Propos recueillis par les journalistes Christina Korais et Dimitris Takis
JOURNALISTE : Commençons par la question qui vient d'être soulevée et qui concerne Mme Anna Michelle Asimakopoulou. Nous l'avons accueillie à notre émission radio tout à l'heure. Elle nous a dit que les derniers chiffres qu'elle a reçus du ministère de l'Intérieur datent de 2019, lorsqu'elle était candidate au Parlement européen. Aujourd'hui, elle ne pourrait pas le faire, même si elle le voulait, parce que sa candidature n'a pas encore été officiellement annoncée. M. Katrinis nous a dit qu'il soumettrait la question au Parlement, car il s'agit d'un problème majeur. Il s'agit des données dont dispose le ministère de l'Intérieur concernant les expatriés qui ont déclaré qu'ils allaient voter. Ces données soulèvent deux questions. La première est celle de la fuite des données personnelles des personnes qui ont soumis leur demande depuis l'étranger pour voter en tant qu'expatriés par correspondance. Et bien sûr, il y a la question de savoir dans quel mesure ce processus de vote par correspondance est lacunaire. Qu'en dit le ministère des Affaires étrangères?
G. GERAPETRITIS : Tout d'abord, il n'y a pas de fuite de données. La législation existante est extrêmement stricte et a été strictement respectée. D'après les informations dont nous disposons, le ministère de l'Intérieur n'a fourni aucune liste. Et il ne pourrait pas non plus fournir une liste pertinente, car cette liste électronique est active et est continuellement alimentée de données. Aucune liste n'a été fournie aux candidats.
Deuxièmement, les dispositions de la loi concernant les listes sont strictement respectées. Et tel a été le cas dans le passé. Permettez-moi de dire qu'il y a un élément d'hypocrisie dans tout cela, alors que nous recevons tous des centaines de messages provenant de listes électorales. Et lors des dernières élections, si vous me le permettez, Mme Korais, M. Takis, nous avons reçu des messages de tous les candidats. Je ne sais pas si c'est une bonne ou une mauvaise chose. Vous savez, la protection de la vie privée est un enjeu important à l'ère numérique moderne. D'un autre côté, il y a l'information ouverte, il y a les données ouvertes auxquelles n'importe qui peut avoir accès.
Troisièmement, pour conclure, il n'y a absolument aucune faille dans l'intégrité de la procédure électorale par correspondance. C'est exactement le contraire. Comme dans le cas des listes électorales générales, où il y a une liste de toutes les personnes inscrites par bureau de vote, il y a la liste électorale de ceux qui voteront par correspondance.
JOURNALISTE : Et ce que vous nous dites, Monsieur le Ministre, provient des informations qui vous ont été données par le ministère de l'Intérieur, n'est-ce pas?
G. GERAPETRITIS : C'est exact. La procédure électorale par correspondance sera suivie avec une rigueur absolue. Et elle est suivie avec une rigueur absolue. Toutes nos missions diplomatiques à l'étranger ont reçu des instructions.
JOURNALISTE : J'ai vu que vous avez tenu une visioconférence avec Mme Kerameos, à l’intention du personnel des consulats et des ambassades.
G. GERAPETRITIS : Ici, au ministère des Affaires étrangères, nous avons organisé, la semaine dernière, une réunion importante avec la ministre de l'Intérieur, au cours de laquelle nous avons informé toutes les missions diplomatiques à l'étranger, non seulement sur le processus d'inscription sur les listes électorales, mais aussi sur la mise à disposition de moyens facilitant ce processus.
Le vote par correspondance est une conquête importante de la démocratie. Nous devons tous en prendre conscience. Il complète l'universalité du vote et donne plus de sens à notre démocratie. Nous ferions donc bien de le soutenir.
JOURNALISTE : Jusqu'à présent, les personnes qui ont déclaré qu'elles voteraient par correspondance sont davantage des résidents en Grèce que des expatriés.
G. GERAPETRITIS : C'est tout à fait raisonnable, car le processus d'information n'a pas encore commencé. Nous organiserons donc une série d'événements d'information. Nous aurons, dans le monde entier et en présentiel des ministres, la ministre de l'Intérieur, le ministre délégué à l'Intérieur, ainsi que le Secrétaire d’État aux Affaires étrangères, M. Kotsiras, qui est en charge, de sorte qu'il y aura une communication d’informations complète. Je pense qu'il y aura une mobilisation importante. Nous comprenons tous, bien sûr, qu'il s'agit d'élections pour le Parlement européen, où l'intérêt est quelque peu limité par rapport aux élections nationales. Mais je suis tout à fait optimiste et pense que nous aurons une très forte participation. Et je pense que c'est une justification importante d’un effort consenti par tous les partis pour enfin établir le vote par correspondance en Grèce également.
