparaissent en disant que le ministre des Affaires étrangères du pays a renoncé à quelques mètres du territoire grec, en altérant ma déclaration concernant le changement du lit du fleuve Evros. Mais où est la limite ?
T. CHATZIS : Pardonnez-moi Monsieur le ministre. Dans votre déclaration, il y a une question de contestation de l’exacte limite en raison du changement du lit du fleuve d’Evros de quelques dizaines de mètre. C’est cette déclaration qui a déclenché ces…
N. DENDIAS : Je connais cette déclaration. C’est moi qui l’ai faite. Et puis ce n’est pas une déclaration, mais une prise de position…
T. CHATZIS : C’est quoi ? C’est une déclaration.
N. DENDIAS : Cette déclaration concerne le lit du fleuve. Et le journaliste qui m’a posé la question l’a compris ainsi et l’a précisé dans un de ses articles. La comprend comme étant une renonciation aux droits nationaux quiconque veut la comprendre et l’interpréter de la sorte, car le texte dit le contraire.
D. VERIKIOS : Monsieur le ministre, nous dramatisons la situation et nous attirons des ennuis.
N. DENDIAS : C’est exactement cela. Ils essaient au moins.
D. VERIKIOS : En ce moment, il y a un processus en cours à Evros de notre côté. Ce processus doit être terminé le plus vite possible. Nous attendions cinquante ans.
N. DENDIAS : Et il se terminera.
D. VERIKIOS : Je suis ravi de l’entendre.
N. DENDIAS : Et malgré les efforts de la Turquie. Et je regrette de le dire, malgré l’aide que leur fournissent – sans le vouloir mais pour simplement marquer des points – certains partis de l’opposition en adoptant le fameux raisonnement Velopoulos d’extrême droite. Le gouvernement fera son devoir.
T. CHATZIS : Cette accusation n’est-elle pas grave M. le ministre ? D’accuser les partis de l’opposition de s’assimiler à l’extrême droite ?
N. DENDIAS : Je ne les ai pas assimilés à l’extrême droite. J’ai dit – et je le répète – qu’ils ont adopté le fameux raisonnement Velopoulos d’extrême droite. Trouvez qui a fait la déclaration en premier ? D’ailleurs, il faut tenir compte du fait que ces déclarations ont été faites plus de 48 heures après ma prise de position sur ERA. Il s’agit de mercredi matin et de vendredi soir. Si cela n’est pas une preuve de fabrication, alors qu’est-ce que c’est ?
D. VERIKIOS : Et après un article du journal britannique.
T. CHATZIS : Une minute, M. le ministre. Nous allons parler de tout…
N. DENDIAS : Adoption, sans jugement aucun, d’un article sur l’occupation d’un territoire national ? Qu’est-ce que c’est ?
T. CHATZIS : Nous allons parler de tout. C’est pour cela que nous vous avons invité. Il n’y a pas que cela. Une minute. Vous venez ici pour nous dire que s’agissant de cette déclaration que vous avez faite, il y a un problème de contestation de la limite exacte en raison des changements du lit du fleuve.
N. DENDIAS : Non. Il n’y a aucun problème de contestation de la limite exacte.
T. CHATZIS : C’est ce que vous avez dit.
N. DENDIAS : Le lit du fleuve change, mais pas la limite de la Grèce, M. Chatzis. La limite de la Grèce dans la région est régie par le Traité de Lausanne de 1923 et le Protocole de 1926. Ce qui change ce sont les points à partir desquels sont effectuées les mesures, en raison du changement du lit du fleuve d’Evros. Les frontières sont acquises. Toute autre chose n’a d’autre objectif que de servir les points de vue turcs.
Τ. CHATZIS : D’accord. C’était là, à cet endroit que les Grecs sont allés pour prendre des mesures. Ils sont allés prendre des mesures dans la région…
N. DENDIAS : Excusez-moi. Ne me faites pas décrire.
T. CHATZIS : Je ne veux pas que vous me décriviez, je veux que vous me répondiez.
N. DENDIAS : Il existe des communiqués bien clairs émis par le ministère de la Défense qui apportent des précisions tout à fait claires concernant le territoire national.
