Point de presse conjoint de M. Nikos Kotzias, ministre des Affaires étrangères et de son homologue français, M. Jean-Marc Ayrault à l’issue de leur rencontre à Paris (Paris, 20/04/2016)
J.-M. AYRAULT : J'ai été très heureux de retrouver mon homologue et ami
Nikos Kotzias puisque nous nous voyons régulièrement au conseil des
ministres européens des affaires étrangères. Nous étions ensemble lundi à
Luxembourg et les fois précédentes à Bruxelles.
Évidemment nous
avons évoqué les relations bilatérales entre la France et la Grèce, et
souvenez-vous de ce slogan resté célèbre «Grèce - France alliance» qui,
je crois, résume bien nos relations.
Le Premier ministre Tsipras
était encore à Paris la semaine dernière pour rencontrer le président
Hollande. La France souhaite la réussite de la Grèce, pays courageux
engagé dans des réformes importantes pour redresser sa situation
financière. Ces réformes sont en train de porter leurs fruits, elles ont
effectivement un coût pour le peuple grec mais elles marquent aussi
l'attachement très fort de la Grèce à l'Europe. Il est donc important
que l'Europe soit solidaire de la Grèce dans ses efforts. C'est le point
de vue de la France, je l'ai redit à Nikos il y a quelques instants.
Nous
savons aussi que la Grèce est confrontée à des difficultés importantes
pour l'accueil des réfugiés et l'accord Union européenne - Turquie était
nécessaire. Il est en train de se mettre en œuvre, avec un engagement
pris notamment par la France de soutenir les efforts de la Grèce. Nous
avons, avec l'Allemagne, décidé d'apporter notre aide en personnels, une
aide concrète pour permettre à la Grèce d'étudier toutes les situations
individuelles de demandeurs d'asile. La Grèce elle-même a introduit des
réformes dans son droit : le parlement grec a légiféré rapidement
concernant les procédures d'asile et les procédures de recours pour que
le droit international soit respecté.
C'est donc dans le cadre du
droit international que l'accord Union européenne - Turquie s'applique,
avec des engagements importants en matière de réadmission et de
réinstallation.
Mais en ce qui concerne la France, nous nous
sommes engagés à aider la Grèce pour l'accueil de réfugiés sur notre
territoire, par des relocalisations, lesquelles sont en cours. Chaque
jour, de nouveaux réfugiés arrivent en France pour y être installés et
accueillis. C'est donc un soutien concret, nous nous sommes engagés et
nous le faisons.
Avec Nikos, nous avons abordé beaucoup d'autres
sujets, le dernier est celui de la Syrie. Nous avons pu constater nos
convergences pour un processus de paix. La guerre n'est pas une option,
le cessez-le-feu qui est intervenu doit être totalement respecté.
Aujourd'hui, les accrocs importants autour d'Alep de la part du régime
peuvent mettre en péril ce cessez-le-feu. Il est important qu'il soit
intégralement respecté. C'est ce que j'ai dit hier à l'occasion de mon
déplacement à Moscou à Vladimir Poutine et à mon homologue Sergueï
Lavrov parce qu'il est important aussi que l'aide humanitaire vienne à
toutes les populations sinistrées et que le processus de paix aille à
son terme. C'est difficile mais c'est la seule voie possible. C'est en
tout cas en ce sens que nous voulons conjuguer nos efforts, la France et
la Grèce.
Nous avons aussi abordé d'autres sujets dans le
domaine de la coopération bilatérale, dans le domaine culturel, dans le
domaine de l'éducation, de la recherche et de l'innovation. La France et
la Grèce sont des partenaires, ce sont des pays amis parce que nous
partageons aussi des valeurs. Ces valeurs, ce sont celles qui nous ont
conduits à être des Européens convaincus. Nikos m'a dit qu'il croyait à
l'Europe, moi aussi j'y crois, même si l'Europe a des défauts et qu'elle
peut parfois nous décevoir. C'est aussi notre engagement commun à
régler ensemble les problèmes de l'Europe, en aidant d'abord chaque pays
à faire face à ses propres difficultés par la solidarité, que ce soit
des difficultés financières, que ce soit des difficultés économiques ou
des difficultés migratoires. Nous avons aussi évoqué d'autres points
mais je voulais simplement m'adresser à vous en allant à l'essentiel des
sujets dont nous avons parlé ensemble.
