M. N. Mladénov (ministre bulgare des Affaires étrangères) : Bonjour à tous. Je tiens à vous remercier pour votre présence et notamment mes homologues qui ont accepté cette invitation à cette réunion. Nous sommes en train de discuter depuis longtemps de l’organisation de cette réunion car la Bulgarie en tant que membre de l’UE, tout comme nos amis de la Grèce, notre pays voisin, nous avons probablement une responsabilité historique d’aider les pays des Balkans occidentaux qui attendent l’ouverture des négociations d’adhésion pour adhérer à l’UE. Nous devons donc aider ces pays à se préparer et à entamer ce parcours.
L’intégration européenne comporte en général trois grands critères.
Premièrement, les conditions imposées par la législation européenne doivent être remplies et à cette fin peuvent contribuer les pays qui sont déjà membres de l’UE. C’est pourquoi, à travers aussi la déclaration d’aujourd’hui, nous manifestons notre volonté d’aider la Serbie, forts de notre expérience et de nos connaissances, à remplir pleinement les critères d’adhésion.
Deuxièmement, la coopération régionale. Nous devons montrer que dans les Balkans la coopération non seulement peut être établie, mais est déjà un fait.
Troisièmement, les relations de bon voisinage revêtent une importance majeure pour le règlement de toutes les questions bilatérales et multilatérales.
C’est pourquoi aujourd’hui, à l’issue de nos entretiens, nous sommes convenus d’organiser des réunions régulières dans le cadre desquelles nous aborderons tous les dossiers importants de notre région. La prochaine réunion se tiendra en Grèce et la troisième à Belgrade. Par conséquent, nous pourrons poursuivre ce dialogue sur toutes les questions qui contribuent à la pleine adhésion des pays des Balkans occidentaux à l’UE.
M. D. Droutsas : Tout d’abord, je tiens à remercier M. Mladénov pour avoir pris cette initiative et convoqué cette réunion à Sofia aujourd’hui entre la Grèce, la Bulgarie et la Serbie. Je pense que notre coopération est axée sur des bases solides, à savoir sur nos très bonnes relations traditionnelles de longue date entre les trois pays. Et, bien entendu, nos discussions ont été dominées par la perspective européenne des Balkans occidentaux et notamment de la Serbie.
Je pense que la Grèce et la Bulgare en tant que partenaires au sein de l’UE et alliés au sein de l’OTAN nous partageons la même vision pour la paix, la stabilité dans toute la région et au-delà de celle-ci. S’agissant de cette question, je partage les points de vue de M. Nikolaï concernant le parcours d’adhésion et les aspirations européennes de la Serbie et je tiens encore une fois à manifester notre plein engagement et notre plein soutien à l’avenir de la Serbie au sein de notre famille européenne.
J’ai eu également l’occasion d’engager avec mes chers amis et homologues une discussion portant sur le rôle de la Grèce concernant cette question. Nous avons eu l’occasion de discuter de nouveau de l’initiative relative à l’agenda 2014 pour les Balkans occidentaux. Je pense que nous avons réussi à travers cette initiative à insuffler un nouvel élan au parcours d’adhésion des Balkans occidentaux au sein de l’UE. Cela est indispensable. Je pense que nous avons atteint cet objectif. Maintenant, il faut faire encore un pas en vue de doter d’un contenu spécifique cette initiative, l’ « Agenda 2014 » et à l’égard de cette question j’ai eu l’occasion d’affirmer que la Grèce assumerait la présidence de l’UE en 2014 et que notre objectif serait d’organiser dans le cadre de cette présidence une réunion au sommet entre l’UE et les pays des Balkans, comme nous l’avons fait en 2003 lors de la dernière présidence de la Grèce qui a donné naissance à l’Agenda de Thessalonique. Par conséquent, notre objectif est de lancer un appel en vue d’organiser une réunion au sommet qui sera appelée « Thessalonique II », si vous voulez, et portera sur les Balkans occidentaux. Et lors de cette réunion au sommet, nous voudrions fixer une date précise pour la pleine adhésion de tous les pays des Balkans occidentaux. Je pense que le moment serait opportun pour parvenir à une date précise pour l’adhésion de ces pays. Il faut, bien entendu, accomplir beaucoup de travail encore pendant cette période mais je pense qu’à travers une bonne coopération – et j’espère que cette coopération se poursuivra entre les deux pays – nous pourrons considérablement contribuer à la réalisation de cet objectif en vue du processus d’adhésion des Balkans occidentaux, une vision que nous partageons tous.