Τ. CHATZIS : Lorsque nous sommes partis de cet endroit, est-ce que les Turcs se sont rendus là-bas ? Je vous le demande directement.
N. DENDIAS : Monsieur Chatzis, je le répète. Je l’ai déjà dit de manière directe dès le début.
Τ. CHATZIS : Avez-vous dit quoi ?
N. DENDIAS : Je vous ai dit quel était l’ordre des démarches entreprises et les réponses qui avaient été apportées à celles-ci. Je ne suis pas un observateur de la ligne frontalière. Je suis ministre des Affaires étrangères, je défends les droits du pays en fonction de mes responsabilités. Dans les deux cas, le ministère a agi de manière très efficace et de la façon dont il aurait dû le faire.
JOURNALISTE : Donc, monsieur le ministre, pensez-vous qu’il y ait de la part de la Turquie une tentative de vengeance ? Autrement dit, est-ce qu’elle veut gagner le terrain perdu en février dernier lorsque l’Etat grec dans son ensemble a défendu la souveraineté de notre pays ?
L. BOLAS : Ou, bien pire, est-ce qu’elle essaye de créer des zones grises terrestres cette fois ?
N. DENDIAS : Ce que la Turquie cherche à faire, ne concerne qu’elle-même. Moi, ce que j’ai à vous dire est que la situation à Evros est régie par des accords incontestés. Le Traité de Lausanne de 1923 et le Protocole d’accord de 1926. Et à cette occasion, puisque les deux ministres turcs, le ministre de la Défense turc et le ministre des Affaires étrangères le week-end, ont pris position à cet égard, je voudrais être clair envers eux aussi.
A Evros, ces deux textes internationaux, définissent parfaitement la ligne frontalière. Pour ce qui est de la Méditerranée orientale que les hauts-fonctionnaires turc ont évoquée, je voudrais signaler la chose suivante :
La Grèce veut coopérer avec tous. Et la coopération avec la Grèce, ainsi que le partenariat tripartite, la coopération 3+1 et même la coopération à cinq parties avec les Emirats et l’Egypte est aussi ouverte à la Turquie, si la Turquie adhère pleinement aux principes du droit international. Toutefois, si la Turquie pense qu’elle peut transformer la Grèce en une île, en Méditerranée orientale et centrale, en prenant possession de celle-ci, elle se trompe complètement. Il faut que nous soyons bien clairs à cet égard.
T. CHATZIS : Bon, toutefois, nous avons ici trois questions qui se posent. La première porte sur votre déclaration qui a mis le feu aux poudres
D. VERIKIOS : Tu parles de la déclaration dans laquelle le ministre a affirmé qu’il ne s’agissait que de « quelques dizaines de mètres »
N. DENDIAS : Non, monsieur Chatzis. Ma déclaration n’a pas mis le feu aux poudres. Si tel était le cas, elle l’aurait fait depuis mercredi déjà.
Τ. CHATZIS : Mais c’était de là qu’a commencé toute cette histoire.
N. DENDIAS : Non, cela n’a pas commencé de là. Cela a commencé par des affirmations renvoyant à l’article du journal « Sun » qui parlait d’occupation du territoire grec, c’est pourquoi cela s’est passé vendredi. Ma déclaration – ma soi-disant déclaration – est un extrait d’une interview que j’ai accordée mercredi matin. Le journaliste qui m’a posé cette question a pris une position claire à cet égard. C’est de là qu’est parti ce débat, les fameuses affirmations de Velopoulos et la prise de position de l’opposition à cet égard.
D. VERIKIOS : Si un journal tel que « Sun » suffit pour nous désorienter et nous attirer des ennuis, nous devons fermer boutique.
Τ. CHATZIS : La deuxième question est essentielle, à laquelle vous avez répondu, à savoir que cela est déterminé en fonction des conditions. Aucun débat n’est engagé.
N. DENDIAS : Cette réponse M. Chatzis n’est pas la mienne. C’est la réponse donnée traditionnellement par tous les gouvernements grecs. Aucun gouvernement grec n’a pris d’autre position et aucun gouvernement grec ne prendra d’autre position.
