Pourparlers intercommunautaires
Tout de suite après l’ouverture des pourparlers entre les deux communautés, en février 1975, sous l’égide du Secrétaire général des Nations Unies, la partie turque a procédé à une proclamation unilatérale de l’«Etat fédéral turc» qui a été condamnée par la résolution 367 (1975) du Conseil de sécurité des Nations Unies. En outre, la partie turque a violé l’accord bicommunautaire signé à Vienne en août 1975. Selon les dispositions de cet accord, la Türkiye avait l’obligation de fournir aux 25.000 Chypriotes grecs restés sur les territoires occupés de Chypre « toute aide nécessaire afin qu’ils puissent mener une vie normale ». Enfin, la partie turque n’a pas tenu ses engagements de soumettre des propositions précises sur l’aspect territorial de la question.
En 1977 et 1979 ont démarré les pourparlers entre les deux communautés sous l’égide des Nations Unies. Ils ont abouti à deux accords au Sommet qui ont défini comme objectif de parvenir à une solution fédérale dans le cadre de la souveraineté de l’Etat de Chypre, du respect des libertés et des droits fondamentaux de tous ses citoyens et de la démilitarisation de l’île. L’accord de 1979 prévoyait également que la priorité serait donnée à un accord sur la réinstallation des habitants chypriotes grecs à Varosha sous les auspices de l’ONU et que cet accord serait appliqué sans attendre les résultats des négociations en vue d’un règlement global de la question.
En août 1980, l’envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies de l’époque a déclaré que « les deux parties ont réitéré leur soutien à une solution sur la base d’une fédération bicommunautaire sur l’aspect constitutionnel et bizonale sur l’aspect territorial ». Cette dernière phrase a été adopté par les Résolutions du Conseil de Sécurité, en commençant par la Résolution 649/1990.
En novembre 1983, alors qu’une nouvelle initiative du Secrétaire général des Nations Unies était en cours, la partie turque proclama les territoires occupés de Chypre « Etat indépendant », que seule la Türkiye reconnaît jusqu’à aujourd’hui. Les Résolutions 541 (1983) et 550 (1984) du Conseil de sécurité des Nations Unies condamnèrent cette déclaration unilatérale, ainsi que toutes les autres actions sécessionnistes qui suivirent, les qualifièrent d’illégales et juridiquement nulles et non avenues et demandèrent le retrait immédiat des troupes turques. Les résolutions susmentionnées invitèrent également tous les États-membres à ne pas reconnaître le prétendu État, formé suite à des actions sécessionnistes, et à ne pas encourager, ni aider cette entité sécessionniste, d’aucune manière que ce soit. En outre, les résolutions condamnèrent les menaces turques de colonisation de Varosha et demandèrent que l’administration de la région soit transférée aux Nations Unies.
Au cours de la période 1984-1992 les Nations Unies ont entrepris une série d’initiatives en vue de parvenir à un cadre convenu de négociation sur un règlement global. Parmi ces initiatives-là plus importante était un « ensemble d’idées » présenté par le Secrétaire général Boutros Boutros-Ghali qui a été adopté par le Conseil de sécurité en tant que base aux négociations ultérieures. Ces dernières n’ont pas pu se dérouler en raison de l’intransigeance de la partie turque qui a été condamnée par la Résolution 789 (1992) du Conseil de sécurité.
La communauté internationale a consenti de nouveaux efforts pour parvenir à une solution globale à la question chypriote au cours de la période 1999-2004, en vue de l’adhésion de la République de Chypre à l’UE et de l’ouverture des négociations d’adhésion de la Türkiye. En novembre 2002, le Secrétaire général des Nations Unies a soumis à la table des négociations son propre projet de règlement global. Quatre versions révisées ont suivi. La dernière version (« Plan Annan 5 »), résultat de l’arbitrage du Secrétaire général des Nations Unies qui n’a toutefois pas conduit à un accord, a été finalement soumise à des référendums distincts lors desquels les Chypriotes grecs ont voté à 75,83% contre le plan. Conformément aux dispositions de l’accord convenu entre toutes les parties (New York, 13.2.2004), le plan fut considéré comme nul et non avenu et sans aucun effet juridique.