JOURNALISTE : Monsieur le Ministre, vous êtes le ministre des Affaires étrangères, mais le sujet du jour est aussi la tragédie nationale de Tempé. Il existe d'ailleurs un mouvement de collecte de signatures pour une enquête préliminaire sur cette question majeure. Cinquante-sept personnes sont mortes. De nombreux scénarios sont débattus quant à l'ampleur de la dissimulation et à l'identité de la personne qui a donné l'ordre. Sur le site de l'accident, de nombreuses personnes n'ont même pas pu récupérer les cendres de leurs enfants pour les enterrer. Nous voulons votre réponse, étant donné que vous étiez également en charge du projet de réouverture de la ligne Athènes-Thessalonique, dans le précédent gouvernement de la Nouvelle Démocratie.
G. GERAPETRITIS : Il y a deux niveaux, Madame Korais, et je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer sur cette question. Il s'agit d'enquêter sur les causes et les responsabilités de l'accident de Tempé et il s'agit également de la réouverture et de la modernisation en toute sécurité de l'infrastructure ferroviaire. Pour ce qui est du premier niveau de l'enquête sur les responsabilités, je pense qu'il est absolument clair et compréhensible pour tout le monde que nous vivons une tragédie indicible et que tout le monde ne peut qu'imaginer, mais il est difficile de s'identifier à la douleur des personnes qui ont perdu leur famille, leurs proches et leurs amis. Au-delà de cela, il est important qu'une enquête complète et sérieuse soit menée. Et permettez-moi de dire qu'une enquête complète et sérieuse est en cours, et a été menée en partie, à plusieurs niveaux, à quatre niveaux. Une enquête judiciaire est actuellement en cours, laquelle progresse rapidement compte tenu de la lenteur qui caractérise habituellement ces procédures en Grèce. Nous avons une enquête administrative, menée par le Comité qui a été créé et dont l’impartialité ne peut pas être contestée, et à cet égard je pense que nous sommes tous d'accord. Nous pouvons être en désaccord sur certains points, mais je pense qu'il s'agit d'un jugement impartial, présentant toutefois, à mon avis, des problèmes.
À un troisième niveau, nous avons un processus parlementaire, qui se déroule dans le cadre de la commission d'enquête, et je voudrais dire qu'il y a un quatrième niveau, qui n'a pas été suffisamment mis en évidence, à savoir l'intervention européenne qui a lieu sur cette question. J'ai entendu et je peux comprendre la douleur des gens, mais il est bon de ne pas donner l'impression qu'il y a eu une opération...
JOURNALISTE : de dissimulation,
G. GERAPETRITIS : ...visant à entraver le déroulement d’une enquête de la part de la Commission européenne. C'est valable et je le dis avec respect pour les gens qui soulèvent cette question. Il est vrai que c'est exactement le contraire qui est vrai. Moi-même, Mme Korais, je me suis rendu à Bruxelles. J'ai rencontré le commissaire responsable et j'ai demandé qu’une enquête soit menée par l'Agence ferroviaire européenne. C’est moi qui ai lancé le processus. Nous savons, bien sûr, et le commissaire responsable me l'a également dit, qu'au niveau de la Commission européenne, la durée d’une telle enquête, en raison des procédures, mais surtout par souci d'exhaustivité de l'enquête, est comprise entre 12 et 18 mois. Elle a déjà commencé et, d'après ce que j'ai compris, elle sera bientôt terminée. C'est une enquête multidimensionnelle qui est menée, et je ne comprends pas comment on peut accuser quelqu'un de dissimulation alors qu'à tous ces niveaux, il y a eu une enquête complète qui est en cours.
JOURNALISTE : Une question, Monsieur le Ministre, qui est posée par Mme Karystianou et beaucoup d'autres. Ils disent que le procureur européen a envoyé une question au Parlement sur la non-application des dispositions du contrat 717 qui impute une responsabilité pénale à M. Karamanlis et à M. Spirtzis. N’avez-vous pas consenti au déroulement d’ une enquête préliminaire à ce sujet?