M. V. Jeremic (ministre serbe des Affaires étrangères) : L’adhésion à l’Union européenne constitue une priorité stratégique de la Serbie et je tiens à remercier la Grèce et la Bulgarie pour leur soutien à la candidature de notre pays.
[Note : Les déclarations d’ouverture du ministre serbe des Affaires étrangères sont rapportées au style indirect car le ministre serbe a parlé en serbe sans interprète :
Le ministre serbe des Affaires étrangères, M. Vuk Jeremic s’est dit satisfait de l’élan qui a été donné au parcours d’adhésion de Belgrade lors de la réunion tripartite qui s’est tenue aujourd’hui à Sofia.
Dans son introduction, M. Jeremic a signalé la grande importance que revêtaient les initiatives de la Grèce en faveur de l’accélération du parcours de son pays mais aussi de tous les Balkans vers la grande famille européenne.
Par ailleurs, il a indiqué que la Réunion au somme de Thessalonique en 2003 avait été le point de départ du parcours des pays des Balkans vers l’Europe unie et il s’est également référé à la réunion au sommet imminente à Thessalonique lors de laquelle un pas important devrait être entrepris en vue d’appliquer l’Agenda 2014 et fixer des dates précises pour la pleine adhésion de la Serbie et autres pays des Balkans occidentaux ].
Questions :
Mme Andelina Marini (EU Insight) : Comme l’a affirmé M. Droutsas, en 2014 vous vous attacherez éventuellement à fixer une date précise pour l’adhésion des pays des Balkans occidentaux. Avez-vous précisé cette date dans votre déclaration à Bruxelles ? Vous avez toutefois évoqué l’an 2018.
Question adressée à M. Jeremic : Pensez-vous que cet objectif est réaliste ? La Serbie pourrait – elle entamer les négociations d’adhésion après que le questionnaire soit rempli et M. Mlandic arrêté ?
M. D. Droutsas : L’ « Agenda 2014 » et la date y relative ont été choisis pour des raisons symboliques. Cette date marque 100 ans depuis le déclenchement de la Première guerre mondiale et constitue le moment opportun pour déployer de nouveau des efforts pour un élargissement aux Balkans occidentaux. Vous avez mentionné l’année 2018 une date à laquelle je me suis également référé dans l’un des mes discours précédents. 2018 marque 100 depuis la fin de la Première guerre mondiale et cette date revêt également un caractère symbolique. Par conséquent, je pense que cette date pourrait être réaliste et en plus, en 2018 la Bulgarie exercera la présidence de l’UE pour la première fois ce qui n’est qu’un bon augure.