En dépit du rejet du plan proposé, le gouvernement chypriote et la majorité des forces politiques chypriotes grecques sont restés attachés à l’objectif de la réunification de Chypre, dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies et des principes et valeurs de l’UE. La partie chypriote grecque a assumé une série d’initiatives qui ont abouti à une compréhension et à une acceptation plus élargie au niveau international de sa position à savoir que la méthode des calendriers artificiels et de l’arbitrage ont été prouvés contreproductifs pour ce qui est de l’atteinte d’une solution convenue à la question chypriote.
De nouvelles négociations globales ont de nouveau démarré ce qui a été le résultat des initiatives du Président Christofias (2008-2012) en septembre 2008. Ces négociations ont gelé en effet vers la fin mars 2012, en raison de la décision du dirigeant Chypriote turc, M. Eroglu de ne plus assister aux pourparlers directs.
Des pourparlers directs ont de nouveau démarré, après une période de deux ans, entre le Président chypriote Anastassiadis et M. Eroglu, avec leur première rencontre officielle et accord sur le texte du Communiqué conjoint du 11 février 2014.
Ladite Déclaration prévoit, entre autres, la négociation sur tous les aspects de la question chypriote, y compris ceux portant sur la gouvernance et la répartition des compétences, le patrimoine, ainsi que sur de questions ayant trait à l’UE et à l’économie, et à l’aspect territorial et international de la sécurité.La déclaration prévoit en outre expressément que seule une solution convenue conjointement peut par la suite être soumise à un référendum qui sera tenu séparément et en même temps au sein des deux communautés et que « toute forme d’arbitrage est exclue ».
Les pourparlers ont été interrompus en octobre 2014 en raison de provocations de la Türkiye et de violations de la ZEE chypriote qui ont duré au total presque sept mois.Leur réouverture a été possible le 15 mai 2015.Le 1er décembre 2016, le Président Anastassiadis et M. Akinci sont convenus de poursuivre les négociations à Genève, Suisse, avec un échange de cartes et l’organisation par la suite d’une Conférence internationale sur Chypre.
La conférence internationale sur Chypre, sous l’égide du Secrétaire général, qui a commencé à Genève le 12 janvier 2017, a été effectué en trois phases distingues, à Genève (12 janvier 2017), au Mont Pèlerin (18-20 janvier 2017) au niveau technique-administratif et, après des nouvelles négociations à Nicosie- à Crans Montana, du 30 juin à 6 juillet 2017, en présence du PrésidentAnastasiadis, du dirigeant chypriote-turc m. Akinci, des ministres des Affaires étrangères de la Grèce, du Royaume Uni et de la Türkiye et du Vice-Président de la Commission Européenne, m. Timmermans. Le Secrétaire général de l’ONU était représenté par son Député, à l’occasion de l’ouverture de la Conférence. Dans sa déclaration, le Secrétariat général de l’ONU a déclaré que le Secrétaire général de l’ONU viendrait à Crans Montana le 29 juin et devrait rester là jusqu’au 5 juillet 2017.
En fin, le Secrétaire général de l’ONU a pris la Présidence de la Conférence en 30 juin 2017 et a présenté un cadre à six points, connue comme « Cadre Guterres » (le cadre est décrit aux paragraphes 19-24 du Rapport du Secrétaire général sur sa mission des bons offices à Chypre). Entre autres il est à noter qu’en ce qui concerne l’aspect international de la Sécurité et des Garanties, le droit d’intervention unilatérale a été caractérisé comme non plus « viable » et le Secrétaire général a indiqué qu’il fallait créer un nouveau système accordé par les Parties. Pour ce qu’est de la « présence des forces grecques et turques sur l’île » il a été décidé que les questions en suspens relatives aux troupes seraient plus utilement examinées au plus haut niveau politique avec les Premiers Ministres des trois puissances garantes.