JOURNALISTE : S'agissait-il d'une erreur après tout? De nombreuses personnes affirment que la non-application des dispositions du contrat 717 est directement liée à l'accident de Tempé et insistent sur le fait que des accusations criminelles devraient être portées ou, au moins, que les personnes en question devraient être traduites devant les juridictions compétentes afin que celles-ci puissent statuer sur cette affaire. Que pensez-vous à cet égard?
G. GERAPETRITIS : Permettez-moi de vous faire part de mon expérience au sein du ministère des Infrastructures et des Transports. En ce qui concerne les prorogations. Tout d'abord, toutes les prorogations qui ont été accordées avaient l'approbation de la Commission européenne. Il n'y a eu aucune prorogation arbitraire. Par conséquent, lorsque nous nous plaignons des prorogations, qui, je le répète, ont toujours été la politique de tous les gouvernements...
JOURNALISTE : Le Procureur …
G. GERAPETRITIS : Je vous le répète, parce que je le sais de par ma propre présence...
JOURNALISTE : Le procureur européen ne le savait-il pas?
G. GERAPETRITIS : Il n'y a pas eu de prorogation sans l'accord de la Commission européenne. Deuxième question. Nous comprenons qu'il y a effectivement eu des retards importants. Ces retards importants sont liés à un certain nombre de causes. Il ne s'agit pas d'un phénomène grec. En particulier dans les grands projets d'infrastructure ferroviaire à travers l'Europe, il y a malheureusement eu des retards importants dans la période d'après-guerre.
JOURNALISTE : Monsieur le Ministre, abordons maintenant quelques questions de politique étrangère.
G. GERAPETRITIS : Oui, permettez-moi de conclure puisque vous m’avez posé la question.
JOURNALISTE : Nous insistons trop sur la procédure.
G. GERAPETRITIS : Non Mme Korais, il ne s’agit pas d’une procédure.
JOURNALISTE : Y a-t-il ou non des responsabilités pénales?
G. GERAPETRITIS : Vous comprenez que je ne suis pas un juge pour attribuer des responsabilités. Moi je peux vous parler des faits et les faits sont les suivants. Aucune prorogation n'a été accordée sans l'approbation de la Commission. Aucun pays n'a achevé ces projets dans les délais. Et nous comprenons, pour dire ceci, que lorsque nous parlons de responsabilité pénale pour le retard d'un projet, nous comprenons que nous devons penser un peu à la causalité. On dit que si le projet avait été achevé, l'accident ne se serait pas produit. Avec tout le respect que je vous dois, permettez-moi de vous dire que vous ne pouvez pas le savoir et qu'en fin de compte, quelle que soit l'amélioration du système, il y aura toujours une personne qui sera responsable du fonctionnement des systèmes. Nous ne pouvons pas éliminer cet élément. Le facteur humain est toujours présent. Permettez-moi de vous dire que les initiatives prises par le gouvernement à un rythme très rapide ont permis d'améliorer considérablement le réseau. Malheureusement, après la catastrophe de Daniel, une partie de l'axe central s'est dégradée. Des efforts concertés sont déployés pour que nous puissions avoir un chemin de fer absolument sûr.
JOURNALISTE : Un parent embarquera-t-il son enfant dans le train pour aller d'Athènes à Thessalonique ou vice versa?
G. GERAPETRITIS : Bien sûr qu'il le fera. Permettez-moi de vous dire que nous avons tous des enfants et que nous comprenons tous à quel point cette question est tragique, compte tenu des circonstances. Et malheureusement, tous les déplacements comportent un élément de risque.
JOURNALISTE : Et une question sur les affaires étrangères, Monsieur le Ministre.
JOURNALISTE : M. Samaras, l'ancien Premier ministre, lors de la conférence du journal Kathimerini, se référant à une suggestion faite par Mme Bakoyannis un peu plus tôt selon laquelle un consensus des trois partis est nécessaire pour aller de l'avant avec un accord avec la Türkiye sur les relations gréco-turques, a déclaré que pour lui, un tel consensus ressemblait à un compromis et qu’il serait contre un tel compromis. Préparez-vous un compromis avec la Türkiye auquel s’opposera l’ancien Premier ministre ?
G. GERAPETRITIS : Tout d'abord, permettez-moi de souligner que le consensus est une bonne chose, ce n'est pas une mauvaise chose. Je ne comprends pas ce que l'ancien président a voulu dire lorsqu'il a fait référence à ce...
