JOURNALISTE : La mobilité diplomatique dans les relations gréco-turques s’est accélérée et est montée à un autre niveau. Qu’attends le gouvernement des discussions avec la partie turque ? Y a-t-il une possibilité de parvenir à une solution consensuelle ?
M. VARVITSIOTIS : Vous me donnez l’occasion de vous rappeler que la Grèce se positionne depuis toujours en faveur du dialogue avec la Turquie, dans le plein respect du droit international et des principes de bon voisinage. Ankara a été contrainte de venir à la table des discussions après une longue période d’actions unilatérales et provocatrices qui l’on menée à un isolement international. Il est important, après une période de tension, qu’une voie de communication soit établie. Il suffit qu’Ankara s’abstienne, tant au niveau de la rhétorique, que sur le terrain, de faire des déclarations ou d’entreprendre des actions provocatrices. Elle doit prouver concrètement et faire preuve d’honnêteté dans ce cadre de discussions. Elle est invitée à en faire de même en vue également de la réunion des ministres des Affaires étrangères de la Grèce et de la Turquie à Istanbul. Je répèterais que la Grèce reconnaît comme seul différend avec la Turquie la délimitation des zones maritimes. Dans le cas où un terrain d’entente n’est pas trouvé, il y a la possibilité de recourir à la Cour internationale de justice de la Haye, comme l’a affirmé le Premier ministre.
JOURNALISTE : Vous venez juste de rentrer de Paris et jeudi vous vous rendrez, avec le Premier ministre, au sommet de Bruxelles. Est-ce que l’Union européenne est prête à faire le prochain pas et à présenter des sanctions bien précises pour la Turquie ?
M. VARVITSIOTIS : Les entretiens que j’ai eus à Paris, avec mon homologue Clément Beaune, ont confirmé l’excellent niveau des relations entre la France et la Grèce. Des relations historiques, mais aussi stratégiques, qui viennent renforcer la devise « Grèce – France – Alliance ». La France et la Grèce seront à la même table du sommet européen sur les relations UE – Turquie. La Grèce a réussi à ce que les relations euro-turques soient au cœur des conseils européens. D’ailleurs, l’isolement de la Turquie ces derniers temps, associé à la menace des sanctions sont les principaux paramètres ayant conduit la Turquie à la table des discussions. La Grèce a informé les institutions des violations de la Turquie dans toute une série de domaines ayant trait à l’acquis européen et elle s’attend à ce que le rapport de la commission inclut la possibilité d’imposer certaines mesures.
JOURNALISTE : Le Pacte sur l’immigration et l’asile ne satisfait pas les positions grecques, tel qu’il a été présenté jusqu’à maintenant. Voyez-vous des marges d’amélioration afin qu’il y ait une répartition des charges plus équitable dans la question des migrants et des réfugiés au sein de l’Union européenne ?
M. VARVITSIOTIS : Rien n’a été convenu jusqu’à ce que l’on convienne de tout. La Grèce participe activement à la discussion sur le nouveau Pacte sur l’immigration et l’asile et nous espérons parvenir à accord équitable et durable afin que l’Europe puisse être dotée d’une politique migratoire intégrée qui traitera de tous les aspects de la question, de la protection des frontières extérieures jusqu’à la responsabilité commune concernant les retours de ceux dont la demande d’asile a été rejetée. La Grèce s’oppose à une logique de « saucissonnage » pour ce qui est de la question migratoire. Nous sommes en faveur d’une solution globale. La Grèce est d’ailleurs en consultation avec les autres pays du bassin méditerranéen qui sont en première ligne dans l’accueil des migrants et nous essayons de rapprocher de nous des pays ayant une approche holistique, comme la France. Il est nécessaire, selon nous, que le nouveau Pacte sur l’immigration et l’asile soit régi par la nécessité d’un équilibre entre responsabilité et solidarité.
JOURNALISTE : De quels « outils » dispose le ministère des Affaires étrangères pour attirer des capitaux et des investisseurs dans notre pays et que pensez-vous de leur performance jusqu’à aujourd’hui ?
M. VARVITSIOTIS : Depuis le premier jour de gouvernance et pendant toute la durée de la pandémie, la modernisation du cadre institutionnel des visas d’entrées est en cours au ministère des Affaires étrangères. L’objectif est d’attirer des investisseurs, des étudiants et des capitaux de pays tiers. Dans ce contexte, nous avons d’ores et déjà institué le visa d’affaires (business visa), le visa étudiant (student visa) et prochainement nous mettrons en place le visa numérique (digital visa) qui permettra à notre pays de devenir une destination attrayante pour les « nomades numériques » comme on les appelle, des personnes utilisant la technologie moderne qui choisiront la Grèce comme siège professionnel.
JOURNALISTE : Quels seront les avantages du certificat européen de vaccination et que répondez-vous à la critique du parti SYRIZA ?
M. VARVITSIOTIS : L’adoption de la proposition du Premier ministre sur le certificat européen de vaccination ou certificat vert numérique pour faciliter la libre circulation en toute sécurité dans l'UE est un geste revêtant une importance capitale au niveau européen et national. Notre pays, qui dépend largement du tourisme, attend de nombreux avantages de la mise en œuvre de ce certificat et nous espérons que pendant la prochaine période estivale nous verrons les arrivées touristiques doubler par rapport à 2020. Toutefois, il est important d’accélérer les vaccinations au sein de l’UE afin de pouvoir lancer avec sécurité l’activité économique. En ce qui concerne le parti SYRIYA, il s’adonne à une opposition « d’irresponsabilité » et de toute évidence il ne veut pas admettre la réalité : à savoir que le gouvernement Mitsotakis joue un rôle de premier plan. La Grèce ne suit pas les évolutions européennes, elle les façonne !
March 20, 2021