T. CHATZIS : Toutefois, qu’est-ce qui vous a poussé à faire cette démarche auprès de la partie turque monsieur le ministre ?
N. DENDIAS : C’est la Turquie qui nous a demandé moyennant une note verbale de communiquer les coordonnées de la construction de ce mur.
Τ. CHATZIS : Et, avez-vous répondu ?
N. DENDIAS : Bien évidemment. Nous avons répondu que le mur se trouvait sur le territoire grec et que nous n’avions aucune raison de leur donner des informations sur lesdits travaux.
D. VERIKIOS : Ils veulent que les travaux soient interrompus. C’est tout.
Τ. CHATZIS : Est-ce qu’il y a eu une autre démarche de notre part auprès de la Turquie?
N. DENDIAS : Il y a eu une deuxième démarche suite à une mobilisation du côté turc dans la région. On a été informés sur la mobilisation turque, les Turcs se sont évidemment rendus dans la région pour la prise de mesures et c’est à cause de cela qu’une deuxième démarche a été faite auprès de la Turquie. Si on ne procédait pas à la deuxième démarche, on omettrait de protéger nos intérêts nationaux.
Τ. CHATZIS : Est-ce que les Turcs ont répondu ?
N. DENDIAS : Non, les Turcs n’ont pas répondu jusqu’à présent.
Τ. CHATZIS : Est-ce que les personnes qui veulent prendre des mesures demeurent toujours dans la région ?
N. DENDIAS : Aucune mobilisation n’est enregistrée. Toutefois, je répète que ce n’est pas ma responsabilité de vous dire ce qui se passe sur le terrain.
Τ. CHATZIS : Cela relève de la responsabilité du ministère de la Défense.
D. VERIKIOS : Toutefois, M. Cavusoglu a affirmé qu’une fois que la pandémie du coronavirus passée, ils retourneront à la frontière. C’est ce qu’il a affirmé hier. « Toutes les mesures nécessaires ont été prises ». Moi, monsieur le ministre, je voudrais que vous nous parliez un peu de la question libyenne et que vous nous disiez dans quelle mesure les articles parus aussi dans la presse hellénique sont valables.
N. DENDIAS : Monsieur Verikios, la situation est la suivante et à cet égard je dois faire très attention à ce que je dis. Les forces du GNA, des forces de Sarraj, ont lancé une contre-attaque avec l’aide de la Turquie en Libye de l’ouest. Aux alentours de Tripoli. Reprise d’un aéroport important, retrait des forces de Haftar de la région autour de Tripoli, alors que les forces de Haftar continuent d’avoir sous leur contrôle absolu la Libye de l’est, c’est-à-dire les côtes situées en face de la Grèce. Selon des informations, des avions russes auraient atterri en Libye de l’est. Avant-hier, j’ai eu une réunion par visioconférence sur ces questions avec l’ambassadeur américain, en Libye, M. Norland, en présence de M. Pyatt également.
Le soir du même jour, je me suis également entretenu par visioconférence avec le Président du parlement libyen, Aguila Saleh. Nous avons reçu des demandes spécifiques de différentes parties. En outre, Malte a levé ses objections concernant la structure administrative de l’opération « Irini », qui commencera bientôt. Tel est l’état actuel des choses. Il s’agit d’une situation extrêmement volatile. La Grèce, à l’égard de la Libye aussi, demeure attachée à la défense du droit international mais aussi à la défense de ses propres intérêts dans les régions maritimes qui coïncident pleinement avec les dispositions du droit international.
D. VERIKIOS : Etes-vous optimiste que les efforts et la mobilisation d’Athènes suite à la signature du protocole d’accord entre la Turquie et la Libye apporteront des fruits, des résultats positifs, au profit de nos intérêts nationaux ?
N. DENDIAS : Tout d’abord, on participe à une discussion à laquelle on était complétement absents. Les Américains demandent à parler avec le ministre grec et le Président du parlement libyen parle avec le ministre grec ce qui n’a du tout été le cas auparavant. La même chose se passe par ailleurs en Syrie aussi. Et en Syrie, nous sommes en train d’entamer des procédures pour ouvrir notre ambassade et nous avons envoyé là-bas un envoyé spécial. Et, nous discutons de cela avec les Français et les Américains. L’obligation de la Grèce est d’y être présente.
