JOURNALISTE : Comme je vous l’ai tout à l’heure dit, nous accueillerons à notre émission le ministre délégué aux Affaires étrangères en charge des affaires européennes, Giorgos Katrougalos.
Bonjour monsieur le ministre.
G. KATROUGALOS : Bonjour à vous et à vos auditeurs.
JOURNALISTE : Je souhaite à tous une bonne semaine. Est-ce que c’est un bon début de semaine pour Theresa May ? S’agit-il finalement d’un divorce de velours monsieur le ministre ou non ?
G. KATROUGALOS : C’est un compromis comme tout accord international de ce genre qui doit concilier des intérêts incompatibles. Nous avons réussi, en tant que 27, à faire preuve d’unité et de solidarité, tant entre nous qu’envers les pays qui avaient des intérêts nationaux plus importants dépendant de l’issue de la négociation, comme l’Irlande et récemment l’Espagne et à parvenir à un accord qui protège nos intérêts cruciaux. Cet accord protège bien évidemment les intérêts aussi de l’autre partie, comme les accords de ce genre doivent le faire.
Dorénavant, Mme May devra toutefois parcourir un chemin semé d’embûches en vue de parvenir à la ratification de cet accord, à l’approbation de l’accord car malheureusement le dialogue politique au Royaume-Uni n’avait pas dès le début apporté des clarifications sur les dilemmes devant lesquels se trouvait le pays.
Nombreux étaient ceux qui pensaient qu’en sortant de l’Union européenne, ils maintiendraient les privilèges qui avaient en tant que membres, ce qui, bien évidemment, n’était pas possible.
Même dans le cas d’un simple club, quand on quitte ce club, il est évident qu’on aura plus les mêmes privilèges qu’on avait quand on était membre de ce club.
JOURNALISTE : En dépit de cela, alors que la ratification de l’accord à Londres est « incertaine », les hauts fonctionnaires européens saluent cet accord. Le Premier ministre a toutefois affirmé que cet accord ne devrait pas servir d’exemple pour les autres pays. S’agit-il finalement d’un mauvais accord ?
G. KATROUGALOS : Non. Ce que nous entendons par cela est que dans certains domaines, par exemple dans celui de la défense et de la sécurité, nous voulons beaucoup plus maintenir une relation de coopération avec le Royaume-Uni qu’avec des pays tiers. Cette relation spéciale que nous voulons maintenir avec le Royaume-Uni ne doit pas toutefois servir de modèle pour les relations que peut établir à l’avenir l’Union européenne avec d’autres pays car nous voulons vraiment que la Grande Bretagne demeure un partenaire spécial. Elle quitte l’Union européenne, mais elle ne quitte pas l’Europe.
JOURNALISTE : Pour nous, Grecs, monsieur le ministre, pour les étudiants grecs, pour les Grecs qui sont installés en Angleterre, que signifie le Brexit ? Que signifiera-t-il pour…
G. KATROUGALOS : Vous le dites fort bien. Pour nous, assurer les droits des travailleurs et des étudiants grecs était notre première priorité. Et ces questions ont été parmi les premières à être réglées. Les droits des Grecs se trouvant et travaillant actuellement au Royaume-Uni sont pleinement sauvegardés et on fera tout ce qui est en notre pouvoir, dans le cadre de notre relation future avec ce pays, en vue d’accorder une protection importante à ceux qui envisagent de se rendre en Grande-Bretagne.
JOURNALISTE : Qu’est-ce que vous allez protéger ? Leur vie, leurs études ? Auront-ils besoin de visa ?
G. KATROUGALOS : Permettez-moi de vous expliquer. Pour ceux qui…
JOURNALISTE : Ce que je veux dire est que ces personnes avaient certains privilèges en tant que citoyens de l’Union européenne, comme le système de sécurité sociale. Qu’adviendra-t-il de ces privilèges ?
G. KATROUGALOS : Ceux qui étaient actuellement en Grande Bretagne avaient les mêmes droits – ne parlons pas de privilèges, mais plutôt de droits – que les citoyens du Royaume-Uni, car les Etats membres ne sont pas autorisés à faire des discriminations à l’intérieur du pays.
Pour ces citoyens qui sont actuellement en Grande Bretagne, ceux qui y sont installés soit parce qu’ils font des études, soit parce qu’ils travaillent, cela ne changera rien. Les droits de ces personnes seront comme avant.
JOURNALISTE : Passons maintenant au pays voisin, la Turquie. Les dirigeants militaires grecs semblent être en alerte à Chypre également en raison de tout ce qui se passe en Egée et les menaces quasi quotidiennes de la part des dirigeants de la Turquie.
G. KATROUGALOS : Il est dans l’intérêt absolu de notre pays de conserver son sang-froid. Car nous savons non seulement que nos intérêts sont sauvegardés par la légalité internationale et garantis par les traités internationaux, mais aussi parce que la position diplomatique tant de la Grèce que de la République de Chypre est particulièrement renforcée.
Et d’ailleurs, il est évident que les efforts de révisionnisme des traités et le maintien d’une forte rhétorique guerrière ne sont pas bénéfiques, bien au contraire. Je pense qu’il est prouvé dans la pratique que la République de Chypre avance dans le sens de la valorisation de ses sources productrices de richesses alors que ceux qui exercent la politique dont je vous ai parlé, ceux qui contestent c’est-à-dire le droit international et qui n’essayent pas de régler les intérêts nationaux conformément aux dispositions du droit international, se trouvent dans un état d’isolement.
JOURNALISTE : Il y a des sous-entendus au sujet d’une nouvelle invasion de Chypre, M. le ministre.
G. KATROUGALOS : Effectivement, ce n’est pas un porte-parole du gouvernement qui l’a dit, mais un représentant de l’opposition. Mais cela montre bien que dans la sphère politique turque, le terrain est propice à ce genre de propos nationalistes. Et de toute évidence, il est dans notre intérêt de ne pas répondre de la même manière à ces propos car non seulement nous ne revendiquons rien, mais n’avons rien à céder. Nos intérêts et nos droits nationaux sont absolument sauvegardés.
Et cela se reflète, pour ne pas que nous auditeurs aient le sentiment que ce soient des mots dénués de sens, dans toute une série de décisions récentes de l’Union européenne, qui, si on les compare au passé, même dans des périodes cruciales comme celle du lendemain d’Imia, montrent l’acceptation claire de l’Union européenne du fait simple que je viens de vous exposer : à savoir que dans notre région, il y a un pays, la Turquie, qui vient contester la légalité pour ce qui est du droit de la mer et il y a aussi le soutien de ce pays par un autre pays membre de l’Union européenne et de ce fait seulement il existe la nécessité de solidarité. Et je le répète, ce n’est pas seulement une question de droit, mais de puissance diplomatique qui apparaît actuellement dans les mers de Chypre.
November 26, 2018