M. V. JEREMIC : L’année 2011 marque le début des négociations pour la Serbie. Je pense que 2011 pourrait être une date importante pour les Balkans qui garantira la poursuite du processus d'élargissement dans cette région. Nous espérons que cette année-là marquera la fin des négociations pour la Croatie et le début des négociations pour la Serbie. Nous déploierons de gros efforts pour que cela puisse être réalisable en 2011 et ce sera également l'année où la Serbie accordera une grande attention à la coopération régionale. C'est à cette date qu'elle assumera la présidence de trois grandes organisations régionales. C'est pourquoi les consultations, entre nous trois, ici à Sofia étaient particulièrement utiles et je pense que les prochaines rencontres qui auront lieu en Grèce et à Belgrade nous aideront à voir comment les choses avancent et si nous réalisons notre objectif, ce que nous considérons comme étant notre priorité et cela est l'accomplissement du processus d'intégration européenne. Nous soutenons pleinement l'idée de la Grèce, que le sommet «Thessalonique 2» ait lieu en 2014 et nous espérons que d’ici là la date sera fixée. Tout naturellement, cela dépendra de la dynamique et des évolutions dans la région, en Europe en général et dans le monde en particulier, mais nous mettrons tout en œuvre pour garantir la satisfaction des critères tout au long de notre parcours d'adhésion. En 2011 et toutes les années jusqu'à l'année d'adhésion qui devra revêtir un caractère symbolique, ce qu'a dit Dimitris, et je dirais que 2014 est une année où cela peut être annoncé. Mais ne parlons pas de dates avant cela.
M. N. MLADENOV : J’estime que le symbolisme des années 2014 et 2018 est clair pour nous tous. L'année 2011 sera vraiment une année clé où nous verrons, je l’espère, tous les pays des Balkans occidentaux faire au moins un pas en avant vers l'intégration. Nous attendons avec impatience de voir l'avis sur la demande de la Serbie et le lancement des négociations. Nous attendons avec impatience que le Monténégro obtienne le statut de pays candidat à l’adhésion. Nous attendons avec impatience que la plupart des citoyens des Balkans occidentaux puissent voyager sans visa dans les pays de l'Union européenne à partir du 1er janvier 2011 et nous espérons que très bientôt nous aurons une feuille de route afin que chaque pays des Balkans puisse voyager dans les pays de l’Union européenne sans visa. Notre rencontre d’aujourd’hui et nos actions pour l’année prochaine seront axées sur la mobilisation du soutien au sein de l'UE en vue de l’élargissement.
κ. Nikolaï PETROF (journal TRUD) : Estimez-vous que la Serbie a dérogé aux valeurs européennes en boycottant à moitié la cérémonie de remise du Prix Nobel de la Paix ? Alors qu'il y a peu vous avez soutenu l'adhésion du pays en soulignant dans la déclaration que les pays souhaitant adhérer à l'UE doivent partager pleinement les valeurs de l'UE.
Une question à M. Jeremic, que pense-t-il de l'article publié dans le Blitz disant qu’il serait bientôt remplacé après son boycottage de la cérémonie de remise du prix Nobel de la Paix ?
M. N. MLADENOV : Permettez-moi de répondre en premier à votre question. Le prix Nobel de la paix est décerné par le Comité Nobel à Oslo après une évaluation rigoureuse de la personnalité à laquelle est remis le prix et du processus de remise du prix. Pour nous tous, il est clair que lorsqu’un prix concernant les droits de l’homme est remis, cela suscite parfois des doutes, voire des malentendus auprès de certains pays, car la protection des droits de l'homme est notre devoir fondamental qui souvent suscite des réactions dans certains pays du monde. Je ne pense pas qu’il faille faire beaucoup de bruit autour de cette affaire, car un pays, un peuple appartient aux valeurs d’une société sur la base de très nombreuses actions et critères. Je suis certain que plus l’heure de l’adhésion de la Serbie à l’UE approche – lorsque tous les pays des Balkans occidentaux seront membres de l'UE - plus vos doutes se dissiperont, car nous ne doutons pas que les citoyens serbes, le peuple serbe, tout comme tous les peuples des Balkans partagent les valeurs humanitaires générales que chacun de nous défend.
