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Interview de N. Kotzias, ministre des Affaires étrangères, à la chaîne de télévision Euronews (16 janvier 2017)

Wednesday, 18 January 2017

JOURNALISTE : Monsieur le ministre, commençons par les dernières évolutions après la Conférence de Genève, les propos prononcés à votre sujet par votre homologue turc, M. Çavuşoğlu lequel a affirmé que c’était vous qui aviez quitté la table des négociations et l’article publié dernièrement par un réseau de presse international, lequel a eu un important écho et a été largement diffusé concernant le rôle que vous aurez désormais à jouer au cours des négociations.

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Chacun sait que le gouvernement grec et moi personnellement en ma qualité de ministre des Affaires étrangères, nous nous employons sans relâche à l’atteinte d’une solution à la question chypriote. Ce que nous faisons également avec insistance est de définir ce que signifie un règlement de la question chypriote. Notre intention n’est pas de résoudre une équation mathématique, ni de voir comment on bâtira une maison.

Nous allons régler un problème politique international qui est né de l’occupation illégale de Chypre par l’armée turque en 1974. Par conséquent, le règlement de la question chypriote signifie le retrait de l’armée turque à travers un processus que nous avons proposé et abordé et la suppression du régime qu’invoque la Turquie, sur la base des Traités de Zurich et de Londres, d’après lequel – selon eux et de manière illégale – les Turcs peuvent intervenir à Chypre à leur guise en leur qualité de puissance garante.

Cette question, les garanties, l’interventionnisme et le maintien de l’armée sont le cœur même de la question chypriote. Chacun sait que le gouvernement grec veut le règlement de la question chypriote et cela signifie, entre autres, qu’il faut accorder le maximum de droits possibles aux Chypriotes turcs et le plus grand sentiment de sécurité possible aux Chypriotes grecs. Autrement dit, il faut que l’armée se retire. Nombreux sont ceux qui n’aiment pas cela. C’est pourquoi chaque fois qu’il y a une réunion sur Chypre, ils m’accusent de soutenir cette ligne qui est la ligne du gouvernement grec en concertation avec les Chypriotes.

JOURNALISTE : Vous parlez des Turcs ? De la partie turque ?

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Ce n’est pas seulement la partie turque, il existe d’autres acteurs internationaux qui considèrent qu’il est bon d’avoir une sorte d’occupation à Chypre car leurs intérêts sont identiques à ceux des Turcs.

JOURNALISTE : À qui vous référerez-vous ?

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Cela est facile. Vous êtes un bon journaliste, vous pouvez comprendre ce que je veux dire. Ce qui se passe en vérité est que ces personnes s' expriment à travers ces articles, comme ceux auxquels vous vous êtes référés. Et il est très important pour nous de faire la différence. Nous avons une invitation pour nous rendre à Genève et mener des consultations politiques sur la question chypriote jeudi et vendredi.

À notre arrivée jeudi, l’ONU nous envoie un texte portant sur le type de consultations politiques de vendredi. Et soudain ils nous disent vendredi que nous ne pouvons pas mener des consultations politiques mais des consultations avec les groupes techniques.

Nous leur avons répondu que pour que les groupes techniques puissent se réunir, il faut d’abord que les directions politiques - à savoir les directions des ministères des Affaires étrangères et les dirigeants des deux communautés de Chypre, le leader chypriote turc et le Président de la République de Chypre – se mettent d’accord sur la méthode de travail de ces groupes, sur le contenu des débats, les questions à aborder et l’objectif à atteindre.

Et tout d’un coup, M. Çavuşoğlu répond – je n’ai pas très bien compris – qu’il avait prévu de partir. Nous leur avons dit qu’il ne devait pas partir vendredi mais rester pour discuter pendant deux ou trois heures, selon le programme convenu. Il est parti à Ankara et a affirmé que c’était nous qui avions quitté les négociations – alors que nous étions encore à Genève en train de discuter – et qu'il a fait un grand exploit.

JOURNALISTE : Je veux m’arrêter un peu sur la question des garanties. Vous dites d’emblée – et c’est la position politique immuable de la Grèce – que l’armée d’occupation doit se retirer. Monsieur Erdogan a toutefois affirmé après la conférence que cela n’arrivera jamais. Par conséquent, pensez-vous qu’il y ait encore une marge de manœuvre pour continuer les pourparlers ?

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : Il existe une proverbe qui dit qu’ « il ne faut jamais dire jamais »…

JOURNALISTE : Mais il l’a dit. Par conséquent ces déclarations attestent-elles de la volonté de la Turquie de parvenir à une solution à ce stade ?

Ν. ΚΟΤΖΙΑS : C’est à la table des négociations qu’ils montreront combien ils souhaitent parvenir à une solution. Et je dois vous dire, fort de mon expérience acquise au cours des négociations auxquelles j’ai participé depuis des décennies et de mes connaissances sur Chypre, que quand quelqu’un veut une solution, il le montre au moment du débat sur le cœur du problème. Quand quelqu’un ne veut pas de solution, il est très probable qu’il ne laisse pas les discussions en arriver à ce point afin de ne pas montrer ses vraies intentions. Nous en arriverons à ce point et la Turquie doit montrer ses vraies intentions. Souhaite-t-elle une solution ou une couverture légale pour ses actes illégaux ?