Le Secrétaire général de l’ONU a quitté le Crans Montana le prochain jour, en stressant dans une déclaration de son représentatif, qu’il reste engagé à continuer les efforts pour trouver une solution. Il est retourné à Crans Montana, le 6 juillet 2017, quand, après le diner avec les chefs des délégations, le Secrétaire général de l’ONU a annoncé, entre autres : « j’ai le profond regret de vous informer que, malgré l’implication et l’engagement très forts de toutes les délégations et des différentes parties-les délégations chypriotes grecque et turque, la Grèce, la Türkiye, le Royaume-Uni et l’Union européenne en tant qu’observateur- et bien sûr, l’équipe des Nations Unies, la Conférence sur Chypre a été clôturée sans qu’un accord soit conclu ». En répondant à des questions, il a dit que « La conférence est close. Cela ne signifie pas que d’autres initiatives ne peuvent être pas développées pour résoudre le problème de Chypre » et il a rappelé que « les Nations Unies jouent un rôle de facilitateur et qu’elles sont toujours à la disposition des parties désireuses ».
En 25/11/2019 la première, après le Crans Montana (juillet 2017), rencontre commune du Secrétaire général de l’ONU m. Guterres a eu lieu à Berlin avec le Président Anastasiadis et le dirigeant chypriote-turc Akinci. D’après une annonce du Secrétaire général, les deux dirigeants se sont félicités de l’engagement du Secrétaire général à résoudre le problème de la division de l’île et ils ont réaffirme au chef de l’ONU leur engagement et leur détermination à parvenir à un règlement fondé sur une fédération bizonale et bi-communale dotée de l’égalité politique, comme le prévoient les résolutions pertinentes du Conseil de Sécurité de l’ONU, y compris paragraphe 4 de la résolution du Conseil de Sécurité 716 (1991). En plus, les deux dirigeants ont convenu qu’un règlement global et durable du problème de Chypre dans un horizon prévisible était de la plus haute importance pour le bien-être futur des deux communautés et que le statut quo est insoutenable. En outre, les deux dirigeants ont réaffirmé leur attachement au cadre en six point que M. Guterres a présenté le 30 juin 2017, en vue de parvenir à un accord stratégique ouvrant la voie à un règlement global du problème.
En 27-29 Avril 2021, le Secrétaire géneral de l’ONU a organisé une réunion informelle « 5+1 » sur la question de Chypre à Génève dans laquelle le President de la République de Chypre m. Nicos Anastasiades, le dirigeant chypriote-turc m. Ersin Tatar et le ministre des Affaires étrangères de la Grèce m. Nikos Dendias, du Royaume Uni m. Dominic Raab et de la Türkiye m. Mevlut Cavusoglu.
La rencontre avait pour but la création des conditions appropriés pour la reprise de négociations formelles sur la question de Chypre comme prévu par les résolutions pertinentes du Conseil de Sécurité de l’ONU et au sein de l’acquis.
La partie grecque, ainsi que la chypriote, ont exprimé que ce cadre est le seul cadre accepté pour la reprise de négociations.
Ils ont aussi souligné que la participation active de l’UE à chaque étape du processus est une condition nécessaire pour la résolution du problème chypriote, pour garantir la compatibilité de la solution trouvée avec l’acquis communautaire et pour continuer, sans arrêt, la participation efficace de la République de Chypre dans la prise des décisions et dans tout le fonctionnement de l’UE.
Cependant, en tenant en compte que la partie turque et chypriote-turque avec son nouveau dirigeant, m. Ersin Tatar, envisageait une solution à deux états, totalement hors cadre des résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU, après la reconnaissance d’un statut international égal pour les chypriotes-turcs, la divergence entre les deux parties est devenue claire.
M. Guterres a proposé, en fin, la continuation des efforts pour la reprise des pourparlers et sa proposition a été accepté par toutes les parties.