Nous avons évoqué
Chypre, l'Ukraine mais je crois qu'il était important de résumer en
quelques mots l'essentiel de nos échanges qui seront suivis d'autres,
j'en suis convaincu, puisque nous avons l'occasion de nous voir au moins
une fois par mois et plus si nécessaire.
Ν. KOTZIAS : Ce slogan «
Grèce – France alliance » se traduit également par le beau temps que
nous avons aujourd’hui. Avec le ministre, nous avons évoqué les grands
problèmes qui préoccupent notre région, les grandes crises économiques
et géopolitiques ; nous avons parlé de l’Ukraine, de la Syrie, de la
Libye, pays dans lesquels le rôle de la France et de l’UE est très
important pour instaurer la paix et un développement social et
économique différent. J’ai invité M. le ministre à Athènes. Athènes est
toujours heureuse lorsque les hommes politiques incarnant l’esprit
français lui rendent visite. La Grèce et la France entretiennent une
relation stratégique, qui se concrétisera dans la feuille de route de
coopération en cours d’élaboration. Nous soutenons l’initiative
française sur le Moyen-Orient, car la paix au Moyen-Orient est synonyme
de paix et de stabilité pour nous tous.
Nous avons également
évoqué la crise économique qui affecte notamment mon pays. Nous avons
une fois de plus exprimé nos remerciements à la direction politique
française pour sa solidarité. Une solidarité doublée d’une compréhension
non seulement pour ce qui est des questions liées à l’économie, mais
aussi aux réfugiés. D’une nécessité d’appliquer les accords de l’UE et
ses décisions. Nous avons également abordé nos relations bilatérales qui
sont en phase de développement, mais aussi les questions liées à la
recherche, l’éducation, le savoir-faire, l’économie, aux
investissements. Nous sommes la Grèce de la civilisation antique, qui
est toujours d’actualité, nous sommes dans la France du siècle des
Lumières. Enfin, nous nous sommes référés aux initiatives prises par
notre pays dans la région, allant de notre rencontre de demain avec les
autres pays des Balkans pour aborder les problèmes de coopération
transfrontalière, jusqu’à notre initiative visant à organiser une
Conférence sur la stabilité et la sécurité en Méditerranée orientale.
L’invitation
pour la France est toujours ouverte : dans notre pays, nos conférences
et notre cœur. Jean-Marc, je te remercie beaucoup pour notre discussion
et notre coopération ici et au sein des instances européennes.
J.-M.
AYRAULT : Peut-être que peu d'entre vous le savent, mais la Grèce est
membre de l'Organisation internationale de la Francophonie et je voulais
donc saluer cet engagement. Je voulais rappeler qu'il y a un lycée
franco-hellénique avec 1.600 élèves. C'est un lycée déjà ancien qui, je
crois, symbolise bien la relation franco-hellénique.
Merci Nikos, merci de ta visite et à bientôt.
JOURNALISTE
(APE-MPE) : Les discussions d'aujourd'hui ont-elles permis d'aider de
manière concrète pour avancer dans les rapports bilatéraux en fonction
de la feuille de route que vous vous préparez à signer en juin prochain ?
Y a-t-il déjà des éléments concrets ? Par exemple dans le domaine
économique ou autres ?
J.-M. AYRAULT : Il est un peu tôt pour donner
le contenu de la feuille de route, elle est en préparation. C'est
pourquoi nous parlons de visite, avec une invitation que j'ai eue de
Nikos il y a quelques instants, juste avant cette déclaration à la
presse. Le Premier ministre doit également se rendre en Grèce. Nous
sommes en train de travailler à quelque chose de concret, de solide et
de durable.
JOURNALISTE (Reuters) : Avez-vous parlé d'une réunion d'urgence sur la Syrie ?
J.-M.
AYRAULT : J'ai évoqué à Moscou cette perspective du groupe de suivi et
j'ai déclaré que la France était prête à une réunion du groupe de suivi
au niveau ministériel si nécessaire. C'est en tout cas un sujet qui sera
abordé dans quelques jours à Hanovre, puisque vous savez que le
président Français s'y rendra à l'occasion de la visite du président
Obama. Il y aura une réunion avec l'Allemagne, la Grande-Bretagne et
l'Italie, il sera bien sûr question de la Syrie.