Talleyrand disait que « l’absent a tort ». La Grèce donc doit être de retour dans le bassin méditerranéen et dans les Balkans aussi. En outre, le partenariat à cinq parties avec l’Egypte et les Emirats constitue une réussite nationale énorme car il élargit le cercle de nos interlocuteurs et le cercle des pays qui partagent notre perception du comportement infractionnel de la Turquie.
Τ. CHATZIS : Je voudrais vous poser la question suivante : Est-ce que selon vos informations ou, si vous voulez, d’après vos analyses au ministère des Affaires étrangères, et au sein du gouvernement en général, vous pensez que les Turc sont prêts à provoquer un incident grave dans la région ?
N. DENDIAS : Il y a une escalade. Et si cette escalade devient incontrôlable, elle peut conduire à n’importe quelle situation. Il est de notre devoir de ne pas permettre à la Turquie de jouer son jeu de la façon dont elle veut. De notre côté, nous tendons toujours une main d’amitié et de coopération à la Turquie. Mais ce, dans le cadre du droit international et des traités internationaux. Et il est dans l’intérêt de la Turquie, comme il est dans celui de la Grèce que la Turquie accepte cette main d’amitié.
Τ. CHATZIS : Mais on pourrait rétorquer à cela : « Monsieur le ministre, c’est bien ce que vous faites, vous avez raison de dire cela, mais ils nous harcèlent constamment, ils font ceci à Evros et cela dans les îles, ils effectuent des survols, pourquoi faut-il toujours leur tendre une main d’amitié ? ». N’est-ce pas comme s’ils se moquaient de nous ? Car c’est de cela qu’il s’agit.
N. DENDIAS : Le gouvernement de Mitsotakis est au service de l’intérêt national. Lorsqu’il a fallu faire preuve de fermeté, comme à Evros à l’égard de l’instrumentalisation de la question migratoire, il l’a fait. Cela ne signifie toutefois pas que nous permettrons à la Turquie de nous entraîner à réagir de la façon qui lui convient.
D. VERIKIOS : La question est de ne pas apporter de l’eau au moulin de la Turquie.
N. DENDIAS : Pour ce qui est des affaires intérieures, M. Verikios je vous ai dit ce que je devrais vous dire. Ce que j’ai dit était dur mais la reproduction de fausses informations de la part de l’opposition en ce moment…
D. VERIKIOS : Ce n’est pas seulement de la part de l’opposition monsieur le ministre, excusez-moi, mais il y a des murmures au sein de votre propre parti aussi, pour que nous soyons justes…
N. DENDIAS : Moi, je suis sourd aux murmures, je ne vois que les communiqués.
Τ. CHATZIS : De toute façon, il n’y a aucun relâchement des contrôles à nos frontières, maritimes ou autres. Nous vous remercions beaucoup d’avoir eu la gentillesse de discuter avec nous de cette question. Et, j’espère qu’il ne sera pas nécessaire d’engager de nouveau cette même discussion car, comme vous avez pu le constater vous-mêmes ainsi que vos collaborateurs, il y a eu une intense mobilisation sur les réseaux sociaux et tant le ministère des Affaires étrangères que vous-mêmes mais aussi le gouvernement avez fait l’objet de vives critiques à cet égard.
N. DENDIAS : Mais ces critiques étaient exercées à cause des fausses informations et non pas à cause de la réalité. Bien évidemment, si nous avions permis l’occupation d’une partie du territoire grec, les critiques qui nous auraient été exercées seraient tout à fait justifiables.
Τ. CHATZIS : Ce n’est pas seulement sur les réseaux sociaux, il y a eu aussi des personnes connues, des journaux, des médias, qui…
N. DENDIAS : Nous avons un aperçu complet de cela. De nombreuses personnes ont été exposées en reproduisant les fausses nouvelles.
D. VERIKIOS : Il ne faut en aucune manière interrompre les travaux.
N. DENDIAS : Cela est exclu.
Τ. CHATZIS : Merci monsieur le ministre.
May 25, 2020