JOURNALISTE : Il dit que lorsque vous demandez un consensus, c'est comme si vous vouliez aller au-delà de ce que vous avez promis. Vous demandez donc un compromis.
G. GERAPETRITIS : Ecoutez, les choses sont simples. Lorsqu’il y a des questions importantes qui affectent non seulement la génération actuelle, mais aussi les générations futures, on doit avoir autant de consultations que possible sur cette question et autant de consensus que possible. Il est évident qu'en fin de compte, la responsabilité des actions incombe au gouvernement responsable. Ni à l'Opposition, ni à la société. C'est le gouvernement qui est responsable. D'autre part, je considère qu'il est de mon devoir, lorsqu'il s'agit de décisions majeures qui affectent l'ensemble du peuple grec et concernent les générations futures, de faire appel aux autres partis parlementaires, d'écouter leurs points de vue et, si possible, d'être en mesure de les intégrer, si l'on pense que c'est la bonne chose à faire. Le gouvernement grec et moi-même sommes responsables devant le peuple grec. Nous rechercherons bien sûr un consensus sur tous les grands chapitres, non seulement avec la Türkiye, mais aussi sur tous les grandes questions nationales. À partir de là, nous sommes responsables devant le peuple grec, qui nous jugera.
JOURNALISTE : Mais vous ne nous avez pas dit : allez-vous faire des compromis avec la Türkiye?
G. GERAPETRITIS : Il n'y a pas de compromis. Ce qu'il y a, ce sont des discussions, des consultations, pour que nous puissions trouver les points sur lesquels nous convergeons. Il va sans dire, et je l'ai dit à maintes reprises, qu'il n'y a pas de discussion sur les questions de souveraineté et qu'il n'y en aura pas. Je ne discuterai jamais des questions de souveraineté. En revanche, je veux insister sur un point important. Il y a deux et seulement deux solutions par défaut. Soit nous essayons de vivre dans la paix et la sécurité, en essayant de ne pas transformer les tensions en crises, soit nous restons toujours sur nos gardes.
JOURNALISTE : Mais la Türkiye ne le fait pas, parce que la Déclaration d'Athènes semble être un peu tombée dans l’oubli, la Türkiye est revenue à sa rhétorique, sa rhétorique agressive.
G. GERAPETRITIS : Madame Korais, pensez-vous que nous nous trouvons actuellement au même niveau qu'en 2015, 2021 ou 2022 ? La réponse est très simple. En ce moment, il y a effectivement des positions opposées. Après tout, la déclaration d'Athènes a également respecté cela. C'est nous qui avons dit que nous ne nous écarterions pas de nos positions de base. Mais quel est l’objectif ? Maintenir nos positions de base:Premièrement, pouvoir discuter sobrement et deuxièmement, ne pas rester toujours en état d’alerte. Voulons-nous ce type de débat ? Et vous savez, nous avons tous une dette, nous avons tous une dette envers la société et les générations futures. Pour moi, la chose la plus facile à faire serait d'adopter une rhétorique très agressive à l'égard de la Türkiye. Cela me rendrait peut-être plus populaire. Cependant, je ne me préoccupe pas de ma popularité, ma préoccupation est d’œuvrer dans l’intérêt de mon pays.
JOURNALISTE:Les préparatifs du voyage du Premier ministre à Ankara avancent-ils? Avons-nous une date ou est-ce que ce sera fin avril, début mai?
G. GERAPETRITIS : En toute certitude, le voyage du Premier ministre à Ankara aura lieu en mai. En effet, il faudrait d'abord que les trois piliers du dialogue, à savoir le dialogue politique, les mesures de confiance et l'agenda positif, aient progressé. Et nous aurions dû tenter de synthétiser toutes les conclusions. Madame Korais, pour moi, il est important non seulement de conclure des accords, ou d'essayer de désamorcer des crises, mais aussi assurer le suivi de la mise en œuvre de ces accords afin qu'ils produisent un résultat bénéfique. La bonne chose à faire est donc d'avoir des résultats tangibles et ceux-ci devraient être approuvés par les dirigeants des deux pays.
JOURNALISTE : Merci, Monsieur le Ministre, bonne journée.
G. GERAPETRITIS : Je vous remercie.
[Seul le prononcé fait foi]
March 4, 2024