M. V. JEREMIC : Je voulais avant tout dire que la Serbie accorde la plus grande attention et une priorité de premier rang à la protection des droits de l’homme et le respect des droits de l’homme au sein du territoire serbe qui est soumis au contrôle total des autorités serbes est éloquent. Par conséquent, nous continuerons de faire ce que nous devons faire pour que cela continue. Pour toute question relevant de politique étrangère, chaque pays négocie pour la protection de ses intérêts nationaux vitaux et c'est ce que font tous les pays. Nous coopérons étroitement avec des pays, proches ou lointains, qui s’intègrent dans ce que nous appelons l’intérêt national vital. Tel que je viens de le dire, les droits de l’homme sont une valeur à travers laquelle nous manifestons notre engagement vis-à-vis du respect de ces droits dans une région qui dans le passé était confrontée à de sérieux problèmes, et il n'y a pas de cela si longtemps. En ce qui concerne les rumeurs sur les affaires politiques internes en Serbie, je pense qu'il n'est pas juste d'en discuter au niveau de la politique étrangère. Tous les jours notre pays est la cible de rumeurs, notamment avant des événements politiques importants et surtout après.
M. Boïko BORISOFF (ANA-MPA) : Une question à M. Mladénov : dans votre interview accordée au journal The Sofia Echo vous parlez des relations entre la Bulgarie et l’ARYM, en parlant des efforts faits par Sofia pour réduire les tensions dans ses relations avec Skopje et lever les obstacles à la perspective européenne de Skopje, ce qui est dans l’intérêt tant de l'ARYM, que de la stabilité des Balkans et de l'UE. Y a-t-il des signes de la part de Skopje allant dans ce sens, à savoir que les négociations entre Sofia et Skopje auront une issue positive en vue de la signature de la déclaration des relations de bon voisinage et de coopération? Par ailleurs, vous avez émis l'espoir que Skopje répondra de manière constructive aux dernières propositions de la Grèce en vue de la résolution du fameux litige portant sur le nom.
Une question à M. Droutsas : Quelles sont les nouvelles propositions d’Athènes et trouvent-elles un écho auprès de Skopje ?
M. N. MLADENOV : J’estime que la Bulgarie entretient d’excellentes relations avec tous ses voisins et a su prouver, dans les moments les plus difficiles ces dernières années, qu'elle était capable d’aider tous ses voisins. Que cela se passe après la déclaration d'indépendance, ou pendant les sanctions sous le régime Milosevic ou à tout autre moment, nous avons toujours été constructifs et continuerons de l'être. J'estime que l'intégration européenne pour chaque pays européen, comme je l'ai dit au début, est assortie de trois critères. Premièrement, les réformes, l'harmonisation de la législation. Deuxièmement, la coopération régionale. Troisièmement, les relations de bon voisinage. Ces trois domaines doivent être satisfaits pour que puissent être résolus tous les problèmes dont la région a hérité du passé.
Concernant votre question sur la déclaration d’amitié, j'ai déjà dit que l’amitié ne doit pas faire l'objet d'un accord. L'amitié entre nos citoyens est acquise. Ils voyagent, créent des entreprises ensemble, s'amusent et profitent des possibilités offertes par les deux pays. Cela étant, ce que nous devons examiner, c'est notre coopération stratégique dans toute la région pour que nous puissions aller de l’avant.
Pour ce qui est du différend sur le nom, la Bulgarie déclare fermement qu'il s'agit de questions bilatérales entre nos voisins, toutefois je pense qu'il est grand temps de trouver un compromis raisonnable qui permettra au pays d'avancer.
M. D. DROUTSAS : La Grèce et le gouvernement grec ont depuis le début exprimé leur volonté politique de parvenir à une solution. Nous avons exprimé notre engagement, nous avons pris des initiatives et je pense que la bonne volonté et tous ces efforts francs de la Grèce dans ce sens sont reconnus de tous. Je ne peux que former l’espoir que Skopje s’intègrera dans cet esprit constructif qui est le nôtre.
Nous voulons voir bientôt Skopje faire partie de la famille européenne. C’est dans ce sens que nous œuvrons. Et nous espérons que Skopje comprend bien ce qu’il faut faire pour pouvoir entrer dans la famille européenne, à laquelle nous appartenons.
December 12, 2010