Interview accordée par le Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères en charge de la Diplomatie économique et de l'Extraversion, Kostas Fragogiannis, à « To VIMA tis Kyriakis » et Panagiotis Michos (20.03.2022)

JOURNALISTE : Êtes-vous satisfait de la visite en Arabie Saoudite ? Les relations économiques bilatérales vont-elles connaître un grand essor ? Dans quels domaines ?

M. FRAGOGIANNIS : J'ose dire que la mission d'affaires en Arabie saoudite a dépassé les attentes de tous les participants - même les nôtres au ministère des Affaires étrangères, en tant qu'organisateurs - tant sur le plan de l'organisation elle-même que sur celui des résultats. Et cela se reflète dans les déclarations non seulement de nous, les représentants de l'État, mais surtout des hommes d'affaires pour lesquels la mission a été organisée. Le nombre de 300 réunions b2b organisées est, je pense, une preuve convaincante.

Nous nous attendons donc à un renforcement substantiel de nos relations économiques bilatérales avec l'Arabie saoudite, à la suite de cette mission d’affaires particulière et du travail systématique que nous effectuons au ministère des Affaires étrangères, en coopération avec les ministères concernés. À ce stade, je tiens à souligner que le commerce bilatéral a atteint 1,3 milliard d'euros en 2021, soit une augmentation de 57 % par rapport à 2020. Dans le même temps, le plan stratégique national pour l’extraversion 2022 - la feuille de route des relations économiques internationales de la Grèce pour cette année - comprend 18 actions d'extraversion ciblées liées à l'Arabie saoudite.

Les secteurs pour lesquels il existe un grand intérêt des deux côtés et de nombreuses perspectives sont le tourisme, le transport maritime, l'énergie, notamment les énergies renouvelables, la construction, les technologies numériques et l'industrie agroalimentaire. En effet, d'importants partenariats ont déjà été annoncés depuis notre retour de Riyad, dont certains ont une portée nationale.

JOURNALISTE : Est-il possible que l'Arabie saoudite fournisse à la Grèce de plus grandes quantités de combustibles fossiles si le besoin s'en fait sentir ?

M. FRAGOGIANNIS : L’un des accords ayant une empreinte nationale - vu évidemment le contexte mondial - est l'accord de principe entre HELPE et la compagnie pétrolière d'État saoudienne SAUDI ARAMCO pour augmenter l'approvisionnement en pétrole brut et autres produits. Il s'agit d'un accord d'importance nationale car il préserve la sécurité énergétique du pays. Et il est révélateur de la relation stratégique que nous avons développée avec l'Arabie saoudite en ce moment, qui est à son meilleur niveau depuis des années.

Permettez-moi ici de mentionner un autre partenariat d'importance nationale avec l'Arabie saoudite, sur lequel des progrès significatifs ont été réalisés lors du voyage. Il s'agit du projet d'interconnexion numérique Asie du Sud-Est-Europe (de Singapour à Gênes) avec un câble optique sous-marin à grande vitesse et à haute capacité, qui reliera 39 stations dans 33 pays. Il s'agit d'un projet financé par la Grèce, Chypre et l'Arabie saoudite, qui fera de la Grèce un centre numérique et une passerelle vers les Balkans et l'Europe de l'Est.

JOURNALISTE : Avec quels États Athènes souhaite/entend-elle développer des relations économiques fortes ? Quelle sera la prochaine mission d’affaires ciblée ?

M. FRAGOGIANNIS : Nos objectifs se reflètent désormais systématiquement dans le plan stratégique national pour l'extraversion auquel je me suis référé. C'est la première fois que nous disposons, en tant que pays, d'un programme complet pour nos relations économiques internationales, qui est élaboré par le Secrétariat général pour les Relations économiques internationales et l’Extraversion du ministère des affaires étrangères, en utilisant le réseau des Bureaux des affaires économiques et commerciales des ambassades. Dans le cadre de ce plan, les actions de tous les ministères productifs en matière de relations commerciales et d'investissements sont développées de manière coordonnée et ciblée, par région géographique. En effet, la présentation du Plan stratégique national pour l’extraversion pour 2022, initialement prévue le 4 mars, est en attente et aura lieu dès que les conditions sur la scène internationale le permettront. A ce moment-là, nous annoncerons et nous parlerons davantage des prochaines actions d'extraversion que nous prévoyons. Pour l'instant, je dois mentionner qu'une mission d'affaires, de moindre envergure, aura lieu à la fin du mois de mars aux Émirats arabes unis, plus précisément à Dubaï, dans le cadre de l'exposition internationale EXPO 2020.

JOURNALISTE : Y a-t-il eu des progrès dans l' « Agenda positif » gréco-turc que vous dirigez du côté grec ? Si oui, dans quels domaines ?

M.FRAGOGIANNIS : Je suis heureux que vous me donniez l'occasion de faire référence à l'Agenda positif, à cette initiative que nous avons entreprise au sein du ministère des Affaires étrangères, qui concerne la promotion de nos relations bilatérales en mettant l'accent sur des questions de « basse politique » mais à haute valeur ajoutée, principalement dans le domaine économique. Cet agenda positif est développé autour de domaines tels que les transports, l'environnement, le tourisme, les petites et moyennes entreprises. La mise en œuvre de l'agenda positif dans nos relations avec la Turquie, depuis environ un an, a produit les résultats tangibles suivants. La réactivation de la commission économique mixte entre les deux pays dans le but de surmonter les problèmes qui entravent ou empêchent les échanges commerciaux. La convocation d'un Forum pour promouvoir le tourisme et augmenter les flux touristiques des deux côtés. La promotion du projet de construction d'un nouveau pont frontalier sur le fleuve Evros (Kipi - Ipsala). La coopération entre les compagnies maritimes pour l'interconnexion maritime entre Thessalonique et Izmir, les décisions y relatives devant être annoncées lors de la prochaine réunion de l'agenda positif. Toutes ces mesures vont dans le sens de la promotion des relations économiques bilatérales qui ne peuvent qu'apporter des avantages mutuels. Sur les 25 thèmes inclus dans l'agenda positif, 10 thèmes ont déjà été réalisés, les autres enregistrent des progrès significatifs et nous poursuivons nos efforts de manière cohérente.

JOURNALISTE : Les progrès réalisés sur les questions de l' « Agenda positif » peuvent-ils également donner un élan aux questions « lourdes » des relations gréco-turques ?

M. FRAGOGIANNIS : Comme je l'ai déjà souligné, l'ordre du jour positif couvre des questions de « basse politique », sans toucher aux questions sensibles des relations bilatérales des pays. Les positions de la Grèce sur nos questions nationales sont claires et non négociables, et tant que la Turquie choisit de faire des déclarations provocatrices et de soulever pour discussion des questions qui n'existent pas en vertu du droit international, cela rend évidemment difficile le réchauffement des relations. Cependant, nous restons convaincus que la création d'un climat positif, quel que soit le domaine possible, pourrait apaiser les tensions dans d'autres domaines également. En particulier, toute initiative ayant un impact positif sur l'économie en difficulté de la Turquie pourrait potentiellement avoir un impact positif sur les relations dans leur ensemble.

March 20, 2022